L’Europe est mal en point et la mise en place de ses institutions le traduit avec éloquence, comment s’en étonner ? Les tractations ayant abouti à nommer des personnalités inattendues à leur tête n’ont pas été l’occasion d’un débat sur son avenir d’une grande hauteur de vue. Et, à peine nommées, celles-ci ont été contestées pour leur manque présumé d’aptitude à exercer leurs futures responsabilités.
Il a été épargné à Christine Lagarde l’épreuve qu’a représenté pour Ursula von der Leyen son audition par le Parlement européen, qui était appelé à confirmer sa nomination à la tête de la Commission. Sera-t-elle à la hauteur d’une succession difficile ? Concrétisera-t-elle la mutation de la BCE qui a été engagée par son prédécesseur, bouleversant les tabous, et comment ? Pour le savoir et éviter un procès d’intention, il va falloir attendre un peu. Mario Draghi a déjà préparé ce qui va suivre, qui ne portera pas l’imprimatur de sa succession.
Le calendrier de travail d’Ursula von der Leyen ne lui laisse pas un tel répit. D’ici octobre, elle va devoir constituer son équipe de commissaires, un exercice qui ne va pas être de tout repos étant donné les soutiens dont elle a bénéficié lors de sa courte élection au Parlement européen. Certains d’entre eux, comme ceux des gouvernements hongrois, polonais et italiens, sont en effet des plus encombrants et leurs désidératas difficiles à satisfaire. Et ce n’est qu’un hors d’œuvre avant les multiples défis qui l’attendent.
Cela commence mal, donnant le ton de la suite. Une réunion informelle au niveau ministériel devait lundi dernier mettre au point un mécanisme de débarquement et de répartition des réfugiés secourus en mer. Les ambitions étaient modestes, puisque le dispositif devait être provisoire, initialement prévu jusqu’en octobre prochain. Mais les déclarations cherchant à masquer l’échec de la réunion et faisant état de l’accord de quatorze gouvernements ne peuvent cacher que la décision a été reportée à septembre prochain… Il aura fallu une année entière, depuis la fermeture des ports italiens décrétée par Matteo Salvini et de laborieuses négociations au coup par coup, pour en arriver là.
António Vitorino, le directeur de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), n’a pas mâché ses mots au sortir de la réunion, « Nous ne vivons plus une crise des arrivées, nous vivons une crise des morts ». Et les mots ne sont plus un recours, comme lorsqu’il est déclaré par le ministre luxembourgeois des Affaires étrangères et de l’Immigration et de l’Asile, Jean Asselborn, que « il n’est plus admissible que des êtres humains soient renvoyés dans des camps de détention (en Libye) ». La mauvaise conscience ne change rien à l’affaire.
Le HCR et l’OIM ont pour leur part réclamé lors de la réunion qu’une opération de recherche et de sauvetage de l’UE était nécessaire après l’arrêt de l’opération Sophia, mais le sujet n’était pas à l’ordre du jour…
Une vraie usine à gaz…
Hubert Védrine voit juste:
1) Abandonner tout projet fédéraliste (voué à l’echec)
2) Refonder les traités
3) Construire une Europe moins ambitieuse mais beaucoup plus efficace