Billet invité.
Les grandes banques centrales vont-elles trouver la marche arrière afin de redonner à leur bilan sa minceur d’avant et revenir à leurs taux précédents ? Pour le moins, la route n’est pas toute tracée. La Fed, qui l’a prudemment enclenché, fait depuis face à un tir de barrage sur le thème qu’elle a mal estimé les effets de sa hausse d’un quart de point de son principal taux directeur, qui reste néanmoins presque collé à zéro.
La question qui prime reste cependant la croissance, pour laquelle les danses de la pluie se poursuivent. Tandis que se répandent les interrogations sur la venue d’un monde où prévaudrait une « stagnation séculaire » – la croissance ne revenant pas – qui reposerait sur le triptyque baisse de la consommation – endettement des particuliers – montée des inégalités.
Les banques centrales font de leur côté face à un bilan mitigé : si elles ont jusqu’à maintenant écarté le piège d’une récession globale, elles ne sont pas parvenues à contrer efficacement la pression déflationniste. Le mal qu’elles combattent est chronique, et il faut décidément vivre avec. Par ailleurs, la déflation salariale implique l’accroissement de l’endettement global afin de maintenir à niveau l’activité économique, créant les conditions de la persistance de taux bas pour la dette.
Par ajouts successifs se dessinent les caractéristiques de la période à venir : elle a tout de la fuite en avant, car l’édifice financier en ressort de plus en plus fragilisé, l’endettement accru reposant sur une croissance future qui ne se présente pas. La machine à fabriquer de la dette est la seule qui continue de fonctionner comme avant, à la différence que toute réduction de celle-ci est désormais prohibée car aux effets trop dangereux pour un système financier à l’instabilité accrue.
Les banques centrales n’en ont jamais fait mystère, elles ne peuvent pas tout faire, même en élargissant leurs missions comme elles n’y ont pas manqué. La Fed s’inquiète aujourd’hui des effets de ses mesures hors des États-Unis, on aura tout vu ! Alors, pourront-elles demain défaire ce qu’elles ont fait en revenant sur leurs mesures d’assouplissement monétaire ? Si la Fed et la Banque d’Angleterre ont cessé d’acheter des titres obligataires, la BCE est loin d’écarter cette éventualité, et la Banque du Japon qui en est déjà gavée pourrait devoir à nouveau s’y résoudre. Les deux premières se contentent d’attendre que les titres qu’elles détiennent arrivent à maturité, sans les remplacer, mais il a été calculé que cela interviendra dans le cas de la Banque d’Angleterre… en 2068 pour les derniers. On aurait donc affaire à une fort lente extinction !
A la description pleine d’embûches de la période à venir, il faut ajouter la persistance d’une politique monétaire qui n’a plus de non conventionnelle que le nom. Heureusement, les dogmes ont eux la vie dure.