Billet invité.
La vérité sort de la bouche des chroniqueurs financiers, quand ils s’en donnent la peine ! Un article de l’AGEFI hebdo, qui traite de « tous les métiers de la finance », éclaire sous un jour détaillé nouveau la situation des banques européennes, au cœur et non plus à la périphérie de l’Europe : celui de la création des bad banks, ces structures de défaisances où les banques parquent leurs actifs toxiques, à moins qu’elles n’utilisent des formules plus discrètes.
C’est en Autriche, où trois banques sont déjà contrôlées à 100% par l’État et une quatrième à 43%, qu’émerge une affaire de taille, car les trois grandes banques privées du pays – Erste Bank, Raiffeisen et Unicredit Bank Austria – refusent la création d’une bad bank privée dont elles détiendraient 51% des parts, faute d’obtenir la suppression de la taxe nationale sur les banques, destinée à alimenter un fonds de garantie mais qui est versée au budget de l’État. Sauf à accepter une faillite de Hypo Group Alpe Adria (HGAA), la plus mal en point de trois banques déjà nationalisées, la création d’une bad bank soutenue par l’État semble inévitable, d’autant que l’exposition des banques autrichiennes en Ukraine (7,8 milliards de dollars) ainsi qu’en Slovénie est importante.
Deux bad banks sont répertoriées en Espagne et en Irlande – la Sareb et la Nama – et la création d’une autre est officiellement à l’étude en Italie. Mais lorsque l’on gratte un peu, on trouve ici et là des structures discrètes internes aux banques ainsi que des silos externalisés d’actifs en attente de leur sort. Le gouvernement allemand a créé des agences chargées de la liquidation d’actifs à grande échelle, EEA (Erste Abwicklungsanstalt) et FMS Wertmanagement. La première a reçu en deux fois 200 milliards d’euros d’actifs toxiques, et est cautionnée par des associations de caisse d’épargne de Rhénanie et de Nord-Westphalie (un montage dont la solidité n’est pas garantie), la seconde est soutenue par le gouvernement fédéral. EEA est sensée être dissoute en 2027, ce qui laisse le temps de voir venir mais ne résout rien.
Quand elles ne sont pas évacuées en attendant des jours meilleurs, les pertes sont dissimulées. D’où l’importance des discussions sur la méthodologie de leur évaluation, cette méthode éprouvée qui permet de glisser les miettes sous le tapis. La presse grecque fait ainsi état d’un besoin de recapitalisation des banques du pays de 5 à 6 milliards d’euros, tandis que le FMI les chiffre à près de 20 milliards ! Tout le monde y met son grain de sel, les derniers en date étant le fonds BlackRock et Ernst&Young. Ces questions de méthodologie font bien entendu l’objet de négociations avec la Troïka. Afin de recapitaliser les banques grecques, 50 milliards d’euros ont déjà été octroyés par les créanciers de la Grèce, dont 40 ont été utilisées. Faut-il s’étonner que les besoins avoués soient inférieurs au solde disponible ?