LE MODÈLE DE LA FUTURE PREMIÈRE PUISSANCE MONDIALE, par François Leclerc

Billet invité.

La Grande Muraille électronique de Chine est une figure imposée pour rendre compte de l’isolement des internautes chinois dont l’accès à de très nombreux médias et aux réseaux sociaux occidentaux est interdit. Mais on s’en tient trop souvent à cet unique dénonciation, qui reste d’ailleurs sans effet.

Certes, l’interdiction chinoise de la vente des Virtual Private Networks (VPN), à laquelle Apple vient d’obtempérer au nom du réalisme économique, renforce cette politique. Elle rend encore plus difficile le contournement du contrôle instauré sur Internet, car cette technologie est de moins en moins accessible et son emploi soumis à autorisation est dispendieux. Avec une débauche de moyens financiers et humains, le régime chinois parvient progressivement à ses fins.

Deux grandes atteintes à Internet étaient redoutées, le contrôle par un État d’internet, ou l’instauration pro business d’un service à deux vitesses. Le premier est en train d’être finalisé en Chine et la seconde, stoppée une première fois, est à nouveau relancée aux Etats-Unis. Les approches sont différentes, mais elles ont en commun de restreindre un espace de liberté et de gratuité – pour le meilleur et pour le pire – qui était présenté comme irréversible.

Deux autres angles d’observation peuvent être choisis pour saisir ce qui est en marche en Chine et dont la portée dépasse ses frontières. L’essor de puissants services spécifiquement chinois, à l’abri de toute concurrence sur leur gigantesque marché intérieur, qui ont dans un premier temps fait obstacle aux GAFA, contrairement à l’Europe. Ou bien la mise en place d’un instrument de traçabilité et de contrôle social, selon le concept original du « crédit social », le mélange du classique crédit financier et d’un certificat de bonne conduite édicté selon les normes du Parti-État.

La constitution de gigantesques bases de données qui est en cours est le socle nécessaire aux progrès en Intelligence Artificielle, qui doivent en découler. Afin d’accéder au rang de première puissance mondiale – ce qui n’est qu’une question de temps – la Chine se prépare activement des relais de croissance qui s’appuient sur les nouvelles technologies. Nous connaissons les GAFA, les internautes chinois ont à faire à Alibaba, Baidu et Tacent… en attendant ce qui se prépare.

La configuration de la Chine de demain, dont l’influence mondiale est appelée à croitre, est parfaitement discernable. Son modèle associe la domination d’un Parti-État s’appuyant sur une forte puissance militaire et le déploiement d’un système sophistiqué de contrôle social utilisant le fin du fin des nouvelles technologies et destiné à assurer sa pérennité.

Avec l’avènement dès 2100 d’une Afrique qui fera démographiquement jeu égal avec l’Asie, où se préparent des désastres dans tous les domaines, dont l’exode des réfugiés vers l’Europe ne donne qu’un avant-goût, l’avènement du modèle chinois est un autre grand sujet de réflexion… Quelle réponse y apporter en Europe, si elle peut se dégager ?

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Deux rappels sur la Chine, ici et .