Billet invité.
Quel accord Alexis Tsipras peut-il encore espérer arracher à Angela Merkel, François Hollande, Mario Draghi et Jean-Claude Juncker, qu’il va rencontrer ensemble en profitant du sommet européen de fin de semaine ? Pas grand chose si l’on en croit le directeur général de la direction des affaires économiques et financières de la Commission, Declan Costello, qui depuis Athènes où il est en mission a opposé son veto à l’adoption par le Parlement grec de la loi portant sur les mesures d’aide humanitaire, ainsi qu’a celle qui permettrait le paiement échelonné des retards fiscaux. Toutes les deux représentant selon lui une rupture des engagements pris le 20 février dernier, qui impliquent l’adoption globale d’un paquet de mesures restant en cours d’étude. L’intention du gouvernement d’utiliser les recettes des privatisations afin de financer la politique sociale ainsi que la sécurité sociale – et non la réduction de la dette – est promise à connaître le même sort. Les préoccupations sociales du gouvernement grec ne sont pas en phase avec les exigences des autorités européennes qui maintiennent leur tutelle.
Le vrai visage de la politique qui est poursuivie en Grèce ne peut plus être dissimulé. D’Allemagne continue de souffler un vent mauvais associant les incessantes campagnes de presse à scandale aux interventions réitérées des responsables du parti d’Angela Merkel, la CDU, où le discours intransigeant de Wolfgang Schäuble fait mouche. Toute tentative de compromis y est ouvertement décrite comme favorisant la contagion des idées subversives de Syriza dans toute l’Europe. Cette politique aura un prix que ces fanatiques n’appréhendent même pas, si elle déclenche une sortie de la Grèce de l’euro, non seulement en raison du défaut majeur sur la dette qui inévitablement l’accompagnera, mais aussi en raison de la dette de 91 milliards d’euros de la Banque centrale grec au sein de l’Eurosystème… Sans doute y verront-ils alors non pas la sanction de leur aveuglement mais une justification supplémentaire à l’acccentuation de la rigueur.
Mais les raisonnements économiques et les considérations financières n’ont pas leur place dans ce qui est devenu un délire politique ultra-conservateur, mettant en perspective le choix de François Hollande de faire cause commune avec Angela Merkel pour mieux obtenir des concessions. Les yeux de nos édiles européens étaient rivés sur l’Espagne, mais ils vont devoir se diriger vers la France où les fruits de cette politique vont être récoltés.
En Allemagne, des voix se font entendre du côté de la gauche du SPD, des Verts et de Die Linke, mais elles n’ont aucune chance d’être entendues. Exprimant un sérieux malaise, elles ont choisi comme terrain celui des réparations allemandes datant de la seconde guerre mondiale dont le gouvernement grec réclame le paiement. Contrairement à ce que prétendent les autorités allemandes, le dossier pourrait selon elles être recevable, ne pouvant être considéré comme fermé pour des raisons à la fois morales et légales.
En guise d’audace, les dirigeants européens vont chercher à se prévaloir de celle qu’ils attribuent déjà à la BCE, aidée par la baisse conjoncturelle du pétrole, avec pour résultat des prévisions d’amélioration de la croissance de l’OCDE qui « représentent une chance pour la zone euro d’échapper à la stagnation », oubliant que cette dernière souligne également les risques liés à la poussée déflationniste générale – la déflation dans certains pays – ainsi qu’à la surchauffe financière. Quel cocktail !