Billet invité.
L’harmonisation de la régulation financière est le plus sûr moyen d’embourber celle-ci : ce n’est pas une découverte mais se vérifie à chaque occasion et sur chaque dossier. Cela vaut pour celui du gigantesque marché des produits dérivés (OTC). La finance américaine est passée maître à ce jeu-là, dont les Européens bénéficient en retour, et à l’arrivée tout traîne et rien ne se fait au nom du principe qu’il ne faut pas accorder d’avantage concurrentiel aux uns ou aux autres. L’autre piège classique consiste à faire valoir la complexité du sujet, et à l’accentuer, afin de s’y perdre ensuite.
L’enjeu des OTC est déterminant pour la sûreté du système financier, les estimations de la Banque des règlements internationaux (BRI) montrant comment, parti de rien lors de sa création au début des années 90, le marché des OTC s’est développé à une vitesse effrénée, s’échangeant de gré à gré et hors de tout enregistrement et contrôle. On parle de dizaines milliers de milliards de dollars, sautant encore d’une unité par rapport aux chiffres auxquels nous nous sommes accoutumés. Principaux contributeurs à l’accroissement de la bulle financière mondiale, ces instruments se sont révélés des outils de spéculation hors pair, permettant des paris sur le réalisation d’hypothèses les plus variées, un jeu de casino pur sans autre objet que de fabriquer de la valeur, sauf quand ils sont marginalement utilisés dans leur version assurancielle d’origine.
C’est fin 2012 au plus tard que devaient être définies les règles permettant la mise sur pied des chambres de compensation et plate-formes de négociations des OTC. Une décision du G20 datant de 2009 et qui n’a pas été respectée. L’occasion pour Janet Yellen, vice-présidente de la Fed, de formuler en ce début d’année le voeu que cela devienne effectif « le plus vite possible », alors que les travaux engagés sur le terrain de l’harmonisation à Bruxelles n’en sont qu’à leurs débuts et avancent à un train de sénateur. Il est fait valoir la complexité du sujet et surtout, selon Janet Yellen, qu’il faut être prudent car les mesures en discussion sont « susceptibles d’augmenter le coût de l’intermédiation financière et de la couverture de risque ». Elle fait ainsi référence à la nécessité que les transactions sur les OTC soient assorties de garanties – du collatéral – afin d’éviter que les chambres de compensation ne deviennent en elles-mêmes de formidables concentrateurs de risque… Raison pour laquelle il avait même été question de leur accorder le privilège d’un accès aux guichets des banques centrales, au cas où…
Le système est donc pris dans une contradiction, sa régulation pesant sur son rendement global. On devine le choix qui est fait.
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