Billet invité
« Nous devons trouver un équilibre entre la rigueur budgétaire et le soutien à la croissance » a une nouvelle fois préconisé François Hollande sans expliquer comment, tandis qu’Angela Merkel réaffirmait de son côté : « Ce dont nous avons besoin par dessus tout, c’est une compréhension commune en Europe – qui fait malheureusement défaut – de ce qui nous rend fort et d’où la croissance proviendra ». Autant dire que dans ces conditions, les propositions du premier – mise sur pied d’un gouvernement économique et mise en commun de ressources financières – sont a consommation intérieure, faute de réponse convaincante à la question de la seconde. Dans l’impasse, la politique française ne varie pas, qui consiste à adoucir sans y parvenir celle de l’Allemagne. Une réponse polie est attendue, le préalable d’un accord sur « les conditions d’une meilleure compétitivité » réaffirmé (porte-parole)…
François Hollande a préconisé sans plus de précisions de « remettre de la liquidité » dans un marché qui en regorge – mais ne l’utilise pas comme espéré – timide soutien à la politique que défend Mario Draghi, sans parvenir à la faire aboutir au sein du conseil des gouverneurs de la BCE devant le veto dont dispose de facto la Bundesbank. Benoît Coeuré, de la BCE, vient d’évoquer un montage financier en cours d’élaboration qui permettrait à la BCE de favoriser la titrisation de prêts aux entreprises sans en assumer le risque. Combien de souhaits peut-on formuler au génie quand il est déjà sorti de la boîte ?!
Au chapitre des recettes qu’il faudrait copier, des commentaires ministériels fleurissent sur le début d’une fragile relance japonaise enregistrée, louchant d’envie sur la nouvelle politique d’assouplissement monétaire quantitatif suivie par la Banque du Japon qui fait les choses en grand. Affectant d’ignorer que la baisse qui en résulte du quart de la valeur du yen par rapport au dollar et à l’euro depuis décembre dernier dope tout simplement le commerce extérieur japonais. La relance de la consommation intérieure qui seule permettrait de sortir de la déflation reste à se concrétiser…
Une autre question attend les dirigeants européens, qui préparent leur sommet de la semaine prochaine et sont à son sujet tout autant divisés. « Plus nous nous penchons sur le sujet des banques, plus il est clair que la crédibilité du secteur bancaire européen est un sujet central, y compris pour le redressement de l’économie », vient de reconnaître Angela Merkel, alors que le gouvernement français est comme à l’habitude bien peu loquace sur la question. Olivier Blanchard, l’économiste en chef du FMI, avait évoqué « une incertitude dans l’esprit de beaucoup de personnes sur le réel état des banques espagnoles », avant de revenir sur ses propos. Une mission d’assistance technique du FMI est néanmoins attendue à Madrid, afin d’évaluer les dégâts que la recapitalisation a minima des banques espagnoles (37 milliards d’euros tout de même) est loin d’avoir comblés.
L’Autorité bancaire européenne (EBA) vient d’élargir le sujet en demandant aux autorités régulatrices nationales d’évaluer la qualité des actifs de leurs banques respectives. « Nos recommandations en termes de recapitalisation ont amené les ratios de capitaux propres des banques de l’UE au niveau de ceux de leurs grandes concurrentes internationales », a déclaré son président, Andrea Enria, ajoutant toutefois : « Il faut cependant s’attaquer aux inquiétudes qui demeurent sur la qualité des actifs… C’est également une précondition nécessaire pour assurer la crédibilité des prochains tests de résistance à l’échelle de l’Europe ». Il ne devenait en effet plus possible d’ignorer un sujet qui ne concerne pas uniquement les banques des pays périphériques, mais au premier chef les allemandes et françaises, selon une source gouvernementale allemande laissée dans l’anonymat par « El Pais ». Identifier les fautives présumées, c’est annoncer par avance les limites de l’exercice qui va être réalisé. Au Royaume-Uni, une estimation a mis en évidence un besoin de recapitalisation de 30 milliards de livres. À quel chiffre politique parviendrons-nous pour la zone euro quand il sera annoncé avant la fin de l’année ?
Au chapitre des bonnes nouvelles, il se confirme qu’après l’Espagne, l’Italie n’a pas besoin d’un sauvetage en bonne et due forme. Il suffira dans ces deux pays d’appliquer à la lettre les recommandations de la Commission européenne sans avoir à connaître l’humiliation qui consiste à tendre la main, et la récession déjà bien engagée s’y approfondira. À Rome, le président Giorgio Napolitano appelle déjà à des réformes institutionnelles afin de sortir de l’impasse qu’il a créée en favorisant la mise en place d’un gouvernement de coalition paralysé par ses contradictions… Glissade ou dérapage, le choix est ouvert.