Billet invité.
La bonne nouvelle n’a pas été appréciée à sa juste valeur : les émissions de dette des pays périphériques suscitent désormais l’intérêt des investisseurs. Certes, les taux sont encore élevés, mais l’abondance des liquidités est telle que toutes les occasions de les placer semblent bonnes à prendre. Mais dans ces conditions, doit-on se demander, le marché est-il encore ce Père Fouettard si redouté ? La sanction qui en est attendue, faute de filer doux, est-elle toujours aussi destinée à tomber ? Dans le cas contraire, une reconsidération du dogme des 3 % serait possible ! Voilà la vraie bonne nouvelle.
Mais, en attendant qu’elle soit reconnue, la charge de la dette (les intérêts dont elle est porteuse) pèse de tout son poids en Europe, plus particulièrement sur l’Espagne, la Grèce, l’Irlande, l’Italie et le Portugal. À force d’excédents budgétaires primaires limités et de faibles perspectives de croissance, une très longue période sera nécessaire afin de diminuer cette charge en se désendettant progressivement, même si la baisse des taux y contribue au fur et à mesure de son refinancement. Des ressources importantes devront y être consacrées, au détriment d’autres affectations : l’investissement productif ou la protection sociale.
Ces pays sont donc condamnés à poursuivre une politique d’austérité permanente, sans espoir d’en sortir faute de moyens de relance économique et de la possibilité de restructurer leur dette. Deux questions qui restent sans réponse, la première parce que la croissance n’est imaginée que sur le modèle de celle d’avant, la seconde parce qu’elle est tout simplement un interdit (et on ne sait d’ailleurs pas pourquoi). Pourra-t-on éternellement les ignorer ?
Quand on enregistre l’accueil et l’intérêt réservé aux États-Unis au livre de Thomas Piketty et à la problématique de l’inégalité – si centrale et ici si négligée – et que l’on lit dans la presse anglo-saxonne des articles élogieux à son égard, on mesure mieux la vacuité de la vulgate économique qui nous est ânonnée.