Billet invité.
Par réaction en chaîne, la Macédoine et la Serbie ont suivi la Slovénie et fermé à leur tour leurs frontières aux réfugiés qui ne sont ni Afghans, ni Irakiens, ni Syriens : le risque est trop grand d’en hériter sur son territoire sans savoir qu’en faire. Par voie de conséquence, près de 2.000 d’entre eux – Algériens, Bangladeshis, Iraniens, Marocains, Pakistanais ou Somaliens – se sont retrouvés bloqués en Grèce et ont empêché dans un premier temps de progresser ceux qui étaient admis à emprunter la Route des Balkans. Le HCR a dénoncé ces restrictions qui créent une situation de plus en plus « intenable » pour les réfugiés.
Les recalés ont scandé en anglais « nous ne sommes pas des terroristes ! » et déployé une banderole sur laquelle était écrit « nous sommes désolés pour la France, mais nous ne sommes pas dangereux ». Ioannis Mouzalas, le ministre grec à la politique migratoire, a confirmé que la frontière allait rester fermée pour eux et que le gouvernement avait un plan pour les répartir dans la région, « dans un premier temps » qui risque de durer. D’autres vont immanquablement arriver.
Sur les 7.000 réfugiés arrivant quotidiennement en moyenne sur les îles grecques, a-t-il été précisé de source grecque, 70% d’entre eux sont des Syriens et des Irakiens. Le pays s’apprête à jouer le rôle de zone-tampon, mais il ne diminuera que d’un tiers le flux des réfugiés qui se rendent en Allemagne. Ils seront de 800.000 à un million à avoir atteint l’Allemagne cette année, selon les prévisions des autorités du pays.
Il n’est pas certain que cela réponde parfaitement à l’exigence du patron de la CSU bavaroise, Horst Seehofer, qui a proclamé vendredi dernier du haut de la tribune de son parti, Angela Merkel à ses côtés : « au nom des intérêts nationaux, nous voulons du contrôle, nous voulons de l’ordre, mais nous voulons aussi une limite ». Réaffirmant sa politique en dépit des critiques, celle-ci a maintenu sa volonté de parvenir à « une solution internationale et européenne » en refusant « tout plafond national fixé unilatéralement ». Deux négociations doivent être selon elle menées, avec la Turquie afin de ne permettre l’entrée en Grèce qu’à un contingent de réfugiés, et avec les États européens afin qu’ils soient répartis selon un système de quotas.
Deux des acteurs de la tuerie parisienne avaient transité par la Grèce en se mêlant à l’exode des réfugiés, a-t-il été établi grâce à leur enregistrement. Mais les responsables de celui-ci, en première ligne dans les îles, demandent comment ils pourraient détecter les fanatiques qui profitent de l’occasion pour entrer en Europe, étant donné les conditions concrètes de leur enregistrement.
Il n’empêche, toutes les mesures restrictives concernant les réfugiés ont désormais le vent en poupe, leur caractère symbolique l’emportant sur leur efficacité pratique. Seule fausse note, quelques centaines de manifestants, qui n’ont pu en être empêchés, ont hier bravé à Paris l’État d’urgence et l’interdiction de manifester pour témoigner de leur solidarité avec eux.
Confirmant les informations faisant état de la souplesse de la Commission, le ministre des finances autrichien a confirmé que les dépenses liées aux réfugiés pourront être déduites du calcul du déficit budgétaire, en accord avec elle. Cela représente un milliard d’euros pour l’année en cours, selon lui. L’annonce a été l’occasion de connaitre les prévisions autrichiennes concernant la poursuite l’exode en 2016, estimant à 95.000 les demandes d’asile pour 2015, le ministre en prévoit de 100.000 à 130.000 l’année prochaine.
La Grèce, pour laquelle la charge sera très lourde, ne sera qu’un tampon très imparfait tant que la Turquie ne contrôlera pas ses frontières maritimes avec elle. S’il est réalisé, cet objectif ralentira l’exode mais rendra les traversées plus périlleuses et dangereuses.