Opinion: les coupables se rebiffent !, par François Leclerc

Billet invité.

LES COUPABLES SE REBIFFENT !

Mai 1968 a duré un mois. Cette singulière évidence doit sans doute être rappelée, car il semblerait que la marque laissée par cet événement soit telle qu’on lui attribue beaucoup, et de manière un peu disproportionnée, pour ne pas dire tout de go injustifiée.

Certes, il ne s’agit pas de faire de ce mois-là une intouchable icône et de se réunir tous les ans, dans la cour de la Sorbonne ou ailleurs, pour la vénérer drapeaux sortis des étuis. Avec le recul, les innombrables débats qui ont porté sur sa signification et le sens qu’il fallait lui accorder pouvaient peut-être enfin trouver leur conclusion, aurait-on pu penser. Mais non, Mai 68, à peine entré dans les livres d’histoire à la grande horreur de ceux qui y ont participé, est immédiatement « revisité ». Avec l’étonnante intention d’en faire l’origine de nos maux actuels, et de mettre au pilori une génération entière pour faire bonne mesure. Une situation que chacun s’accordera à trouver inconfortable.

Que d’incompréhension et de méconnaissance ! Que de rancoeur rentrée, dans certains cas extrêmes, qui pour avoir été si longtemps contenue peut enfin se libérer ! Qu’il est dommage que d’autres grands épisodes de notre histoire n’aient pas été si rapidement l’objet d’une telle réévaluation : l’antisémitisme profond de la société française, ou bien le pétainisme de la « vieille France », le mythe de la résistance au nazisme de tous, ou enfin le black-out sur la meurtrière et traumatisante guerre d’Algérie. Tellement de cadavres dans nos placards et un seul en est exhumé, alors que c’est le plus présentable !

« Révolte ou révolution  ? ». Cette question qui peut sembler scolastique a fait dans les années qui suivirent couler beaucoup d’encre et de salive. Il paraît aujourd’hui que ni l’une ni l’autre de ces deux analyses n’est acceptable. « Une révolution, pourquoi faire ? Une révolte, que fait la police ? » Le fil est alors trouvé qui va permettre de pendre haut et court le prévenu : l’individualisme dont il a été porteur, qui détruit la société, l’éthique et la morale à la fois. « Tout fout le camp, mon bon Monsieur ! »

« L’ignorance n’est pas un argument » a dit Spinoza. Si ce mois-là a été l’objet d’une telle explosion spontanée (et d’un tel élan dans la société en faveur des étudiants qui l’ont initiée, tout du moins dans un premier temps), c’est tout simplement qu’un carcan devait exploser, celui d’une morale bien pensante en retard d’une évolution des moeurs, d’une société sortie meurtrie d’une sale guerre coloniale sans avoir fait son examen de conscience, d’un système politique paternaliste étouffant que l’on a pu qualifier de « bonapartiste » (lui, n’a pas résisté), d’un besoin, irrésistible pour avoir été comprimé, de tout simplement mieux profiter de la vie. Cela n’a pas été l’apanage de la seule jeunesse d’alors, mais c’est elle qui l’a, avec le plus de plaisir, de détermination et d’humour exprimé. Elle était simplement moins meurtrie, ou avait encore des illusions, c’est selon.

La manière dont tout cela a ensuite été canalisé et s’est ou pas réalisé n’était pas, contrairement à ce que l’on voudrait nous faire croire, gravée dans ce qui s’est passé, ni même dans ce qui a suivi et en a découlé de si important, le mouvement féministe notamment. D’autres forces en sont à l’origine, d’autres leviers ont été actionnés, qui l’ont emporté.

Faut-il donc, dans la confusion, à ce point charger un fantôme dont il ne reste que des souvenirs, et bientôt seulement des traces, afin d’éluder une réflexion sur des mécanismes bien réels, plus apparents désormais qu’ils sont grippés, qu’il faut désormais achever de briser s’ils n’y parviennent pas à eux seuls ?

Cette époque, puisqu’il faut y revenir pour en rappeler le contexte simplement, et non pas la magnifier, a été celle où les « baby-boomers » avaient 20 ans. Ils étaient nombreux, ils ont donc fait foule. Ils avaient lu Nizan, mais avaient l’intention de lui donner tort. Afin d’y parvenir, ils ont cherché à s’émanciper d’une société rétrograde qui les réprimandait d’avoir les cheveux longs, pour ne prendre que le plus bête et pourtant vrai des exemples ! La politisation n’est venue que pendant le mouvement, progressivement, et n’a concerné qu’une minorité agissante.

