Réunis à La Valette, les ministres de l’Intérieur de l’Allemagne, la France, l’Italie et de Malte ont conclu un accord qui sera soumis le 8 octobre à un Conseil européen, et dont on ne sait pas grand-chose. Quels seront au final les pays impliqués ? Qu’adviendra-t-il pour ceux qui s’y refuseront ?
Le projet prévoit que les réfugiés seraient répartis dans les quatre semaines suivant leur débarquement, afin de cesser la sinistre comédie qui se répète lors de chaque sauvetage, qui est difficile à assumer vis à vis de l’opinion publique. Aujourd’hui encore, l’Ocean Viking attend en pleine mer l’autorisation de débarquer dans un port sûr plus de 180 réfugiés, seuls 36 ayant pu être transférés à bord d’un patrouilleur maltais. Première en 14 mois, les nouvelles autorités italiennes avaient auparavant envoyé un garde-côte pour recueillir à son bord 82 naufragés d’autres sauvetages afin de les acheminer à Lampedusa, dans le but de ne pas autoriser le navire à y pénétrer.
Les ministres ont limité leur accord à la Méditerranée centrale et ignoré ses parties orientale et occidentales. Les réfugiés parvenant en Grèce ou en Espagne ne sont donc pas destinés à bénéficier de cette prise en charge, ce qui limite fortement sa portée. Depuis le début de l’année, sur les 67.000 migrants parvenus sur le sol européen, seuls 13% ont débarqué en Italie ou à Malte, contre 57% en Grèce et 29% en Espagne.
L’objectif d’une remise à plat des accords de Dublin n’est même pas évoqué, tellement elle paraît hors de portée, pas plus que la situation catastrophique des réfugiés détenus en Libye dans les pires conditions, au milieu d’une guerre pour le pouvoir entre factions irréductibles. Et le sort des réfugiés retenus sur l’île de Lesbos, où ils sont entassés dans le camp totalement saturé de Moria, a été ignoré.
La situation a changé ces derniers mois avec la hausse des arrivées de réfugiés à Lesbos, Chios et Kos. Leur nombre a plus que doublé par rapport à l’année passée et le président turc Recep Tayyip Erdogan, qui menace ouvertement « d’ouvrir les portes » aux réfugiés présents en Turquie est soupçonné d’en être à l’origine dans le cadre d’une stratégie de pression.
La Turquie héberge déjà 3,6 millions de réfugiés et craint la venue d’un demi-million de Syriens en provenance d’Idlib, le dernier bastion de la rébellion syrienne sous le coup d’une offensive du régime et de son allié russe. Ils sont pour l’instant entassés dans des camps de fortune le long de la frontière turque qui est fermée.
Le président turc cherche à faire coup double en instaurant en Syrie une « zone de sécurité », où un million de réfugiés déjà en Turquie seraient déportés; elle ferait également tampon avec les forces kurdes syriennes des Unités de protection du peuple. Mais rien n’est simple, celles-ci sont alliées à la coalition internationale emmenée par les États-Unis, qui ont mesuré leur rôle dans le combat contre l’organisation État islamique. Et les fonds permettant la réalisation d’une telle implantation massive manquent aux autorités turques, aux prises avec une sévère crise économique.