Billet invité.
Au Portugal, le gouvernement de coalition de centre droit a signé peu après sa constitution, il y a deux ans, un plan de sauvetage avec la troïka (BCE, Union européenne, FMI). Aujourd’hui 83,5% des Portugais seraient favorables à une rupture ou une renégociation de ce plan, car ils constatent que son application n’a fait qu’aggraver la situation économique. Néanmoins, il faudra attendre le prochain rendez-vous électoral de 2015 – sauf coup de théâtre – pour qu’ils soient entendus. Avec comme seule perspective de remettre en selle l’équipe socialiste précédente, qui avait mené les négociations préalables à l’adoption du plan de sauvetage, et qui prône maintenant sa renégociation, sans plus de précisions.
Soumis à une très sévère politique d’austérité qui atteint durement des pans entiers de la population, les Portugais ont vu s’enchaîner en l’espace de deux ans les mesures gouvernementales de rigueur : restrictions budgétaires affectant non seulement les salaires mais également les retraites, diminution des remboursements de soins, augmentation de la TVA… Les dernières en date prévoient le report de l’âge de la retraite à taux plein de 65 à 66 ans, la suppression de 30.000 postes dans la fonction publique, assortie de l’augmentation de 35 à 40 heures du temps de travail.
Ils ont vu aussi monter un chômage massif (17,7% officiel) affectant plus particulièrement les jeunes arrivant sur le marché de l’emploi, dont la principale perspective est l’émigration. Selon l’hebdomadaire Expresso, 500.000 chômeurs seraient par ailleurs désormais sans allocations. Au premier trimestre de cette année, le PIB a reculé de 3,9% sur un an, la récession ayant débuté en 2011. La fin du plan de sauvetage du Portugal est prévue pour dans un an, en juin 2014. Mais en dépit de l’accalmie enregistrée sur le marché obligataire européen, les taux sont restés très élevés (5,669% à dix ans) à l’occasion d’une émission syndiquée test (placée par les banques) de 3 milliards d’euros.
Les principales banques portugaises font de leur côté part de leur inquiétude alors que se poursuivent à Bruxelles les discussions sur les principes de futurs bail-in, selon un schéma qui pourrait les concerner. Les créanciers et les déposants font preuve de nervosité, un important mouvement de location de coffres est enregistré au sein des banques simultanément aux retraits de déposants qui n’ont pas les moyens d’ouvrir un compte bancaire dans un autre pays.
Les Portugais expriment, sans être entendus, leur volonté, désemparés non seulement en raison de l’ampleur de la crise sociale mais également de l’absence de toute perspective d’amélioration. Pour tenter d’apporter une réponse, le président de la République, Anibal Cavaco Silva, va convoquer le Conseil d’État sur le thème « Les perspectives de l’économie portugaise pour la période de l’après-troïka » mais il a perdu toute crédibilité au sein de l’opinion. L’hypothèse la plus probable est que le gouvernement portugais sera amené à demander à la BCE d’actionner son programme OMT d’achat obligataire, le pays ayant satisfait à la condition préalable d’un retour sur le marché. Rien ne pourra d’autre en être attendu qu’un soulagement du service de la dette, sans amélioration de la situation économique et sociale.