Billet invité.
Le défaut de la Grèce sur son remboursement de demain au FMI est consommé, et le prochain rendez-vous financier est désormais fixé au 20 juillet. À cette nouvelle date butoir, la BCE pourra couper les liquidités d’urgence si ses titres grecs arrivés à maturité ne sont pas honorés, créant une réaction en chaîne très difficile à stopper. Mais la messe n’est pas encore dite.
Pierre Moscovici, a estimé qu’il existait encore « des marges pour la négociation » et annoncé de nouvelles « propositions » de Bruxelles, la porte-parole de Jean-Claude Juncker démentant ensuite une telle annonce… Michel Sapin a déclaré que les négociations pouvaient reprendre à tout moment, ajoutant « nous sommes bien placés pour être les acteurs de la reprise du dialogue », après avoir fait valoir que « la France a eu une attitude singulière d’être toujours à la recherche du dialogue ». Luis de Guindos, le ministre espagnol des finances et candidat à la succession de Jeroen Dijsselbloem à la tête de l’Eurogroupe, n’a pas exclu de son côté « un accord d’ici à l’échéance, c’est-à-dire à minuit mardi ».
De son côté, Alexis Tsipras a fait appel à l’échelon supérieur des chefs d’État et de gouvernement de la décision de l’Eurogroupe – qu’ils n’ont cessé de présenter comme l’étage des discussions « techniques » – afin que soit accordée la prolongation du plan de sauvetage qui a été refusée. Une telle décision couperait l’herbe sous le pied à la campagne lancée en Grèce par les partis d’opposition qui présentent la consultation comme devant décider du maintien ou de la sortie de la Grèce de l’euro. Un refus conforterait la dénonciation du déni démocratique dont Syriza fait état. La situation sera rocambolesque si le « oui » l’emporte néanmoins, le gouvernement grec s’étant engagé à respecter le résultat du référendum et à signer l’accord qui en fait l’objet, puisqu’il ne serait plus valable faute de la prolongation en question…
À combien de coups de théâtre allons-nous encore assister d’ici dimanche ? Dans l’immédiat, les banques ont été fermées sur ordre de la Banque de Grèce, mais les Grecs peuvent retirer 60 euros par jour aux distributeurs automatiques et les touristes détenteurs de cartes de débit ou de crédit émises à l’étranger ne sont soumis à aucune limitation.
Au plan politique, les spéculations ne manquent pas dans le cas d’une victoire du « oui ». Un remaniement gouvernemental a été évoqué par Yanis Varoufakis lors de son dernier Eurogroupe, une solution préférée à la démission du gouvernement. Des élections pourraient certes être aussi provoquées par la démission du Président de la République, mais le risque d’une nouvelle victoire de Syriza pourrait-il être écarté ? Et combien de temps la formule classique d’un gouvernement de « techniciens » pourrait-elle sinon tenir ? La situation est loin d’être stabilisée, car il ne suffit pas d’obtenir au forceps un accord, un gouvernement chargé de l’appliquer est également nécessaire.
Sur les marchés, les cours des actions et des obligations se sont comme prévu fortement tendus, en attendant la suite. Du côté américain, le secrétaire d’État au Trésor Jack Lew a réitéré l’urgence de trouver « une solution, incluant une discussion sur un allégement de la dette », tandis que l’éditorial du Financial Times – qui traditionnellement exprime le point de vue de la City – critique durement les créanciers pour avoir « oublié leur promesse antérieure d’une très nécessaire réévaluation de la dette grecque, en dépit de la demande pressante du FMI ».
En déclarant ce matin que la France est « disponible, toujours disponible pour qu’aujourd’hui, le dialogue puisse reprendre », François Hollande fait le service minimum et tente de prendre ses distances avec la suite des évènements. En présentant le référendum comme donnant aux Grecs le choix de rester ou non dans la zone euro et en éludant son objet, il n’ouvre pratiquement aucune porte.