Billet invité.
Enfourchant un thème que le Tea Party américain ne dédaignerait pas, Jean-François Copé, le président de l’UMP, associe l’impôt à un « moyen de punir » et les banques françaises croient le moment venu d’emporter le morceau en faisant donner Christian Noyer, le gouverneur de la Banque de France. « Je ne pense pas que cela ait été à un quelconque moment l’intention du gouvernement français de faire quelque chose qui déclencherait la destruction de pans entier de l’industrie financière française, provoquerait une délocalisation massive d’emplois et porterait atteinte globalement à la reprise », déclare-t-il au Financial Times à propos de la taxe sur les transactions financières qu’il propose de passer à la moulinette. Au gouvernement de passer en force au Parlement, où une partie de ses troupes ne le suit plus.
Si l’on respecte l’avis de ceux qui comptent, il n’en est pas de même de ceux qui se comptent. Les indignés du mouvement « Que se lixe a Troïka ! » (que la troïka aille se faire voir) avaient lancé samedi dernier une nouvelle mobilisation dans toutes les grandes villes portugaises, mais ils n’ont pas réédité leurs exploits passés. Que ce soit au Portugal, en Espagne et en Grèce, la contestation ne se dément pas, mais elle ne suscite plus les élans initiaux faute d’être entendue, face à l’inéluctabilité de nouvelles mesures d’austérité contre lesquelles lutter ne sert à rien. Même lorsque leurs rangs sont étoffés par les policiers et les militaires, faisant symbole au Portugal, mais sans plus.
Samedi, le président du Conseil italien Enrico Letta dénonçait « les populismes » en les qualifiant « d’acharnés » face à un aréopage distingué réuni à la Sorbonne, à six mois des élections européennes de mai prochain. « C’est le manque d’Europe la cause de la crise, ce n’est pas l’Europe » a-t-il cru bon de formuler, donnant le ton de la campagne à venir et démontrant sa profonde compréhension des événements. A observer le résultat des élections législatives tchèques, qui se tenaient également ce week-end, une légère erreur de calcul est à craindre.
La percée inattendue du parti ANO, qui a fait campagne contre les partis politiques traditionnels « corrompus » – emmené par Andrej Babis, la deuxième fortune du pays – fait accéder celui-ci à la seconde place et le rend incontournable. ANO est l’acronyme en tchèque de « Action des citoyens insatisfaits ». La formation d’une coalition de gouvernement sous l’égide des sociaux-démocrates s’annonce complexe, ANO ne voulant pas s’impliquer, rappelant une autre situation bien connue d’Enrico Letta. La leçon a une autre portée : le précédent gouvernement tchèque était de centre droit, mais même l’alternance n’est plus une solution.