Billet invité.
Constatant que les négociations avec la Grèce piétinent, le commissaire Pierre Moscovici a annoncé que « des réunions intensives » avaient lieu, ajoutant qu’il allait payer de sa personne : « moi-même, je me rendrai à Athènes mercredi… ». Et il en donne la raison : « nous sommes en train, après des années de crise, de construire ce que j’appelle une success story, où des réformes réussies permettent le retour à la croissance, à l’investissement, à la confiance. Il est vital de continuer ».
Il faut espérer que les malencontreuses références du commissaire ont dépassé sa pensée, à moins qu’elles reflètent ce qu’à Bruxelles on retient du désastre auquel la Commission a apporté sa contribution. Soucieux d’enjoliver une situation qui ne s’y prête guère, car il est fortement question, peut-on rappeler, de diminuer le seuil d’imposition et de baisser des retraites qui sont souvent l’unique revenu de familles entières.
Bertrand Cazeneuve était lundi à Berlin pour exprimer « la solidarité très forte entre Paris et Berlin ». Plus que jamais, « elle est nécessaire alors que certains agitent le spectre d’une désunion de l’Europe, que la donne internationale évolue et que nous faisons face ensemble à des défis globaux majeurs ». Effectivement, cela s’imposait, et l’a conduit à évoquer, pour plus de précision, « la situation sécuritaire résultant du terrorisme qui frappe nos pays », « le défi migratoire » et les « défis environnementaux et politiques ». La crise sociale a disparue.
Jamais à court d’une envolée, le premier ministre a affirmé que « notre responsabilité commune, c’est surtout d’apporter des réponses très concrètes à ceux qui peuvent douter de la valeur ajoutée de l’Europe, de fournir des preuves tangibles de ce que nous sommes capables de faire ensemble ». Où va-t-il chercher tout cela, dont on attend la concrétisation en bouillant d’impatience ? L’un parle de « success story », l’autre de « valeur ajoutée », on peut dire qu’ils savent trouver le vocabulaire de circonstance…
François Villeroy de Galhau, le gouverneur de la Banque de France, ne craint pas d’aller dans le concret pour illustrer cette valeur ajoutée. Sans l’euro, le financement de la dette publique française coûterait plus de 30 milliards d’euros d’intérêts supplémentaires par an, fait-il valoir, rappelant que ce montant représente « l’équivalent du budget annuel de Défense de la France, ce budget que l’on veut renforcer. » La conclusion s’impose à ses yeux: « l’euro, c’est une forme de protection ». Présentez, armes !
Avec de tels défenseurs, le « populisme » a de beaux jours devant lui.