Tous ceux qui se sont retrouvés dans la rue, jour après jour, ou bien qui étaient suspendus aux radios que l’on appelait à l’époque périphériques – car ils étaient trop loin et elles paradoxalement au coeur de l’événement – ont exprimé une nécessité, apparue impérieuse et ne supportant pas la contestation (un comble !) : accéder à une liberté individuelle qui leur était interdite. D’où le si discuté maintenant et mal interprété « il est interdit d’interdire! ».

Mais ils l’ont fait collectivement et ont découvert à cette occasion l’étrange et enivrante sensation d’être partie prenante d’une multitude et de se reconnaître en elle. Avant d’essayer de la faire durer dans les années qui s’en suivirent, afin de ne pas la perdre. Mais peu à peu elle s’estompa…

Ils voulaient « pendre le dernier capitaliste avec les tripes du dernier bureaucrate », un programme qui n’était pas sans rappeler les têtes brandies sur les piques d’une Révolution passée, mais qui était en fait empreint de pacifisme, la violence était dans les mots et faite de dérision ; les précédentes générations avaient été marquées par les carnages des guerres, eux s’y opposaient en toutes occasions, même si elles étaient éloignées. Il n’empêche aussi que malgré le maoisme de certains, c’est une composante profondément libertaire, à la fois irréductiblement opposée au capitalisme et la bureaucratie socialiste qui tint le haut du pavé, et donna un signal sur lequel il ne fût pas possible de revenir. Sur la place de la Sorbonne, cet après-midi là, Louis Aragon, en visite comme tant d’autres, ne trouva rien à répondre à Dany Cohn-Bendit qui l’apostropha.

Il faut tordre le cou à un pesant argument. Il s’appuie sur la dénonciation des militants de cette époque qui se sont ensuite retrouvés en vue dans des métiers de la communication (pour la plupart), à qui l’on voudrait faire porter la responsabilité de la société telle qu’elle est devenue, comme s’ils en avaient été aux commandes. Leurs destins – pour certains fait de reniement mais pour d’autres de maintien dans leurs convictions et pour d’autres enfin accommodements – n’ont fait que refléter ce que notre société est devenue, une évolution à laquelle ils ont au pire contribué mais qu’ils n’ont pas initié. C’est tout ce qui pourrait leur être reproché ! L’expression est bien connue, ne jetons pas le bébé avec l’eau du bain.

Quel que soit le plan sur lequel on se situe, celui de l’histoire générale des idées dans laquelle Paul Jorion vient de se situer, ou celui bien plus prosaïque de la société française, Mai 68 est coupable, c’est donc dit ! Coupable d’avoir exprimé des aspirations qui n’ont ensuite trouvé qu’une très partielle et relative satisfaction ! Coupable d’avoir raté son coup et non pas de l’avoir réussi  !

Ceux qui y ont participé, ces anciens combattants à juste titre moqués, ont eu le bonheur de vivre un instant le sentiment exaltant qu’ils pouvaient contribuer à changer le monde, dans une période marquée par tant d’effervescences culturelles, de luttes sociales et de libérations nationales dans le monde entier (cf. les mêmes manuels d’histoire). Ceux qui ont en plus la chance de les avoir parcouru de par le monde savent de quoi ils parlent. Il leur est resté non pas le sentiment – ressenti comme insupportable s’il devait continuer à leur être reproché – d’avoir enfermé, par leur comportement et leurs idées, la société dans la terrible logique dans laquelle elle se trouve aujourd’hui prisonnière. Mais au contraire d’avoir été les témoins ou les acteurs, peu importe aujourd’hui, d’un élan qui a été brisé et que d’autres pourraient à leur façon relancer. Après délibération, le verdict est finalement non coupable !

Sur la base d’un fait nouveau, la crise actuelle, l’instruction peut reprendre, à la recherche de ce qui n’a pas été trouvé il y a quarante deux ans, car il n’y a pas de prescription dans ce domaine. Celle-ci, que nous vivons sans encore trop y croire tellement elle est invraisemblable, est sans commune mesure avec celle qui a tout déclenché à l’époque, allons-nous la subir chacun dans notre coin ? On voudrait croire que rien n’est moins probable.

