L'ITALIE ET LA GRÈCE, DÉVERSOIRS DE L’EUROPE, par François Leclerc

Billet invité.

Soucieuse de préserver les dernières économies des réfugiés, qui ont souvent vendu tous leurs biens pour fuir la guerre, Angela Merkel a déclaré dans son allocution hebdomadaire en Allemagne « nous ne pouvons pas accepter que des gens payent beaucoup d’argent pour risquer leur vie ! ». Comme c’est bien dit.

Afin de justifier les accords avec la Turquie ayant abouti à la fermeture de ses frontières maritimes avec la Grèce, la chancelière ne manque plus une occasion de donner des gages aux partisans du rejet des réfugiés depuis qu’elle a été intronisée candidate de son parti aux élections de l’automne prochain. Les temps changent.

En application de cet accord, l’exode des réfugiés a été interrompu par le bouclage de la frontière maritime de la Turquie. Seuls 92 d’entre eux parviennent en moyenne à quotidiennement déjouer la surveillance et à rejoindre les îles grecques, selon les chiffres de la Commission. À comparer avec les milliers d’avant. Depuis mars, cela représente tout de même près de 20.000 réfugiés.

L’autre volet de l’accord qui consiste à renvoyer en Turquie les réfugiés pour que soit admis et réparti dans les pays de l’espace Schengen un nombre équivalent de réfugiés sélectionnés est très loin d’aussi bien fonctionner. Depuis mars, 1.187 réfugiés jugés comme ne pouvant pas bénéficier du droit d’asile ont été reconduits des îles grecques vers la Turquie, tandis que 2.761 réfugiés syriens venant de Turquie ont été installés dans des pays européens. Le nombre de ceux qui sont bloqués en Grèce continue d’augmenter.

Dans l’incapacité d’obtenir l’application des accords de répartition des réfugiés au sein de l’espace Schengen, et encore moins d’avancer sur la réforme de sa réglementation, la Commission a néanmoins décidé de rétablir son « fonctionnement normal ». Tous les pays membres seront donc autorisés, à partir du 15 mars prochain, à renvoyer vers la Grèce les réfugiés ayant pénétré via celle-ci dans l’espace Schengen.

Sous les auspices des plus hautes autorités européennes qui se refusent à prendre leurs responsabilités, la Grèce est avec l’Italie destinée à accueillir les réfugiés recalés pour qu’une Europe traversée par des courants xénophobes en soit prémunie. C’est la seule relance de triste mémoire dont elles peuvent se prévaloir.