Les participants à la réunion de printemps du FMI et au G20 finances se penchent sur une grave question à laquelle ils ne trouvent pas de réponse commune : l’offensive tout azimut de Donald Trump contre les « pratiques commerciales déloyales » va-t-elle favoriser ou entraver la croissance ? Et, subsidiairement, quelle est la meilleure façon de s’attaquer aux déséquilibres commerciaux ?
Quel que soit le positionnement adopté, les propos s’inscrivent dans le cadre alarmiste du discours prononcé par Christine Lagarde. Elle s’inquiète en raison des nuages sombres qui s’accumulent sur l’économie mondiale : outre les conflits commerciaux qui font l’affiche, le vieillissement de la population dans les pays développés et l’endettement mondial record. Elle oublie la détérioration environnementale accélérée.
Les propos tenus lors des réunions de Washington sont inconciliables. Steven Mnuchin, le secrétaire américain au Trésor, affirme que des échanges « libres, loyaux et réciproques » tels que les conçoit Donald Trump « soutiendront la croissance », et il réclame qu’il soit parlé haut et fort en direction des pays ayant de larges excédents. La Chine en premier lieu, mais l’Allemagne également.
Faisant référence aux multiples foyers de tension existants, Roberto Azevêdo, le directeur général de l’OMC et représentant du Brésil au FMI, considère par contre que « une rupture dans les relations commerciales entre les principales économies pourrait faire dérailler la reprise de ces dernières années, menaçant la croissance économique et mettant en danger de nombreux emplois ». Dans une économie interconnectée, les conséquences « seraient probablement mondiales et auraient des répercussions bien au-delà des pays directement impliqués », relève-t-il.
Quant au ministre français Bruno Le Maire, il penche du côté américain pour déplorer les excédents commerciaux tout en opposant le « dialogue constructif » à « l’affrontement vain », souhaitant privilégier la coopération en vue de redéfinir un nouvel ordre économique multilatéral. Qu’il laisse dans le flou le plus total.
Bien que le commerce ne figure pas dans les prérogatives du FMI, Christine Lagarde a proposé de mettre en place « une plateforme pour le dialogue et une meilleure coopération », dont les chances de voir le jour sont nulles. Toute solution multilatérale est clairement proscrite par Donald Trump, qui impose son jeu consistant à jouer les rapports de force unilatéraux.
Qui pourrait le faire dévier de sa fuite en avant ? Quelques anciennes au sein de la Fed, les rescapées qu’il n’a pas nommé, réagissent mais sont désormais minoritaires. Lael Brainard estime qu’il est « vital d’être prudent quant à tout changement de l’encadrement des exigences de fonds propres et de liquidités » et considère « prématuré de revisiter le calibrage » de ces règles, qui est cependant en cours.
Pour Loretta Mester, la présidente de l’antenne régionale de la Fed de Cleveland, l’alourdissement de 1.600 milliards de dollars sur dix ans de la dette « pourrait limiter les investissements productifs du secteur privé et du gouvernement, donc abaisser la productivité et la croissance à long terme ». Mais l’une et l’autre ne font que prendre date.
Un monde tout entier est révolu et les repères sont perdus. La mondialisation et la croissance étaient faites pour s’entendre, rien ne va plus ! Après la finance, c’est économie mondiale qui est reconnue déséquilibrée, mais la pensée dogmatique, décidément très courte, est sans ressource quand il s’agit de les remettre d’aplomb, car il faudrait la mettre elle-même en question.
L’allocation des ressources est la question clé. Qu’il s’agisse de la suppression de la spéculation financière par essence parasitaire, de la réorientation des capitaux en faveur du développement du bien-être, de la répartition égalitaire des revenus et de la préservation des ressources de la Terre.
On en est très très loin.
Quels enseignements et éventuellement pistes de progrès , ou raisons de désespoir supplémentaires , pourraient être tirés du Conseil de l’Arctique ?
« La pensée dogmatique, décidément très courte, est sans ressource » ; celle portée par toute une génération et enseignée aux plus jeunes, aujourd’hui sélectionnés et aux manettes des principales grandes institutions : libre échange obligatoire, mondialisation néolibérale portée au pinacle (libre circulation des capitaux, des biens et des personnes (pour celles qui en auront les moyens)), concurrence libre et non faussée, croissance à tout prix (et d’abord pour rénumérer les intérêts du Capital et le maintenir coûte que coûte)…. mais pour quelle vision, pour quelle finalité ? Donc pas de véritable stratégie possible, à part une gestion de court terme, la liquidation des biens communs (pour rembourser la « dette » et offrir de nouveaux débouchés aux tenants du Capital)…. A ce jeu là, la partie de Monopoly se rapproche de la fin…