125 réponses sur “Opinion: les coupables se rebiffent !, par François Leclerc”

  1. L’ANCIEN COMBATTANT DU ROCK’N’ROLL

    L’esprit de 68 n’est pas l’individualisme, du moins tel que je l’ai vécu, bien au contraire. Jusqu’en 72/73 il y avait quotidiennement dans les hall de gare des groupes spontanés qui discutaient, toutes générations confondues, des évènements du jour. Dans les Entreprises les mêmes regroupements plus ou moins spontanés se retrouvaient aux cafet’ (la photocopieuse en était à ses balbutiements!). Je me souviens du plaisir que ressentait les gens à s’aglutiner autour d’un « discourant » généralement lecteur de « Rouge » ou pseudo-anar.
    Ne pas oublier que notre adolescence avait été bercée par les affres de la guerre froide et la probabilité non-absurde d’une guerre atomique rendant de ce fait la philosophie du « no-futur » une évidence. La guerre du Viet Nam était récupérée par les communistes français à une époque où ils pesaient encore 25% de l’électorat, mais leurs tentatives de récupérer la « chienlit » des étudiants puis de toutes la jeunesse n’a guère été plus loin que l’organisation de concerts de Rock dont mon groupe (le plus célèbre à l’ouest de Paris) a largement bénéficiée…

  2. Finalement plus 68 est raconté ,plus on s’en éloigne moins les récits qu’on en fait ne cernent le contour particulier de ce moment de talent collectif a la fois fort et diffus.
    Je garde cette image.

  3. @ et si on arrêtait le mythe quelques instants

    Ainsi, toucher à 68 fait encore du mal dans l’intelligentsia française ..
    Excusez de ne pas partager votre opinion , M Leclerc, même si manifestement nous avons la même histoire. Mais appeler les autres à leurs responsabilités peut être très facile ; dans le cas de la crise actuelle c’est même très juste de pointer les fautes des financiers .
    Mais cela n’aura de valeur qu’à condition d’assumer les nôtres et sérieusement.
    Alors foin de grands discours sur les  » aspirations à la liberté et à l’amour » , le rappel au réel et à ce que les gens ont fait !

    A ce propos je rappelerai juste une anecdote au coeur même de mai 68 : déjà professionnel il m’a été donné de faire mon DEA et ma thèse de philo à Nanterre . 15 ans après et les traces de 68 étaient toujours visibles . Salles de cours dévastées, meubles éventrés, les murs noircis .On faisait les cours debout
    Et les éternels tags qu’il ne fallait bien sûr pas critiquer ni surtout nettoyer .. Je ne raconte pas comment était traité celui qui parler de respect des contribuables Et impossible à qui voulait ne serait-ce que travailler de faire valoir ce droit « réactionnaire » bien sûr … C’est cela l’héritage de Mai 68. L’université française ne s’en est toujours pas remise

    1. Je vais vous faire un aveu, dans la Sorbonne occupé, les filles et les garçons se lavaient comme ils pouvaient ensemble et sans se gêner dans les lavabos des toilettes le matin. Avant d’aller petit-déjeuner grâce à tous les dons de nourriture qui affluaient, apportés de l’autre bout de Paris à pied, car c’était la grève des transports en commun. Oubliant de rincer les lavabos en partant, lorsque les CRS et les gendarmes mobiles sont entrés sans y être invités pour que l’ordre Républicain règne dans ce temple du savoir. Ces sauvages ne respectaient rien, je parle des étudiants.

