Billet invité.
En ouverture du sommet de la zone euro consacré à son avenir de cette fin de semaine, l’Eurogroupe n’étant pas en position de produire un contre-document à celui de la Commission, c’est par le biais d’une fuite au journal économique allemand Handelsblatt qu’il a fait connaitre sa position. Disons-le tout de suite, plus restrictive il n’y a pas !
De toutes celles qui circulent, deux dispositions surnagent uniquement : l’assurance européenne des dépôts bancaires, qui viendrait boucler le programme de l’Union bancaire, et la capacité accrue du Mécanisme européen de stabilité (MES) d’interférer dans la politique budgétaire des États membres. Pas question de créer un poste de ministre européen des finances. Pas question non plus d’utiliser le terme monétaire pour rebaptiser le MES, ce type de référence étant réservée exclusivement à la BCE en charge de la politique du même nom.
Enregistrant l’absence de consensus en son sein à propos du projet de budget européen – s’il est ou non nécessaire ou utile, quel serait son rôle et sa dimension – l’Eurogroupe a mis en place un groupe de travail à haut niveau afin de poursuivre les débats. Le signe qui en règle générale annonce un enterrement de première classe.
Il y en a pour tout le monde. Les ministres de l’Eurogroupe, selon cette fuite organisée, rejettent la transformation du MES d’organisme inter-gouvernemental en institution de la Commission, que celle-ci défend, ce qui amoindrirait leur pouvoir. Par contre, le MES verrait son rôle grandir au détriment de cette dernière, s’agissant du suivi budgétaire des pays financièrement soutenus.
C’est un gros pavé dans la mare, cadeau de départ de Jeroen Dijsselbloem et d’arrivée de son successeur Mário Centeno, dont les mains sont liées avant qu’il ne prenne ses fonctions. Donald Tusk y trouve son compte, qui privilégie l’adoption du troisième et dernier pilier de l’Union bancaire, et le futur gouvernement allemand, quand il verra le jour et que son ministre soit membre du SPD ou de la CDU selon la formule qui surnagera, devra avaler cette couleuvre. Mais, pour le reste, Wolfgang Schäuble qui avait pris les devants y trouvera son compte. Emmanuel Macron non. La fameuse raffarinade (*) « Notre route est droite, mais la pente est forte » pourrait lui être attribuée.
Habitué à jouer un rôle de premier plan, l’Eurogroupe tente de dessiner les contours d’un compromis inter-gouvernemental et privilégie en conséquence les pesanteurs. Le président français peut-il vraiment attendre de Martin Schulz qu’il fasse décoller un projet imposant aux dirigeants allemands de faire volte-face au prétexte du respect des traités ? Cela n’en prend toujours pas le chemin.
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(*) La collection de platitudes de Jean-Pierre Raffarin, ancien premier ministre français.