Billet invité.
Préserver la liquidité (1) des marchés financiers – l’une de leurs principales qualités – est l’un des arguments traditionnellement opposé lorsque les régulateurs manifestent de mauvaises intentions. Cela a été notamment le cas quand il a fallu défendre bec et ongles la tenue de marché par les banques (2).
Mais la liquidité connait crise sur crise au sein du monde financier, où elles restent largement inexpliquées. Et les méfaits du trading à haute fréquence, à chaque fois invoqués, ne peuvent à eux seuls les expliquer. Cela a été le cas le 7 octobre dernier, lorsque la livre sterling a dévissé de 8,9% en moins de dix minutes, et qu’un flash crack a été incriminé. Le souvenir du 15 octobre 2014 s’est tout de suite imposé, lorsque le T-note, l’obligation à dix ans de l’État américain, s’était écroulé.
Pour la livre sterling, le trading à haute fréquence et les dispositions réglementaires qui empêchent désormais les banques de jouer un rôle de teneur de marché ont été à l’habitude mis en cause, mais un grand flou a de nouveau subsisté sur les causes du plongeon enregistré. Une enquête est en cours, mais il faut se rendre à l’évidence, la liquidité connait désormais de brutales sautes d’humeur énigmatiques. Depuis 2010, les pannes se sont multipliées et ont touché quasiment toutes les classes d’actifs, y compris les devises, dont le marché – le Forex – est pourtant extrêmement liquide. Pire, il semble pouvoir être constaté une baisse tendancielle de la liquidité, très préoccupante pour les financiers si elle devait encore prendre de l’ampleur.
Sans doute faut-il la corréler avec l’interconnexion renforcée des marchés et la globalisation accrue des activités financières ? Cela ne serait pas bon signe, si cela devait être le cas, car faute d’expliquer les crises de liquidité les régulateurs resteraient démunis pour les empêcher. Et il en découlerait une instabilité permanente du système financier, une crise pouvant survenir à tout moment et dans n’importe quel secteur.
L’équilibre de la masse des actifs financiers repose sur le flux continu de leurs transactions et, lorsque le gel de ces dernières intervient, des défaillances non maitrisables de contrepartie pourraient en résulter…
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(1) Un marché est liquide lorsqu’il permet d’acheter ou de vendre rapidement les actifs qui y sont côtés sans effet majeur sur leurs prix.
(2) Un établissement agréé intervient sur les marchés financiers pour son propre compte et prend l’engagement de fournir une cotation continue et assure à ce titre la liquidité. Il se rémunère par la différence entre son prix d’achat et de vente.