    2. @françois Leclerc
      Cher M Leclerc juste quelques questions posées par un « témoin » de la Sorbonne et de l’Odéon.
      – Vous ne parlez pas des 3 dortoirs aménagés sous les combles de la Sorbonne. Celui des garçons en premier, celui des filles et celui des couples. Pourtant là était bien Mai 68. Pourquoi ce silence ? Faute d’y avoir jeté un coup d’oeil ?
      – Le soir où Dany le Rouge prit la parole lors de son retour « illégal » en France, je n’avais pas pu pénétrer dans l’amphi où il était entré dans une cohue. On me hissa depuis la cour sur l’embrasure d’une fenêtre ouverte au niveau de l’estrade. C’est ainsi que j’ai pu assister à une « foire d’empoigne » inintelligible tant les hurlements fusaient venant des anars qui entendaient couvrir les propos de ce maoïste aux cheveux roux. Delà tout ce beau monde alla « en masse » écouter un vieillard qui pérorait affirmant avoir connu le père de Gide. Ce vénérable ancêtre parla de l’informatique comme moyen de planifier le « vrai socialisme ». Mais il termina par cet avertissement prémonitoire: « Soyons vigilants car un ordinateur peut devenir réactionnaire ». Cet avertissement provoqua une approbation générale. Il fut très applaudi pour cette saillie. On approuvait ce danger susceptible de provenir d’une déviance de la pensée prolétarienne. Seconde question: la critique des modèles économiques mathématiques n’est elle pas issue de ce courant de pensée.
      – A l’Odéon le soir….. Au 3ème balcon, caché par le muret, il se passait des choses….Des sous vêtements de femmes étaient jetés en l’air à un certain moment de la soirée: quand les gaullistes ou opposants tentaient d’exprimer leur point de vue. C’est à ce moment précis que sur le scène l’orateur lançait: De Gaulle, c’est l’armée. Faites l’amour, pas la guerre…. Et alors une ovation s’élevait saluant des cris de fille non équivoques sur ce qui se passait au 3ème balcon…
      Troisième question: Rêver à un monde économique sans concurrence, à des économies justes et équitables dans le monde, n’est ce pas le même courant d’utopie comparable à « jouïssez sans entrave » ? Alors que l’absence d’entrave du point de vue financier à conduit justement à tout le contraire……

    3. albin, à propos des dortoirs, dont semblent avoir été imaginé bcp des slogans de 68, cet extrait d’un entretien donné au monde par Cl. Rooset: « L’Ecole normale supérieure était dirigée par Jean Hyppolite, grand hégélien devant l’éternel, premier traducteur de la Phénoménologie de l’esprit, qui était un homme d’un libéralisme total. A tel point que Mme Dury, qui dirigeait à l’époque et dans un tout autre esprit l’école des jeunes filles de Sèvres, a échangé quelques propos inoubliables avec lui un peu avant le bouillonnement de Mai 68. La légende raconte que, lasse des escapades nocturnes de ses pensionnaires, elle aurait été trouver Jean Hyppolite et lui aurait fait un discours se terminant par ces mots : « Il est temps que cesse ce bordel dirigé par un moine. » Ce à quoi Jean Hyppolite, avec humour et sens de la repartie, aurait répondu : « Ça vaut peut-être mieux qu’un couvent dirigé par une putain. » Et il est désormais avéré que l’interdiction qu’elle faisait à ses ouailles de rencontrer les garçons en général, et les normaliens en particulier, fut une des origines de Mai 68.

  4. En fait, pour schématiser, il y a eu deux mai 68 en parallèle : celui des salariés qui ont trouvé là l’opportunité d’écarter le carcan auquel les soumettait le capitalisme national traditionnel, et le mai 68 petit bourgeois politiquement libéral qui préparait en fait sans même s’en douter le lit du libéralisme économique que nous subissons. Cette dualité a trompé beaucoup de gens, y compris les acteurs de l’événement.

    1. Jean-Paul

      Vous savez, Mai 68 cela s’est passé en France et croire que « le mai 68 petit bourgeois politiquement libéral qui préparait en fait sans même s’en douter le lit du libéralisme économique que nous subissons » est une vision assurément fausse due à un parisiano-centrisme un peu myope.

      L’offensive néo-libérale s’est développée à partir de prémisses économiques et pour récupérer un pouvoir perdu après la seconde guerre mondiale en Europe et aussi pour contrer le poids croissant de l’Union soviétique dans le monde. Comme tout le monde l’a déjà dit, Thatcher, Reagan, voire Verhofstadt furent, au plan politique, les pointes visibles de l’iceberg de la glaciation néo-libérale partie de Grande-Bretagne et des USA. La France est arrivée 15 ans en retard, elle n’a pas soutenu Madelin au moment opportun et il a fallu le bateleur Sarkozy pour qu’elle entre en scène néo-libérale… quand les autres commencent à en sortir.

      Mai 68 fut très amusant (François témoigne avec véracité – et nostalgie? – de la joie vécue au cœur de cette révolte adolescente) et fut aussi un moment important sur le plan culturel et intellectuel francophone (toujours en cours de digestion). Mais lui attribuer le mérite ou le déshonneur d’une évolution mondiale vers le néolibéralisme, c’est lui accorder une importance que cette jacquerie estudiantine ne revendique pas.

