Grèce : LA MISANTHROPIE DE NOS PLUS HAUTES AUTORITÉS, par François Leclerc

Billet invité.

L’histoire est toujours écrite par les vainqueurs, ce triste poncif va-t-il à nouveau se vérifier ? A en croire celle qui déjà se dessine, le gouvernement grec porterait l’entière responsabilité du retournement de situation d’hier, pour avoir refusé l’accord que proposait Jean-Claude Juncker en fin de semaine dernière.

Reprenant la fable d’une opposition interne à Syriza l’ayant emporté, cette version tordue des faits exonérerait les dirigeants européens de toute responsabilité, escamotant les conditions impossibles mises à cet accord. Le gouvernement grec avait toute latitude, nous est-il conté, de proposer d’autres mesures que celles qu’il refusait, à condition d’avoir des effets budgétaires identiques, mais lesquelles, faute de disposer de la pierre philosophale ?

Ce n’était pas les moyens qu’il fallait changer, mais les objectifs, comme Alexis Tsipras a tenté de le faire en cherchant à négocier à la baisse la prévision d’excédent budgétaire. Ainsi qu’en acceptant une prolongation du plan de sauvetage dans des conditions permettant une relance de la machine économique ainsi que le financement de mesures sociales, afin de rendre viable – c’est son mot – l’équation à résoudre.

Celle que les dirigeants européens voulaient voir résolue par les Grecs était injouable, et annonçait qu’une autre équation du même tabac allait être posée. Mais ces fauteurs de trouble n’ont pas joué le jeu en ne voulant pas faire semblant, comme tout le monde. Depuis le début de ce long affrontement, c’est d’ailleurs ce qui leur a été reproché : ne pas être comme tout le monde, c’est à dire comme eux ! L’intransigeance des négociateurs européens découlait, comme le FMI l’a clairement fait savoir, d’une crispation centrale : leur refus d’admettre qu’une autre équation était sans solution, sauf à entreprendre une restructuration de la dette beaucoup trop dangereuse politiquement. Il fallait donc à tout prix que les Grecs remboursent les banques européennes de leurs folies, via la fiction de plans de sauvetages destinés à masquer leur sauvetage initial.

« Le gouvernement ne signera pas des accords inconsistants et empreints de misanthropie » a déclaré Yanis Varoufakis. L’histoire qui est en train de s’écrire est donc celle d’une supercherie. Mais elle ne s’arrêtera pas là, la dette n’est pas passée par ici, elle passera par là ! Membre de l’Union européenne, la Grèce s’enfonce dans la crise sociale : ce succès-là, il va falloir maintenant l’assumer. Solution proposée à nos édiles, afin de sauver la face : en faire une gigantesque zone d’accueil des émigrés du Moyen-Orient pour l’Europe et y convoyer une aide alimentaire massive. D’une pierre, deux coups !