Sur la base d’un contrat de gouvernement de 40 pages et 22 points remanié en deux temps trois mouvements, le Mouvement des 5 étoiles et la Ligue s’apprêtent à accéder au pouvoir. La nouvelle version du document a évacué les éléments mettant explicitement en cause la politique européenne, mais laquelle de la nouvelle ou de l’ancienne exprime au mieux les véritables intentions des deux mouvements, nuances comprises ?
Les chiffrages des nombreuses mesures qui sont préconisées varient, et le plus prudent – celui du journal Corriere della Sera – en estime le coût à 65 milliards d’euros annuel, soit près de 4% du PIB. C’est strictement incompatible avec le respect des règles budgétaires européennes, ne pouvant être compensé par la croissance. Ce qui les fait potentiellement voler en éclats. L’implicite remplace l’explicite afin de passer l’obstacle que représentait le président Sergio Mattarella et d’avoir la voie libre, mais la logique est identique. Au lieu de demander une révision des traités, le programme de gouvernement ne laisse plus comme choix que d’accepter la transgression des règles européennes ou de voir l’Italie sortir de l’euro, avec peut-être comme phase transitoire la création d’une monnaie parallèle libellée dans la monnaie unique.
Ceux qui feignent de croire à ce tour de passe-passe se promettent des jours difficiles. La référence à une sortie de l’euro disparue, il est préconisé de « revenir à la situation des origines dans laquelle les États européens étaient mus par une intention sincère de paix, de fraternité, de coopération et de solidarité ». Sous-entendu, avant la création de l’euro…
La nécessité de revoir les principes de l’Union bancaire afin de protéger les petits actionnaires, comme le projet de transformer la banque Monte dei Paschi di Siena en banque d’investissement contrôlée par l’État, expriment tout autant une politique bancaire alternative à celle qui a été suivie et la volonté d’une relance économique. S’inscrivant dans l’air du temps, la relance du marché intérieur s’appuie sur la diminution généralisée des impôts et non sur la redistribution des revenus, à l’exception de l’instauration d’un revenu universel pour l’instant repoussé.
En entrant dans les détails de l’accord, on comprend que le Mouvement des 5 étoiles a lâché plus de lest que la Ligue dans le cours des tractations. Cela reflète l’évolution du rapport de force électoral entre les deux mouvements. Selon les sondages, la Ligue et Forza Italia se rapprocheraient ensemble du seuil des 40%, au cas où Sergio Mattarella convoquerait de nouvelles élections, en raison de la progression du score de la Ligue. Faut-il chercher plus loin la forte motivation du M5S d’aboutir à un accord afin de ne pas prendre le risque de se voir exclu du pouvoir ?
Sauf accident de dernière minute, les dés sont jetés ! Un gouvernement va être porteur de la contestation de la politique impulsée par le gouvernement allemand, sous couvert de laquelle une offensive ultra-libérale est menée. Reflet de la profonde crise politique qui secoue l’Europe, une alliance populiste hétérogène va en être à l’origine. Avec le risque que sa composante d’extrême-droite prenne en son sein le pas dans le cours des affrontements qui se préparent. Ceux-ci faisant son jeu, elle ne va pas se priver d’en créer l’occasion.
Il y a ça :
https://www.francetvinfo.fr/economie/budget/hopital-un-plan-dun-milliard-deconomies_2758321.html
Et puis ça :
https://www.francetvinfo.fr/sante/hopital/tours-deux-personnes-agees-meurent-dans-la-salle-d-attente-des-urgences-en-quinze-jours-le-personnel-choque_2758175.html
Mais naturellement, ici ou ailleurs, tout cela n’a rien à voir avec la montée des populismes…
Face à l’importance des événements qui s’enclenchent, le colloque du 24 mai prochain à l’Assemblée Nationale: « Demain: Quelle monnaie pour quel monde » sera partiellement réorienté vers l’examen de la question italienne. Les intervenants s’y préparent. Les inscriptions sont aujourd’hui closes mais nous négocions avec les services de l’Assemblée la possibilité de s’inscrire jusque lundi midi. Merci de solliciter votre inscription par mail: miwerrebrouck@nordnet.fr
FL : « …La référence à une sortie de l’euro disparue, il est préconisé de « revenir à la situation des origines dans laquelle les États européens étaient mus par une intention sincère de paix, de fraternité, de coopération et de solidarité ». Sous-entendu, avant la création de l’euro… »
Est-ce sans ambiguïté??.. Ne pourrait-on?? décoder comme suit : « Sous-entendu, avant qu’Angela herself (sauf erreur de ma part) ne klaxonne urbi et orbi que les reconnaissances de dette émises en €uros par chaque État DEVAIENT, BIEN ENTENDU..!!.. , être considérées comme couvertes individuellement uniquement par les capacités de chaque État distinctement… avec les conséquences immédiates vécues sur les taux immédiatement individualisés » ?
Les échéances se rapprochent. Un peu plus tôt, un peu plus tard va se déclencher une tempête politique, financière et sociale en Europe.
C’est le moment que choisit le mouvement ouvrier français (sauf FO et LO ) à se fondre comme des crétins, dans un mouvement populiste à la Beppe Grillo !
Il est vrai qu’en ce moment, c’est le calme plat financièrement et socialement en Europe ! mer d’huile en Grèce par exemple !
Bravo les Italiens ! j’aurais voulu que ce soit les Français qui franchissent en premier le pas mais ils ont médiocrement préféré élire président l’employé de la banque Rothschild…
Selon les apparences, ni Bruxelles ni Berlin ne peuvent accepter une telle distorsion des règles européennes. Ils ont fait plier la Grèce pour moins que ça. D’un autre côté, ils ont fait preuve de créativité pour Chypre.