    2. @ Alain A

      C’est vrai, le néo-libéralisme n’a pas attendu 68 pour prendre racine dans nos sociétés occidentales.
      Je suis en plein accord avec cette analyse.

      Ceci dit, et ce n’est pas pour critiquer le mouvement du mois de mai 68, il difficile de nier que 68 a fait sauté un verrou, ne serait-ce que symboliquement, qui a permis au capitalisme de se transformer. En s’attaquant à toutes les formes d’autorité, l’autorité de l’Etat, l’autorité des « mandarins » à l’université, l’autorité patriarcale, l’autorité du chef d’entreprise patron de droit divin, le mouvement a libéré dans la société une prodigieuse énergie, laquelle, faute de trouver un réel débouché politique, a été récupérée par le système capitaliste. Celui-ci a récupéré à son seul profit, ou presque, l’énergie libidinale libérée pour installer solidement un nouveau capitalisme, dérégulé, déterritorialisé, là où auparavant le capitalisme prospérait de concert avec le développement de l’Etat providence. Le nouveau capitalisme s’est ainsi appuyé sur la libéralisation des moeurs dans la sphère privée pour alimenter une consommation de masse dans la sphère marchande. Il ne s’agit pas d’une vue de l’esprit, pour s’en convaincre il suffit de regarder les publicités qui s’étalent sur les murs de nos villes, dans les magazines et à la télévision. La transgression y est un thème récurrent. On est loin du capitalisme et de l’éthique protestante de Max Weber. Bien entendu on est en plein dans la société du spectacle, si bien analysée par Guy Debord. L’exemple de la Chine atteste aussi du phénomène. Alors que le régime se durcit politiquement on assiste à une réelle libéralisation des moeurs qui coïncide avec la montée en puissance du capitalisme chinois. 68 avait de réelles revendications quant à l’émancipation des individus dans tous les domaines. Comme un maître des arts martiaux à l’apogée de son art le capitalisme a détourné la force contestation sociale à son profit. Le moment est venu de nourrir au sein du capitalisme toutes les forces individuelles qui se sentent de plus en plus prisonnières de sa gangue pour déboucher sur un nouveau mouvement collectif.

  5. j,ai eu une discutions avec mon père il y a quelques temps sur mai 68 ( j’avais 8 ans a l’époque et 1 mois de vacances gratis ) et a la fin je lui ai dit :
    en 68 vous avez pas fini le travail .
    il m’a répondu : c’est vrai ……….
    en 3 jours de grève dans sa boite ils avaient eu 30 % d’augmentation ( ça fait rêver )
    mais par solidarité avec les autres ils avaient continué la grève .
    c’est d’ailleurs lui qui m’avait dit que certains de ceux qui nous gouverne aujourd’hui ( devedjian , madelin etc …. ) étaient sur les barricades mais avec les CRS pour casser les grévistes .
    un nouveau mois de mai serais le bienvenu et éviterai peu être des drames et des usines qu’on risque de voir bruler .

  6. Un très bon film à ce sujet, englobant l’effervescence mondiale de cette période : « le fond de l’air est rouge » de Chris Marker.
    Documentaire avec uniquement des images d’archives, sorte de critique nécessaire des erreurs et des réussites des mouvements sociaux de cette époque. Je vous le conseille vivement (bien que pas né en 68!!).

    un lien : http://www.arte.tv/fr/A-l-antenne/1986050.html

  7. Le grand soir, c’est le jugement dernier du prolo. Inutile de l’attendre.
    Le grand soir, c’est tous les matins quand vous vous levez.
    Les manifestations sont les musées vivants de la révolution.
    Je n’était pas né en 68. Je suis né en 1980. Avec de la chance, je mourrai en 2080. Le monde aura changé.
    Nous ne subissons pas l’effondrement actuel! Chacun dans notre coin, nous le hâtons!
    Je déborde d’espoir, et jalouse votre sagesse…

  8. Pour moi, née au début des années 60, mai ’68 rime surtout avec émancipation, liberté et droits de la femme. Et là est, à mon avis, le problème. Qu’ont fait les femmes ces 4 dernières décennies? Si l’on veut avoir une idée de ce qui est arrivé à la société occidentale depuis mai ’68, il faudra bien avoir le courage de parler de la place de la femme dans la société moderne. Je sais, voilà un sujet qui peut en fâcher certains, mais il faudra bien finir par appeler un chat, un chat!

