Comme nul ne peut l’ignorer, l’inexorable croissance de la dette publique fait problème. Sa soutenabilité est devenue la règle, quitte dans le cas de la Grèce à l’appuyer sur des prévisions de croissances délirantes.
La raison en est simple : le système financier, qui ne cesse d’enfler, a besoin d’actifs de référence pour assurer sa stabilité en jouant le rôle de garantie, et l’on n’a pas trouvé mieux que les titres de la dette publique pour accomplir cette mission. Quitte à ce que cette soutenabilité soit de plus en plus une véritable fiction, faute d’une croissance suffisante de l’économie, cette garantie ultime du remboursement de la dette.
Sa réduction est tout autant mal partie. Elle se heurte à deux écueils – la mise en œuvre de coupes budgétaires drastiques ou l’augmentation dans les mêmes proportions des taxes – mais elle a aussi pour conséquence la diminution des revenus bancaires correspondants à sa détention, et par conséquent la rentabilité de leurs capitaux propres, déjà bien amoindrie. Alors que la stabilisation du système financier réclame d’avantage de titres souverains.
Qu’en est-il alors de la dette privée ? On se souvient que c’est de ce côté-là, lors de la crise des subprimes, qu’est née il y aura bientôt dix ans la crise financière dont tous les effets en chaîne ne se sont pas encore épuisés. Avec comme responsables des banques qui ne se souciaient pas de la solvabilité de leurs emprunteurs, ayant délesté leurs bilans des prêts qu’elles avaient consentis à tout va en les titrisant par pelletées…
La hausse du marché immobilier, qui a depuis repris, ne laisse aujourd’hui pas d’autre alternative aux particuliers désirant acquérir un logement que de s’endetter pour une période de plus en plus longue, afin d’étaler leurs remboursements en accord avec la croissance médiocre de leurs revenus quand ils n’appartiennent pas au haut du panier. Sur ce marché très compétitif, la tendance est désormais au Royaume-Uni de consentir des prêts à 35 ans et de diminuer à 10% du prix du bien, voire 5%, l’apport initial du client. Mais l’exercice à ses limites et la hausse annoncée des taux va a contrario augmenter le montant des mensualités de remboursement. Les banques et les organismes spécialisés pourront-ils éviter, face à l’augmentation prévisible des défauts, de répercuter comme prévu la hausse des taux, ce qui ne va rien arranger ?
Aux États-Unis, le problème se pose autrement. Le volume des prêts étudiant a augmenté de 500 milliards de dollars depuis l’année universitaire 2010-2011, et le think-tank Brookings Institution a mis en garde à propos d’un taux de défaut qui pourrait atteindre 40% en 2023. Cela impliquera un soutien grandissant de l’État mais celui-ci sera sans effet sur les conséquences indirectes de ce volume. Demain, les étudiants ayant emprunté ne seront plus en mesure d’acheter une maison ou de financer le démarrage d’un business faute d’avoir terminé leurs remboursements. En conséquence, la dette ne va plus avoir le même rôle d’entrainement sur la croissance économique, celle-là même qui assure son remboursement.
Sur ce coup-là n’avez-vous pas été un petit peu trop simpliste monsieur Leclerc ?
Globalement et à l’échelle mondiale l’endettement des ménages est induit par une baisse de la part des revenus du travail dans le PIB.
Le partage de la valeur ajoutée bénéficie toujours plus à la plutocratie qui nous dirige en sous-main, les fortunes planquées dans les paradis fiscaux accélérant leur gonflement au même rythme.
Les duettistes Thatcher Reagan ont profondément changé le monde et ce changement s’amplifie de jour en jour.
Certes vous renvoyez bien à cette cause première en évoquant la crise des subprimes et ses principales victimes potentiellement incapables de rembourser leur prêt des la signature des contrats. Les banques se sont bien débarrassé des créances qu’elle savaient insolvable ou du moins l’ont elles cru en ignorant l’effet boomerang à venir. Aurait-il fallu ajouter pourquoi ces emprunteurs étaient pour la plupart insolvables, car on l’oublie trop souvent.
S’agissant du gonflement du bilan des banques centrales par acquisition de valeurs à revenus fixes il est parfaitement vrai que trouver un collatéral de qualité devient un véritable casse-tête. C’est le cas en particulier pour la BCE. Mais c’est là en effet induit à la croissance de la dette et non une cause.
Plus la dette est en croissance et moins les débiteurs sont globalement solides, surtout lorsque le PIB traîne les pieds. Le casse-tête va donc se complexifier d’autant que certaines créances souveraines recommencent à devenir des collatéraux bien douteux.
Quand est la durée de remboursement c’est encore la Suède qui bat tous les records même si la loi n’autorise désormais plus les emprunteurs à s’endetter pour une durée supérieure à 105 ans…
Que cette petite critique ne cache cependant pas ma reconnaissance à votre égard pour la qualité de vos billets ainsi que pour les informations expertes qu’ils contiennent.