LE DÉMANTÈLEMENT SOURNOIS DE L’EUROPE, par François Leclerc

Billet invité.

Les promesses présidentielles américaines enlisées, les investisseurs ont changé leur fusil d’épaule et reviennent en Europe. Car tout est relatif dans un monde où il faut sans cesse trouver un point de chute à des capitaux dont le volume continue de croître ! À croire que ce n’est pas la fameuse diminution du taux de profit décelée par Marx qui étrangle le capitalisme, mais la noyade dans un trop plein de liquidités qui le menace !

L’euro remonte par rapport au dollar et les analystes s’interrogent sur l’impact négatif que cela pourrait avoir sur les exportations et la croissance. Quand bien même cela résulte d’un dollar faible plus que d’un euro fort. Et l’on voit réapparaître des commentaires souhaitant que la BCE en fasse plus pour l’impulser en Europe ! Car il ne viendrait à personne l’idée d’escompter une modification de sa politique, Emmanuel Macron ayant déjà perdu son statut de chevalier blanc en raison du brutal décrochage de la confiance en lui enregistré dans l’opinion publique.

Question confiance, les investisseurs préfèrent la manifester envers la BCE, qui est toujours prête à répondre à leur appel. Mais son intervention qui renforce l’euro n’est pas sans effets secondaires perturbateurs. L’économie allemande absorbe l’euro fort bien mieux que l’italienne, ce qui accentue encore les disparités au sein de la zone euro, ce puissant facteur de démantèlement. La première réalise un tiers de ses exportations au sein de la zone euro et la seconde est davantage tournée vers l’extérieur de celle-ci, en particulier vers les États-Unis. Et il n’est opposé à cette force centrifuge que des velléités de mesures aux effets hypothétiques et lointains.

Le démantèlement de l’Europe se poursuit sournoisement. Le Brexit ayant quitté le haut de l’affiche, la crise des réfugiés a pris sa succession pour l’exprimer à sa manière. Nous rappelant que l’une des composantes du vote en faveur du Brexit a été l’opposition à la circulation sans entraves de la main d’œuvre en raison du chômage.

La dimension morale que cette dernière crise a atteint est la pire car elle est auto-destructrice. La démission à laquelle nous assistons entraine sur une pente glissante à laquelle il est difficile de résister. L’épisode en cours se joue dans les pays de l’Est, le prochain en Italie.