Billet invité
Par nature, un banquier central est imprévisible et sibyllin, quand il ne joue pas les grands cachotiers. Comme si, par l’opacité de son action, il se mettait au diapason du monde qu’il fait semblant de régenter mais qui souvent le dépasse, son art ultime consistant à le dissimuler. Lorsqu’il intervient, tout est dans la surprise, sans que la plus petite opportunité soit laissée à ce sens de l’anticipation dont les financiers affectent de disposer, ni à ces délits d’initié dont ils font leur miel quand il n’en sont pas tout simplement les instigateurs. Par l’exercice de ces aptitudes, le banquier central tente de compenser grâce à la soudaineté de son action les limites d’une force de frappe qui lui est de fait comptée.
La dernière magistrale démonstration de ce savoir-faire nous a été prodiguée par Mario Draghi, lorsqu’il a convaincu le conseil des gouverneurs de la BCE de lancer subrepticement et successivement deux opérations massives pour un montant total d’un millier de milliards d’euros, accroissant du même coup son bilan en lui faisant atteindre une taille similaire à celui de ses consœurs qui l’avaient devancé. Il est vrai qu’il y avait urgence.
Mais les plans de la banque centrale sont parfois distillés sous forme de mesures techniques, en attendant d’apparaître pour ce qu’ils sont. C’est semble-t-il le cas de la récente décision de permettre aux banques centrales nationales de l’Eurosystème de désormais décider elles-mêmes de la liste des collatéraux qu’elles acceptent de prendre en pension, ces actifs proposés en quantité par leurs ouailles à titre de garanties des emprunts dont elles sont devenues dépendantes.
Dans un premier temps, cela permet aux banques centrales nationales de repousser les titres de la dette jugés trop risqués que les banques de leur pays leur proposent, même après une sérieuse décote. Dans un second temps, cela aura pour conséquence de concentrer dans les bilans des banques centrales des États en difficulté les titres émis par leur propre État, car leurs consœurs ne les accepteront plus. Au bout du compte, cela permettra plus facilement, demain, qu’un pays puisse sortir de la zone euro sans d’autres dégâts que ceux qu’il subira lui même, ce qui n’était pas le cas et a justifié le sauvetage de la Grèce à tout prix.
Certaines intentions ne sont pas toujours clairement annoncées… En l’espèce, la BCE anticipe la détérioration future de la situation des pays périphériques, à qui il est asséné un traitement destiné à tuer le malade, mais seulement une fois qu’il aura tenu le coup suffisamment longtemps pour que cela soit devenu acceptable. Une fois que les banques centrales protégées, à la suite des banques commerciales, se seront également délestées à temps des titres dévalorisés.
Un exemple du même tonneau est donné par les suggestions du dernier rapport mensuel de la BCE. Celle-ci propose d’intégrer dans le calcul de la dette et de son ratio plafond de 60 % du PIB les garanties données par les États, ce qu’elle appelle la « shadow debt ». Comme si la barque n’était pas encore assez chargée, elle propose également de prendre en compte dans ce même calcul l’incidence financière du vieillissement de la population sur le budget de l’État. Avec comme logique induite celle de l’austérité ad aeternam et ad nauseam, et pour conviction que si la dette n’est pas soutenable, les conséquences de la rigueur par contre le sont.
Si l’on s’y attarde un peu, la proposition est inconséquente du point de vue de la même BCE ; car celle-ci réclame d’une main la constitution par les États d’un pare-feu dont le principe est de reposer… sur leurs garanties, et voudrait leur en soustraire de l’autre les moyens. À moins bien sur que l’objectif ne soit également d’intégrer dans le calcul ces nouvelles garanties-là.
Cette brillante approche fait penser à ce que rencontre actuellement le gouvernement espagnol : il voudrait bien soutenir ses banques dans la déroute mais n’en a pas les moyens, car cela augmenterait un déficit qu’il ne parvient déjà pas à réduire comme il lui est enjoint. Le Financial Times, dans son éditorial de ce matin, s’interrogeait à ce propos sur l’opportunité de sauver ces banques, prenant comme exemple de ce qu’il ne fallait pas faire l’Irlande, prochain candidat aux gros titres de la presse financière. Car le gouvernement irlandais tente de renégocier les billets à ordre qu’il a signés dans la précipitation pour renflouer l’Anglo-Irish Bank, mais Jörg Asmussen de la BCE s’y oppose résolument, car il ne faut pas donner de mauvais signal aux marchés ! Si cette opération échoue, qu’en sera-t-il de la réduction du déficit irlandais ?
Si l’on voulait évoquer d’autres étrangetés a priori aussi déconcertantes, il faudrait rapporter comment la directrice générale du FMI tente de faire de nécessité vertu en annonçant revoir à la baisse ses objectifs de renforcement des moyens financiers du FMI, avec comme visée de venir à l’aide de l’Europe, en prenant appui sur la décision européenne de réduire la voilure de son Mécanisme de stabilité (MES). Alors qu’elle devrait logiquement en tirer la conséquence contraire…
Tous ces plans sur la comète et ces positionnements vont être bouleversés. Chaque jour qui passe rend plus urgente une aide financière à l’Espagne afin de renflouer ses banques. Elle a déjà été mise au point à Bruxelles et, pour sauver les apparences, ne prendrait pas la forme d’un plan de sauvetage. Mais elle va faire tâche, puisqu’elle est destinée à répondre à une crise bancaire et non plus de la dette publique. Le doute n’est pas possible : le plan de sauvetage espagnol l’accompagnera et la suite enchaînera…
Nous sommes 4 ans après lehman et les emprunts pourris dans les banques sont toujours là et inconnus , il ne s’agit que d’argent gagné qui sera perdu , pas trop grave mais ……………..imaginez ce que peuvent être les emprunts immobiliers pourris ……au moins 10 fois plus si on lève 100 avec 10 d’apport et 100 fois plus si on lève 100 avec zéro apport.