    Ce sujet est très intéressant, il ne faudra pas le laisser passer. Alors, comme tout va très vite, et pour enrichir le débat, je propose un petit jeu qui consisterait, pour chacun d’entre nous, à essayer de mieux cerner cette époque:

    Quels sont les dates, faits, anecdotes, moments forts, évènements que vous n’avez pas oubliés et qui vous paraissent déterminants et caractéristiques de ces 40 dernières années?
    Comme je le disais, pour moi, ce sont l’émancipation des femmes, la contraception, le droit à l’épanouissement personnel, la rupture avec les traditions, etc…, et ce qui va avec, la société de l’hyperconsommation.On pourrait appeler ça, l’inventaire de l’après ’68.

    Et ensuite on passerait à une critique des Lumières, et on reparlerait de la pensée postmoderne.

    Ce blog est passionnant, j’y passe un certain temps, mais là, mon devoir m’appelle… Je vous souhaite à tous de Joyeuses Pâques.

    1. Je me permets de lancer une première piste.
      Pincus invente la contraception orale, qui est commercialisée à partir de 1960.
      « C’est en 1967 que fut votée la loi Neuwirth qui abroge les articles du code de la santé réprimant la propagande anticonceptionnelle, et autorise l’importation, la fabrication des contraceptifs »
      Un » progrès » technique bouleverse en quelques années le jeu de l’amour et du hasard,non sans rencontrer des résistances.Puis 1968 survint.

  9. Pour être tout à fait franc, cette discussion sur mai 68, commencée le 22 mars à l’occasion du contre-appel de Paul et François, finit par tourner à vide. Elle a l’air de passionner les anciens combattants du « joli mois de mai », mais comme souvent les petits-enfants regardent (plus qu’ils n’écoutent) les grands-parents entrain de se perdre dans leur récit tandis qu’eux-même finissent par sombrer dans l’ennui le plus profond…
    Je me permettrai donc de polluer ce débat moribond et de reprendre les choses là où elles ont été interrompues par les moralistes de la minorité bavarde à tendance zeymourienne: je veux parler des rêves. Je mets en lien ici un article de Jacques Sapir, qui fait ici des propositions tout à la fois concrètes et radicales: http://contreinfo.info/article.php3?id_article=3010
    Bonne lecture.

    1. j’ai 35 ans, et les débats sur mai 68 m’intéressent. D’abord et avant tout parce que mes parents, âgés du trentaine d’années, y ont participé. Ma mère me racontait hier soir, qu’elle avait été accusée de meneuse à la trésorerie où elle bossait (en province, 68 n’a pas eu lieu qu’à Paris). Elle réclamait de meilleures conditions de travail et surtout une revalorisation de salaire. Ce qui fut fait. Ce n’était pas du luxe: quand elle avait été mutée, quelques années auparavant, en début de carrière à Paris, elle n’avait pas de quoi manger trois repas corrects par jour. Le seul avantage que son patron avait réussi à obtenir pour les petites recrues de province, c’était la cantine le midi. Tout le salaire était englouti dans les loyers hors de prix.
      Moi aussi je me sens une fille de mai.Mais c’est vrai que les récits de cette époque m’accompagnent depuis mon enfance.

