Mark Carney, le gouverneur de la Banque d’Angleterre, avait tiré le premier en proposant que les banques centrales se dotent d’une monnaie numérique publique. Désormais, les projets fleurissent, celui de la Chine étant très avancé. Avec un peu de retard, la BCE s’y met à son tour et les dirigeants européens mettent des bâtons dans les roues à la Libra de Facebook.
Vendredi dernier, la réunion de l’Ecofin – qui regroupe les ministres des Finances de l’Union – a dans un communiqué final multiplié les interrogations et demandes de précisions pour marquer son opposition au projet, après avoir enregistré le départ de Visa, Mastercard, eBay et PayPal. Elle a aussi donné l’occasion à la BCE de présenter les grandes lignes de son propre projet, qui n’ont pas été rendues public. Il faut accorder à Facebook qu’il n’est pas étranger à l’intérêt soudain qui se manifeste pour la monnaie digitale…
La Banque des règlements internationaux (BRI) n’est pas en reste. À peine fini son mandat à la BCE, Benoît Cœuré la rejoindra avec pour mission de coordonner et d’impulser la collaboration entre les banques centrales dans leur approche des nouvelles technologies. La nomination va de soi en raison de ses précédentes responsabilités sur les modes de payement et les infrastructures de marché au sein de la BCE.
Sans attendre, les ministres sont lors de leur rencontre entrés dans le vif du sujet et centré leur discussion sur les « stablecoins », les crypto-monnaies de faible volatilité dont la valeur est stable à moyen et long terme, au contraire du Bitcoin. Cette stabilité est en effet essentielle à tout système de paiement. Vaste sujet à dominante technique qui va faire couler beaucoup d’encre, n’en doutons pas.
Mark Carney n’y avait pas été avec le dos de la cuillère en proposant qu’une monnaie numérique des banques centrales puisse remplacer le dollar comme monnaie de référence au sein du système monétaire international. L’enjeu n’est pas mince ! Le régime chinois a pour sa part bien compris son importance et s’est engagé à fond dans la mise en œuvre d’une monnaie numérique nationale, prenant date et illustrant son nouveau statut de grande puissance.