La durée de résolution de tout çà ?
1*2=2 à crédit 30 ans = 4 , dévalué de moitié =0,5….écart 8 fois.30 ans *8= 240 ans.
Le jeux du pétard.
Ils ont tué l’euro…dès sa naissance.
L’Europe des seize est morte, celle des vingt sept aussi!
Mais cela n’a pas été inutile. C’est le plus formidable terreau…pour une Europe des peuples.
PS: En espérant que nous n’ayons pas à trop en souffrir, trop longtemps.
Certes, mais ne pas oublier le flux inverse, le reflux quoi, qui fait plus que compenser ce phénomène… Je veux parler du graphique Bloomberg du billet de Jorion… Ah la la la la ! Ce pognon qu’arrête pas d’bouger ! C’est d’un pénible… pas vrai Mario ? Va p’têt falloir penser à boucher des tuyaux un jour Mister Superplombier…
J’y vois, au contraire, le même phénomène (puisque ce qui décrit le graphique de Bloomberg sembe être remarquable)
l’Europe ne sert plus à rien, petit à petit elle devient une coquille vide, et va nous renvoyer à nos égoïsmes nationalistes engendrant comme toujours affrontement entre pays européens (une guerre dans les 20 prochaines années?????)
Totalement faux Tchoo. Si par exemple la Grèce sort de l’eurozone c’est de 100 milliards €, le solde négatif Target grec, que tous les pays de la zone doivent renflouer la BCE – au pro rata de leur part de capital, baissant pratiquement d’autant le solde Target positif de la Bundesbank (plus de 500 milliards).
… et la suite s enchainera
@ KIMPORTE
où
INC… THESEE SALUT ARIANE
Ariane : est, dans la mythologie grecque, la fille du roi de Crète Minos (fils de Zeus et d’Europe).
Séduite par Thésée, elle aide celui-ci à s’échapper du labyrinthe où est inclus le monstre Minotaure, que Thésée va tuer.
Thésée : Dans la mythologie grecque, est considéré par les Athéniens comme leur grand réformateur. Son nom proviendrait de la même racine en grec : « institution ».
Thésée, roi-fondateur et unificateur mythique d’Athènes, rendu responsable de l’unification politique de l’Attique.
INC. est une abréviation qui signifie : inclus
Qui a dit que la Grèce peut sortir de l’Europe ?
Merci KIMPORTE, vous nous êtes d’un grand secours.
Il me semble normal et sain de compter les garanties de l’Etat dans ses dettes, puisque ce sont des dettes potentielles, mais pas de les inclure dans les 60% qui sont des dettes réelles, ou pour être clair, ce taux de 60% devrait évoluer en fonction des garanties, disons 60% maxi de dettes réelles et 20% maxi de garanties, chiffres prit sur l’année de signature et non sur le montant des PIB suivants, variables dans tous les sens.
Évidemment, le jeu pour les gouvernements consistera à transformer l’une en l’autre mais des règles comptables devraient pouvoir en venir à bout. Ceci dans un contexte sain, pas dans l’actuel.
Christine qui n’arrive pas à trouver ses milliards, le MES qui ne trouve pas les siens alors que les taux italiens et espagnols remontent, on dirait que la fin du jeu se rapproche.
Les chinois qui deviennent nerveux, les prochaines élections française et grecque, puis américaine à la fin de l’année, le crash programmé de l’euro et du dollar, une guerre d’Iran?
De quoi alimenter beaucoup de billets. 🙂
A propos, pour François :
une tâche est une chose à faire,
une tache se nettoye.
Une côte (du Rhône) se boit ou se monte à vélo,
une cote vient de Cotation, la région natale d’Argus, parfaitement plate.
Ce n’est pas que je sois un acharné de l’orthographe mais c’est plusse franssais…
Il y a de très nombreuses raisons de commettre des fautes d’orthographe, celles qui sont dues à la vitesse d’écriture et au gain de temps qui en découle qui permet à François de nous servir tous les jours quand ce n’est pas plusieurs fois par jours, ces billets d’exception n’ont aucune importances.
Il est mal séant d’en faire mention.
Les » bons » en orthographe n’ont pas compris et ne comprendront jamais c’est trop compliqué pour eux, que ceux qui commettent des fautes d’orthographe ne le font pas exprès, ni par mauvaise volonté, ni pour aucune mauvaise raison…
Dans un autres domaine ils s’en trouvent qui n’hésitent pas à reprocher aux pauvres de l’être par paresses ou mauvais esprit !
On peut étendre l’observation sans fin…
Une exception pour une faute très courante sur ce blog, billets compris, qui n’est pas d’orthographe mais de sens: sensé n’est pas censé.
sensé= qui a du sens censé= supposé
C’est une classique, mais on y fait attention à la correction.
Dans quelques semaines , on va passer du « too big to failed » au « too big to be rescued »
Patience…
Lundi 16 avril 2012 :
Taux des obligations espagnoles à 10 ans : 6,12 %.
http://www.bloomberg.com/quote/GSPG10YR:IND