Que vont-ils pouvoir imaginer pour faire rentrer l’Italie dans les rails réglementaires, que la démocratie n’a pas pouvoir de changer ?
On pourrait envisager une pression constante tendant à ce que les 2 partis abandonnent les points les plus saillants de leur programme. Donc les déconsidérer et faire éclater cette alliance contre nature.
En tout cas, 4 % du budget en faveur des pauvres est clairement inacceptable et devrait être facile à faire sauter.
Ou bien, jouer une indifférence hostile et laisser la montée les taux faire la démonstration que le programme est effectivement non viable. Je verrais bien un barbouillage brun-rouge pour montrer que ce populisme-là est anti-tout et pas seulement anti-européen.
A cet égard, il leur faudra prendre en compte des alliances possibles avec l’est européen qui est quasiment en état d’insurrection vis-à-vis de Bruxelles. En cas d’élargissement sud et est, la gouvernante US va peut-être y aller de ses incitations (?).
Avec un Brexit difficile, la barque européenne est chargée au-delà du raisonnable et devient une périssoire. Va falloir que les gestionnaires-comptables se transforment en politique avisé et au vue aussi ample que le réclame la situation. C’est pas gagné. Faire le dos rond, comme pour la crise des réfugiés, n’est plus adéquat.
Quel dommage que le processus de réformes internes soit si peu pris en compte par le traité européen !
« Réforme » est d’ailleurs une incantation qui se fait rare…
Europe (de Bruxelles), prison des peuples ?
1/ On me dit que ce gouvernement a un programme anti-système et anti-austérité : selon FL, « une politique bancaire alternative à celle qui a été suivie et la volonté d’une relance économique. S’inscrivant dans l’air du temps, la relance du marché intérieur s’appuie sur la diminution généralisée des impôts et non sur la redistribution des revenus, à l’exception de l’instauration d’un revenu universel pour l’instant repoussé. » Avant de pronostiquer le clash avec la direction économique bruxello-germanique de l’Europe, ne faut-il pas se réjouir ? Imaginer ses effets concrets sur l’opinion ?
2/ Comment comprendre aujourd’hui ce mouvement « populiste » contractant avec l’extrème-droite ? Jadis je voyais Berlusconi comme le parfait populiste, assurant l’hypnotisation des foules. Ici, on a plutôt l’impression d’un mouvement monté par Coluche qui aurait réussi avec les idées de Hamon, et qui aurait trouvé un espace à la place qu’ont prises les mouvements LREM et LFI en France et leurs leaders charismatiques. Le populisme est-il l’émanation d’un peuple, mais dirigé par un mouvement sans contenu ni expériences politiques ? (par opposition à LFI et au chavisme, mouvement du « peuple » mais avec des principes de conflit politique ? Ou est-il une manipulation du peuple par une clique politique aux principes dangereux ? L’effroi de Bruxelles et des dirigeants allemands n’est pas suffisant pour rejeter toute analyse du phénomène.
3/ De sorte que la question devient aussi : si la LFI peut accéder au pouvoir avec l’appui du FN (solution « de compromis » ou « de coalition » difficilement imaginable pour les citoyens français, mais possible pour tant d’autres), saisit-elle l’occasion, et à quelles conditions, au risque de laisser le pouvoir à Macron et/ou Waucquez ?
Un spectre hante l’Europe : le spectre du populisme. Toutes les puissances de la vieille Europe se sont unies en une Sainte-Alliance pour traquer ce spectre : le président de la commission européenne et la chancelière allemande, Macron et Tusk , les marcheurs de France et les austéritaires d’Allemagne.
Quelle est l’opposition qui n’a pas été accusée de populisme par ses adversaires au pouvoir ? Quelle est l’opposition qui, à son tour, n’a pas renvoyé à ses adversaires de droite ou de gauche l’épithète infamante de populiste ?
Il en résulte un double enseignement.
Déjà le populisme est reconnu comme une puissance par toutes les puissances d’Europe.
Il est grand temps que les populistes exposent à la face du monde entier, leurs conceptions, leurs buts et leurs tendances; qu’ils opposent au conte du spectre populiste leur propre manifeste.
(Arrivé à ce stade, celui qui n’a pas reconnu l’original gagne le droit de payer le coup à boire à tous les autres 😉 )
Populisme = ressentiment populaire (au sens déjà mis en évidence par Keynes dans la période suivant la crises des années 30) . Ressentiment sur quoi ? Ce serait là-dessus que nos zelites devraient utiliser leurs neurones, au lieu de s’offusquer en entendant la rumeur de la rue et en détournant les yeux à la vue des gueux….preferant plutôt prêcher la bien-pensance et les bons sentiments ce qui ne coute rien et rapporte la bonne conscience, et diaboliser tout ce qui pourrait menacer le statu-quo et remettre en cause les avantages acquis….mais le cas de l’Italie semble montrer que le rumeur monte, et qu’il devient de plus en plus difficile de ne pas l’entendre…
Après six billets sur l’Italie, il serait sans doute utile de s’intéresser au cas allemand, car quelque chose est en train de se produire aussi à Berlin. Comme si, après septante années de soumissions, les anciennes puissances de l’axe reprenaient leur liberté, chacune selon son génie national. Bordéliquement pour l’une, dans le bon ordre pour l’autre.
L’Europe, sous nos yeux, est en train de se défaire pour n’avoir pas su être autre chose que le cheval de Troie des intérêts Etats-uniens.
D’où le désarroi des milieux affairistes au pouvoir aujourd’hui en France qui comprennent soudain (Einlichtung !) que les exigences d’équilibre économique des Allemands n’étaient pas qu’idéologiques. Elles étaient celles des conditions de l’indépendance, indépendance nationale désormais puisque le continent n’a pas su ou voulu suivre.