Billet invité.
Qualifier hier de « signe de confiance » l’annonce de la réunion de l’Eurogoupe dimanche à Bruxelles laissait à tort penser que la crise chypriote était de nouveau sous contrôle et que l’on s’acheminait progressivement vers un accord global. Ne percevant pas que les premiers votes du Parlement chypriote repoussaient le moment de trancher sur l’essentiel : la taxation des dépôts de plus de 100.000 euros, pour laquelle des fuites orientées faisaient état d’un taux de 15%. Ni que l’annulation in extremis du sommet Union européenne-Japon témoignait de la gravité de la situation.
Ayant sur la tempe le pistolet que représente le retrait lundi prochain de l’aide de la BCE, les dirigeants chypriotes se voient offrir comme seule issue ce qu’ils ressentent être un suicide auquel ils ne parviennent pas à se résoudre : l’écroulement de ce qui faisait la prospérité de l’île; ils tentent désespérément et par tous les moyens de préserver leur secteur bancaire et leur rôle de plaque tournante des capitaux russes. Les dirigeants russes, pour leur part, ne peuvent pas abandonner comme cela les facilités financières dont ils disposaient et attendent des dirigeants européens des propositions après avoir repoussé leurs travaux d’approches, notamment lors du G20 finances où fut proposé rien de moins que de renflouer les banques chypriotes et d’en prendre le contrôle, d’après le Financial Times.
Chypre se révèle être un casse-tête cumulant les défauts du Portugal, de la Grèce et de l’Irlande : une dette trop importante pour le pays, une économie reposant sur l’hypertrophie des activités financières et un secteur bancaire frappé à mort. Avec comme circonstance aggravante la présence russe dans le jeu. Le parlement chypriote a déjà adopté le principe d’une restructuration bancaire, d’un blocage des capitaux et de la création d’un fonds national de solidarité. Mais l’on ne connait pas le détail de ces mesures, ce qui laisse a priori toutes les options ouvertes. De leur côté, les autorités russes n’ont pas dévoilé leurs batteries, tout du moins ouvertement.
Plus que les sauvetages précédents, celui de Chypre met à rude épreuve les capacités des dirigeants européens et du FMI à maitriser une crise qui a pris un tour nouveau. Elle touche au secteur inviolé du shadow banking (la banque de l’ombre) et aux intérêts financiers d’un des pays du BRICS. La taille du pays ne correspond pas à celle du problème qu’il représente !
La suite au fil des heures qui viennent…