Au terme de longues tractations, mais selon le calendrier prévu, le gouvernement italien a décidé d’un déficit de 2,4% non seulement pour 2019 mais également pour les deux années suivantes, afin de financer les promesses électorales du Mouvement des 5 étoiles et de la Ligue.
Le précédent gouvernement avait prévu un taux de 0,8-0,9% et le ministre actuel des Finances s’arcboutait sur 1,6%. Luigi Di Maio apparait ce matin comme le grand bénéficiaire de la décision qu’il a forcé, ce dont il avait bien besoin vis-à-vis de la Ligue.
Mais comment vont réagir la Commission et les marchés ? La transgression est forte, même si le déficit de 2,8% de la France est appelé à la rescousse. Mais Bruxelles peut-elle prendre le risque d’une sévère confrontation dans la perspective des prochaines élections européennes ? Laisser faire prodigue certes un encouragement dans toute la zone euro, mais où mènerait le rejet de ce projet de budget ? L’Italie, c’est une toute autre affaire que la Grèce ! La première réaction du commissaire Pierre Moscovici exprime donc la prudence. Après avoir qualifié ce budget de « hors des clous de nos règles qui sont communes », il précise entendre dialoguer avec les autorités italiennes afin que « l’Italie soit capable de rester dans l’esprit commun ». Il y a donc les règles et leur esprit. Au sujet de celui-ci, il précise aussi « je ne suis pas dans l’esprit des sanctions. » Quant aux marchés, ils se tendaient ce matin, mais sans donner le signal d’aller à l’affrontement.
Les deux partis de la coalition vont pouvoir avancer dès l’année prochaine et promouvoir de premières mesures en faveur du revenu de citoyenneté, une augmentation des petites retraites et une révision de la fiscalité ambiguë sous couvert de l’adoption d’une « flat tax » chère à la Ligue. Luigi Di Maio a lancé hier soir « nous avons rapporté à la maison le budget du peuple qui pour la première fois dans l’histoire de ce pays annule la pauvreté grâce au revenu de citoyenneté, pour lequel sont prévus 10 milliards d’euros », ajoutant « arrêtons de prendre à ceux qui ont toujours travaillé, et commençons à prendre aux plus puissants ».
Engagés sur cette pente, la coalition italienne va-t-elle pouvoir contenir le déficit à 2,4% du PIB, si celui-ci résiste à l’examen budgétaire bruxellois ? Cela dépendra de la croissance du PIB ainsi que de la hausse des taux obligataires.
Dans cette attente, il est significatif que les débats italiens ne portent pas sur la soutenabilité du déficit, mais sur le respect de la réglementation européenne. Les marges de manœuvre que le gouvernement italien va obtenir vont par contre faire jurisprudence dans toute la zone euro.