    2. j’ai 36 ans, et mai 68 a cessé de m’intéresser. En tout cas pas comme cela est abordé ici même. Les discours posés sur la révolte me font bailler. J’ai moi aussi écouté mon père me raconter comment s’était passé mai 68 pour lui (il était syndicaliste) mais lui-même, en me racontant ça, baillait profondément. Car dans le fond, qu’est-ce que c’est mai 68: une révolte d’étudiants qui veulent chasser le paternalisme ambiant + une grève générale des salariés, deux choses ma foi très banales au XXè siècle. Des grèves de jeunes, la France en connaît une tous les 5 ans (souvenez-vous des grandes grèves de 86, de 2004, j’en oublie); des conflits sociaux, il y en a en permanence en France (de 1936 à 1995, ça ne manque pas); La seule originalité de 1968: c’est la conjonction des deux lors d’un mois du printemps propice à la fornication. Sauf que rien n’en est vraiment sorti sinon quelques émotions cutanées (mais croyez-vous que l’on ait attendu mai 68 pour pratiquer la chose), une hausse de salaires (ce qui est très concret tout de même), le goût d’une liberté un peu plus ivre (que l’on retrouve déjà en 36 lors des occupations d’usines) et une acrimonie renouvellée du monde de droite vis à vis des jeunes mais aussi vis-à-vis des »classes travailleuses » qui redevenaient, après l’accalmie de l’après-guerre, des « classes dangereuses ».
      Mai 68 et l’après 68, c’est finalement le lieu où, de façon souterraine, se réinvente la haine de classe, le lieu où commence à se briser le consensus du CNR. C’est aussi le lieu où se recréé la haine des jeunes, si patente aujourd’hui. Le problème de mai 68, c’est qu’hormis les quelques points d’avancées (indéniables) dont je parle plus haut, il accouche d’un monde de droite, un monde de Réaction. Le simple fait que l’on s’enferme dans des débats où la morale prend tant de place le signale d’ailleurs assez bien: la droite a besoin de sa revanche. Souvenez-vous des discours de Sarkozy pendant la campagne. Comprenez alors que ces débats m’intéressent peu, ou pas plus que ça.
      Pour moi l’essentiel est ailleurs. Lucie Aubrac disait « le verbe résister ne se conjugue qu’au présent ». L’essentiel est dans la lutte pour un monde définanciarisé, un monde où l’on prenne véritablement en considération les gens, un monde où les gens puissent décider de leur destin. Il y a tant de lutte aujourd’hui que me pencher plus que de raison sur les frustrations de mes adversaires me paraît vain. Si je devais résumer les choses, je dirais que j’ai tué le père. Les soixante-huitards avaient tué la figure paternelle de De Gaulle. Je veux bien que ceux de ma génération donne le baiser de la mort à Cohn Bendit et à Sarkozy, ces deux représentants à leur manière du « joli moi de mai ».

  10. « 68 » c’est une explosion d’espérance et de liberté qui l’espace d’un instant délivre les hommes du boulet des hiérarchies et des conventions sociales. Je souhaite à tout peuple de pouvoir un court instant seulement parvenir à cette allégresse collectivement. C’est d’ailleurs la seule force qui les destine à ne pas crever sous le harnais.

  11. Excellent article ! Mai 68 a été aussi l’irruption de la parole dans une société cadenassée ,sous la coupe de l’ORTF…Quand on sait ce que représentait la radio pour un De Gaulle , il y avait de quoi être pantois .

    Le bonheur de parler , de se rencontrer , de s’écouter jusqu’à l’ivresse .

    « Parlez à vos voisins ! »

    On comprend ou on ressent le coté subversif de cette nécessité.

  12. La mode lancée par le Maître dit « il faut en finir avec 68 ».
    Au lieu de lancer de subtiles rhétoriques se regardant le bout de l’euphémisme, de la litote, du déni savamment ironisé, il vaut mieux, à mon avis, revendiquer 68, comme un moment où les anonymes se sont levés et on dit « Fini les ordres, fini le baillon; à nous la parole, à nous de nous organiser et de tenter de changer en bien ».

    Faut-il qu’ils soient bien aveugles, ou bien nantis, ceux qui coupent les cheveux et s’interrogent sur la pertinence des propos du Maître.

    Sarkozy et ses sbires, anciens casseurs fanatiques d’Occident, Madelin, Longuet, Devedjian et tant d’autres, n’ont-ils pas construit un pouvoir, une société si abominables qu’elle est en train de balayer toutes nos libertés, tous nos acquis, toutes nos espérances, au point de nous faire revenir avant les acquis de 36 ?!…

  13. Parfois les soit-disantes mises en perspective sont étranges.
    Car Mai68 jouit (et a toujours bénéficié) d’une image médiatique plutôt bienveillante même si le temps commence lui à donner une patine un peu vieillotte. Reste un fond de sympathie.

    Il arrive que quelques voix discordantes, dont certaines avec des arrière-pensées un peu primitives, j’en conviens- , arrivent à mieux se faire entendre , au bout d’un laps de temps assez considérable en portant un jugement autre.
    On voit alors apparaître d’habiles discours invoquant une sorte de prescription bienveillante, sous prétexte que ce serait presque éluder les problèmes actuels et leur origine (on peut d’ailleurs neutraliser pas mal de débat historique ainsi)

    Malgré toute la sympathie que j’ai pour Mai68 et ses éternels 20 ans, en y regardant bien , les citadelles qui ont été prises à cette occasion ont été remplacées par d’autres , et la résistance en forme de contre-pouvoir que les unes auraient pu opposer aux autres , ne s’est pas faite.

