Haruhiko Kuroda, le gouverneur de la Banque du Japon, n’a pas cessé ces cinq dernières années de repousser l’assouplissement de sa politique monétaire, qui n’intervient toujours pas. L’inflation ne décolle pas du taux de 1%, conduisant ici ou là à l’émergence de pensées sacrilèges comme l’abandon de la cible de 2% pour valeur inférieure.
Pour l’instant la théorie prime contre vents et marées, nous offrant une saisissante illustration de cette pensée scientifique qui tourne le dos aux faits lorsqu’elle est contredite par ceux-ci. Combien de temps faudra-t-il pour qu’elle soit reconsidérée ? À moins que les choses ne rentrent dans le rang. Dans cette attente, le gouverneur pratique la sémantique en substituant la référence à « un horizon » non défini à « une date précise ».
Pour mémoire, la BoJ achète annuellement plus de 600 milliards d’euros de titres obligataires, dont une large part de dette publique, ce qui tombe bien étant donné l’abyssal déficit budgétaire du pays. Mais ne vous attendez-pas à des commentaires acerbes sur cette monétisation prohibée sous nos cieux, la théorie prévaut, mais chacun l’applique à son gré !
Une question devrait pourtant être posée qui ne l’est pas. Le cas du Japon est-il une exception ou le précurseur du cas général ? On observe en tout cas que la main de la BCE n’est plus aussi ferme lorsqu’il est évoqué l’amorce de la fin de son programme de rachat de la dette publique (et accessoirement privée). Les gouverneurs se contentent dans l’immédiat « d’ancrer les anticipations » de cette normalisation, selon leur très jolie formule. Ils prévoient maintenant que l’inflation sous-jacente devrait décoller et atteindre 1,7% en 2020, alors qu’elle reste obstinément calée à 1%, nous rappelant fâcheusement le cas japonais. Il sera toujours temps de revenir plus tard sur ces nouvelles prévisions, si besoin !
Dans l’immédiat, les effets attendus de la politique de Donald Trump constituent un excellent prétexte pour ne pas s’interroger sur l’évolution des mécanismes qui président à la formation de l’inflation, qui affecte désormais prioritairement les actifs financiers. Alors, l’accroissement des dépenses et la baisse des recettes budgétaires outre-Atlantique vont-elles réussir à relancer l’inflation dans l’économie, là où les banques centrales ont échoué ? Si c’est le cas, ce sera au prix de la fuite en avant que représente le nouvel accroissement de la dette publique américaine.
L’endettement des américains va également être facilité, afin qu’ils n’utilisent plus les services prohibitifs des prêteurs sur salaire et sur gage pour boucler leurs fins de mois. Les banques américaines vont pouvoir prêter à des conditions allégées aux dizaines de millions d’entre eux qui sont dans ce cas, des sommes allant de 500 à 5.000 dollars de 45 à 90 jours.
Voilà une excellente illustration de la nouvelle prospérité américaine et de la mansuétude de l’administration Trump !