Il est attendu des banques centrales qu’elles sauvent à nouveau le système financier du nouvel accès de crise qui surviendra, et c’est pour cela qu’il leur est conseillé de reprendre des forces pour la prochaine occasion. Une des raisons pour lesquelles elles devraient remonter leur taux.
Or, elles n’en prennent pas le chemin, et cela alimente une inquiétude. Et si elles n’étaient pas à la hauteur la prochaine fois, si elles ne parvenaient pas à domestiquer le monstre ? Les commentaires sur les mérites comparés de Mario Draghi et de Christine Lagarde ne font qu’effleurer le vrai sujet. Il devrait être constaté qu’après avoir épuisé leurs ressources, les banques centrales sont déjà démunies. Pire encore, que leurs remèdes apportent du mal après avoir produit du bien.
L’océan de liquidités qu’elles ont déversé dans le système financier est en cause. En évitant que ses mécanismes ne se grippent, elle l’a noyé sous un trop plein où les investisseurs se débattent afin de placer leurs disponibilités. Les distorsions de marché se multiplient, conduisant à brouiller toute évaluation du risque, avec comme conséquence une très faible charge d’intérêt de la dette et un gonflement du prix des actions, la bourse étant devenue totalement déboussolée.
Mais qu’attend-on des banques centrales la prochaine fois ? Qu’elles renouvellent leurs injections de liquidité ? Cela reviendrait à appuyer où cela fait mal et ne ferait qu’empirer ses distorsions; qu’elles baissent leur taux directeur et diminuent celui de leur facilité de dépôt, mais leurs marges de manœuvres le permettent-elles ? Ceux qui l’affirment n’empruntent-ils pas à la méthode Coué ? Sommes toutes, qu’observe-t-on ?
Les banques centrales ne procèdent pas autrement que les dirigeants politiques, elles gagnent du temps mais ne réparent pas des mécanismes qu’au contraire elles contribuent à fausser. Elles évitent de devoir se rendre à une triste vérité : le système financier est atteint par son propre poids, qu’il ne supporte plus, faute de corrélation avec l’économie réelle. La construction démesurée n’a plus de points d’appui et ne trouve des garanties à la multiplication des transactions nécessaires à son équilibre qu’en elle-même ou avec des titres résultant de la fuite en avant de l’endettement.
L’écart grandissant entre la croissance économique mondiale, qui souffre d’un ralentissement semblant destiné à s’installer, et l’embellie boursière qui atteint toutes les grandes places dont témoignent les principaux indices boursiers offrent une photographie saisissante des contradictions actuelles. Une autre fait état de la croissance démesurée de l’endettement public et privé. En dix ans, il a augmenté d’environ 50%. Si on le compare au PIB, comme il est d’usage, cette dette en représente désormais 234%.
La machine tourne à vide, s’endetter ne coûte presque rien et investir rapport peu quand c’est le cas. À moins de jouer à la roulette en faisant des paris très risqués. Où trouver du rendement ? Le dernier placement à la mode consiste à financer les emprunts d’entreprises déjà très endettées, comme on le relève aux États-Unis, ce dont nous mettent en garde les institutions internationales.
Circonstance aggravante bien dans la ligne des banques américaines, ces prêts à risque sont titrisés afin de les vendre et les sortir de leurs bilans. Si ce n’est le volume déjà atteint, cela nous rappelle le précédent des subprimes.
Comment le monde financier se porte-t-il ? Il se porte comme il peut…