Billet invité.
C’est fait, soixante pauvres petits milliards d’euros du Mécanisme européen de stabilité (MES) seront dans environ un an disponibles pour renflouer le système bancaire, une fois le mécanisme de sa supervision en place ! A comparer avec les 1.000 milliards d’actifs douteux que, d’après « Les Échos », les banques possèdent dans leurs livres (selon KPMG, c’est 1.500 milliards d’euros) ! Cela ne permettra pas d’éponger une grosse dépréciation, pour le moins, même s’il est prévu que les États devront accompagner l’effort du MES (20% des besoins jusqu’à ce que le ratio de 4,5% de fonds propres soit atteint).
Au détour d’une phrase, le commissaire européen Olli Rehn a reconnu qu’il est dorénavant question de « diluer » et non plus de supprimer les risques résultant du croisement de l’endettement des banques et des États. Ce sera en l’occurrence un transfert dans l’immédiat, une fois de plus, et ce n’est que lors de l’étape suivante des « bails-in » que la dilution interviendra, quand un accord sera intervenu sur la manière d’y procéder. Il n’est donc toujours pas question de protéger les contribuables, le MES étant financé par les États. Sur la question délicate de la rétroactivité de l’aide du MES, un accord favorable de principe a été arraché pour être affiché, mais les décisions devront être prises au cas par cas, ce qui signifie que tout pratiquement reste à faire…
Une nouvelle opération d’évaluation des besoins de financement des banques allant être menée par l’Autorité bancaire européenne (EBA) et la BCE, que va bien pouvoir donner cette fois-ci son résultat, après deux vagues successives de stress tests complaisants ? Les dirigeants européens vont être pris entre deux impératifs contradictoires : faire le ménage dans le système bancaire aux frais des États, ou bien continuer de dissimuler l’essentiel des pertes, avec comme conséquence la poursuite de la crise du système bancaire et des restrictions du crédit.
Il serait toutefois tentant, pour les banques, d’obtenir qu’un dernier vigoureux coup de collier soit consenti par les États – en direct ou via le MES, où il ne pèse pas dans les déficits nationaux tant que les garanties accordées ne sont pas actionnées. Cela soulagerait d’autant l’implication des actionnaires et des créanciers à l’étape suivante. Les négociations battent leur plein à propos de cette dernière. Elles sont ardues en raison de la complexité et diversité de la structure des financements des banques. Faut-il protéger les les banques créancières entre elles via le marché interbancaire est l’une des questions soulevées, qui renvoie à l’une des caractéristiques du système bancaire européen fait de l’enchevêtrement des financements croisés de celles-ci ?
On n’a pas fini de ressentir les effets de l’échafaudage du financement européen de la dette : la construction incomplète de l’euro a bon dos.