Le système a dû abandonner la carte Bouteflika, devenue impossible à jouer, et c’est le chef d’état-major de l’Armée, Ahmed Gaïd Salah, qui a été chargé de l’annoncer, comme s’il en était le parrain. Se gardant de jouer le rôle d’exécuteur des hautes œuvres, l’Armée nationale populaire souligne qu’elle ne veut pas prendre le pouvoir.
Cela ne donne pas de solution de remplacement pour la présidence. Devant l’ampleur du soulèvement populaire, il ne reste qu’à improviser un scénario et à donner d’autres gages. D’autres têtes vont devoir tomber pour rendre crédible un plan B dont la concrétisation risque de traîner en longueur. À moins que, devant l’urgence, les clans ne fassent corps.
Dans son discours, le général a proclamé « nécessaire, voire impératif, d’adopter une solution pour sortir de la crise » puis prôné une solution répondant aux « revendications légitimes du peuple », conforme à la Constitution et garantissant la « stabilité de l’État ». Ne s’étendant pas sur ces revendications, qu’il ne peut satisfaire car c’est le système qui est dorénavant visé, il est par contre très clair quand il évoque la « stabilité de l’État », entendez le maintien de ce système aux commandes.
Quelle reconfiguration pourrait-elle le rendre acceptable ? En raison de l’opacité du système, seules de premières manifestations des luttes des clans qui le traverse ont été perçues et on est loin du compte.
Les Algériens, qui en ont trop vu, ne sont pas dupes. Mais ils ne sont pas porteurs d’une solution : le régime est à prendre et ils n’ont pas de candidat. Ils peuvent espérer que les loups finissent par se dévorer entre eux tout en craignant qu’un clan, au bout du rouleau, ne tombe dans la provocation, avec derrière la folie d’une intervention de la Gendarmerie nationale.
Le général Ahmed Gaïd Salah a joué un coup mais il ne reprendra pas l’initiative tant qu’il n’aura pas davantage découvert son jeu.
Il y a un parallélisme certain entre France et Algérie.
Du côté du peuple c’est évident. Et aussi du côté des clans au pouvoir. De part et d’autre, les faiblesses sont les mêmes.
La corruption est très semblable.
Les bagages algériens sont potentiellement beaucoup plus chargés: intervention de l’armée et Islamistes radicaux bas de plafond. Si par sagesse ou par maturité, ces 2 dangers sont écartés (et il semble l’être jusqu’à présent), la fin, aussi bien en Algérie qu’en France va être passionnante.