Billet invité.
Faute de mieux, les démocrates et républicains américains jouent cette fois-ci à se faire peur devant l’opinion ; ils laissent agir le mécanisme des coupes budgétaires automatiques, mis en place en août 2011, au lieu d’en éviter de justesse l’application comme en décembre dernier. Avec la perspective d’affronter une autre échéance, le 27 mars prochain : celle du plafonnement de la dette.
Ces jours derniers, les démocrates énuméraient les conséquences des coupes tandis que les républicains, qui ne veulent pas en supporter la responsabilité, tentaient de dédramatiser la situation. Mais, au-delà de ces jeux politiques, les derniers chiffres de l’économie américaine sonnent vrai : la croissance a quasiment stagné au dernier trimestre 2012, établie à 0,1%, et la Fed que l’on présentait prête à revenir sur ses dispositions les plus accommodantes en réaffirme au contraire l’importance (même si l’on peut douter de ses effets sur l’économie réelle.)
En fait de crise politique, celle qui se déroule en Italie n’est rien comparée à celle qui paralyse les États-Unis. Les deux grands partis ont des conceptions opposées de la manière de réduire le déficit public et ne veulent pas en démordre. Pour faire simple, les démocrates privilégient l’augmentation des impôts des plus fortunés et les républicains la réduction des dépenses de l’État. Et Ben Bernanke, le président de la Fed, essaye de promouvoir une autre voie, car il voit dans le maintien du chômage à un niveau élevé une atteinte à « la vitalité et au potentiel économique de notre économie dans son ensemble », risquant de déboucher sur « une hausse du déficit et de la dette », ce qui n’est pas spécialement l’objectif. Au final, il a suggéré que « le Congrès et le gouvernement devraient envisager de remplacer les brusques coupes dans les dépenses par une politique qui réduirait le déficit de l’État fédéral plus graduellement à court terme mais plus fortement à long terme ».
Si un seul éclairage devait être donné, le secteur des prêts étudiant résume au mieux la situation. Dans un pays où les études supérieures, au coût très élevé, est financé par des prêts bancaires, les étudiants parviennent de moins en moins à les rembourser, une fois diplômés, faute d’un emploi ou d’une rémunération le permettant. Après le crédit immobilier, les prêts étudiants sont devenus le deuxième poste d’endettement des ménages.
La Fed va donc continuer à tenir financièrement à bout de bras le pays, achetant sa dette et pesant sur les taux pour qu’ils restent au plus faible, aboutissant à la dévaluation du dollar et favorisant la spéculation monétaire. C’est à ce prix, payé par les autres, que les États-Unis sont et restent pour l’instant la première puissance économique mondiale. Mais ce qui est nouveau est que ce prix est également payé dans le pays.
Les prophètes de bon augure prédisent sa réindustrialisation grâce à la production de gaz de schiste et au miracle d’une nouvelle source d’énergie à bas prix. Il faut toujours qu’il y ait un petit coin de ciel bleu ! D’autres analystes mettent en avant la robotisation renforcée de la production qui s’annonce, laissant peu d’espoir pour la baisse d’un chômage devenu structurel. Et posant un grand point d’interrogation sur cette vision dans un pays où la consommation est le grand moteur de la croissance. Les États-Unis, c’est bien connu, font toujours les choses en grand et en avance. Ils ont un peu perdu la main au sein de cette crise, devancés par les Européens, mais pourraient vite se rattraper, la dynamique qui était la leur étantbrisée.
P.S.< \u> : Frédéric Oudéa, le Pdg de Société générale, a choisi fort à propos l’antenne de la télévision d’information économique et financière américaine CNBC pour délivrer son message à propos de la France : « Nous pouvons accepter des impôts élevés pour une courte période, mais à partir d’un certain moment, cela nuit à l’économie. J’espère donc voir les impôts baisser en France à un moment donné ». Il a précisé : « Nous devrions nous concentrer d’abord sur la baisse des dépenses publiques (…) Nous avons commencé en France mais plus doit être fait. La deuxième chose, c’est de réformer le marché du travail pour augmenter la compétitivité ».