Billet invité.
François Hollande a pris hier en grandes pompes un virage sécuritaire qu’il justifie par l’état de guerre dans lequel la France se trouverait du fait des tueries selon lui. Les propos sont martiaux mais les mesures annoncées de portée relative, vu la nature du combat à mener. Qu’apporte en effet l’instauration de l’état d’urgence au combat pour contrer le fanatisme de Daech ? Quel peut être l’effet du rétablissement des contrôles aux frontières ?
La réaction du président de la République se veut à la mesure du sentiment d’insécurité qu’a créé la tuerie, alors que se manifeste simultanément un profond refus de se situer sur le terrain de l’adversaire, de s’inscrire dans sa logique destructive, en affirmant la vie pour s’opposer aux idolâtres de la mort. De ce point de vue, il a fait un choix à rebours de ceux qui ont été visés, tout en s’en réclamant.
Comment ne pas s’interroger sur ses motivations et sur le tournant qu’il fait prendre à son quinquennat ? En se situant sur le terrain sécuritaire et en endossant de nouveaux habits – après de nombreux essayages insatisfaisants – François Hollande joue aujourd’hui sa réélection et marque un point. Pour faire bonne mesure, il ne se contente pas d’adopter une nouvelle posture et envoie un autre signal en se donnant des marges de manœuvre vis à vis du pacte de stabilité que Bruxelles par ailleurs vient d’accorder à ceux qui financent l’exode des réfugiés.
Les dirigeants politiques européens ont manifesté leur impuissance au fil des crises qui se succèdent, incapables d’assumer l’exode des réfugiés de la guerre lors du précédent épisode, et François Hollande se raccroche au symbolisme guerrier sans plus de garantie de réussite. Il écrit à sa manière un nouveau chapitre de la société de contrôle dans laquelle nous continuons de pénétrer à pas de loup. Lorsque l’on est en guerre, tout devient admissible et l’État de droit dont il proclame le respect risque vite d’être écorné. Aux États-Unis, des voix se sont élevées sans tarder, côté CIA et FBI, pour à nouveau réclamer la création de backdoors par les éditeurs de logiciels, afin de déjouer le cryptage que ceux-ci mettent progressivement en place après les révélations sur la surveillance de masse de la NSA.