Le groupe de la CDU-CSU au Bundestag l’a décidé, c’est Nein ! sur toute la ligne aux propositions de relance européenne de la Commission et d’Emmanuel Macron. Le projet de résolution qui a fuité dans la presse allemande ne laisse plus aucune ambiguïté, à tel point qu’on pourrait y discerner la patte de Wolfgang Schäuble du haut de sa présidence du Bundestag.
Selon ce document, il n’est pas question de laisser la Commission utiliser l’article 352 du Traité qui aurait permis de faire l’économie d’une modification de celui-ci, et les conditions les plus draconiennes sont énoncées si ce dernier chemin devait être emprunté. Autant dire qu’il est bien barré. La mutation du MES est tout particulièrement visée, sur lequel le Bundestag tient à conserver un droit de veto sur ses décisions tout en affirmant son « indépendance » et en ne laissant pas voix au chapitre à la Commission et à la BCE.
Dans ces conditions, le projet accorde au MES le pilotage et le contrôle exclusif des crises à venir, et il rejette toute mission de stabilisation économique lors d’une récession ainsi que tout concours financier au fonds de résolution des banques. Que reste-t-il à négocier ?
Pour sa part, Olaf Scholz, le ministre des finances SPD de la grande coalition exprime dans le Frankfurter Allgemeine Zeitung son scepticisme à propos de l’Union bancaire et avance qu’Emmanuel Macron sait dorénavant à quoi s’en tenir des intentions allemandes. En effet !
Que va-t-il bien pouvoir dire à Angela Merkel lors de leur prochaine rencontre préparatoire au sommet de juin prochain ? Si ce n’est de constater que les désaccords s’empilent ? Quelle opération de diversion peut-il encore tenter ?
On aura noté que Federica Mogherini a mis l’accent sur la nécessité d’une solution politique en contrepoint des tirs de missiles sur la Syrie. En Italie, Matteo Salvini de la Ligue les a condamnés. Angela Merkel les a soutenus tout en rejetant toute participation allemande tandis que, d’une manière générale, les dirigeants politiques allemands ont été peu diserts. Cela ne fait pas une politique européenne, pas plus qu’un soutien à la position d’Emmanuel Macron.
Par ailleurs, que va-t-il se passer lorsque va s’approcher, dans moins de deux semaines, la fin du délai accordé par Donald Trump avant de taxer l’acier et l’aluminium européen ? Un accord est envisagé côté européen, qui supprimerait tout droit de douane pour les produits industriels américains, mais l’unanimité ne semble pas se faire. Le gouvernement français ferait valoir qu’il ne faut pas oublier le retrait américain de l’accord sur le climat, qui pourrait entrer en ligne de compte dans un accord global. Les autorités allemandes privilégiant de leur côté l’abandon de la taxation américaine de leurs production d’aluminium et d’acier…
Le destin des fissures n’est-il pas de s’élargir ? L’Europe peut-elle avoir comme seule perspective de vivoter au gré de compromis obtenus à l’arraché, en attendant qu’une nouvelle crise vienne tout balayer ? Désormais, c’est la seule vision de disponible.