    Et malgré la sympathie pour les 20 ans des acteurs de Mai68, leur trajet personnel en demi contradiction avec leurs idéaux d’alors, leur participation active au travail de sape des fondements de la société par son atomisation , le tout drapé dans des discours anti-autorité , binaires, multi-culturels, mondialistes et pseudo-solidaire, m’apparaît bien.

    Certes il n’étaient au pouvoir, certes il ne sont pas responsables de tout, ni de l’essentiel. (Je note d’ailleurs qu’ils ne placent souvent à des endroits où l’irresponsabilité peut difficilement être remise en cause)

    Mais enfin le total des micro-dégats que leur idéologie a causé, notamment en France , est loin d’être nul et explique bien le délabrement de certaines institutions : la subversion et le bordel que leur idéologie a mis dans l’ education nationale , tout en en faisant perpétuellement porter la responsabilité sur d’autres , en est un bel exemple. Enfin, pour moi.

    Ceci dit, ce système de défense consistant à les faire passer pour des martyrs , dès que de temps à autres (ce n’est tout de même pas si fréquent que cela) on met le doigt sur leur contradiction , leur opportunisme et leur responsabilité , me paraît dérisoire, mais au fond il est révélateur.

    Et en disant cela , je ne confonds pas du tout Mai68, avec les luttes et mouvements sociaux qui ont eu lieu après Mai68, mais qui ont toujours existé avant et qui s’apparentent à un mouvement historique éternel d’émergence d’un homme plus libre acteur d’un destin commun.

  14. Le fait que Mai 68 soit toujours un sujet sensible prouve bien que les enjeux de la révolte sont toujours d’actualité et que les réactionnaires qui a l’époque condamnaient le mouvement n’ont jamais digéré leur défaite (relative) et que leur pire cauchemar serait une redite – et un approfondissement – de cette « révolution manquée »…
    Pas un curieux retournement de situation, on essaye aujourd’hui de faire passer les dégâts sociaux du néolibéralisme pour les effets pervers d’une « idéologie de gauche » (« laxisme », « perte des valeurs », « refus de l’autorité », et tutti quanti). En fait, les conservateurs de la vieille école ont reçu le soutien inattendu de « néo-réactionnaires » plus jeunes et plus frustres qui apparemment liquident leur Oedipe en dénonçant la révolution de papa-maman.

    1. Qui à laissé s’installer le néo-libéralisme, hmmm?
      votre discours a 40 ans de retard, au moins…:)

    2. Je précise: de mon point de vue, le néolibéralisme est plutôt une réaction conservatrice à Mai 68 (même si ce n’est pas seulement ça), avec récupération et détournement des thèmes « libertaires » qui pouvaient l’être.

    3. Reagan et Thatcher étaient des marionnettes. Mais poussez votre réflexion plus loin: qui à mis en place la dérégulation en France? Qui à été le plus farouche adversaire de l’héritage Gaulliste?

    4. Ma réflexion est la suivante.
      Mai 68 est un mouvement de contestation à la jonction de deux types de critiques anticapitalistes développées dans les années 60 : 1. Une critique sociale, issue des syndicats et des mouvements de gauche, axée sur la dénonciation de la redistribution inégalitaire des revenus, notamment au sein de l’entreprise, et qui vise à une répartition plus égalitaire des richesses au sein de la société. 2. Une critique culturelle, issue des milieux intellectuels et des mouvements associatifs, axée sur le caractère « inauthentique » de la société capitaliste, facteur d’aliénation des individus, et qui vise à promouvoir des valeurs d’épanouissement personnel (autonomie, créativité, sexualité libre, etc.) et à défendre les droits de catégories discriminées (droits des femmes, des minorités, etc.). Cette critique sociale a de fait déclenché une « révolution des mœurs » qui a radicalement transformé la société et les rapports entre individus.
      Le néolibéralisme est un mouvement de refonte du libéralisme, qui vise à promouvoir l’ordre du marché et le principe de la concurrence dans toutes les sphères de la société. On peut dire grosso modo qu’il a été élaboré dans les cercles universitaires et les think tanks de droite (syndicaux patronaux, etc.), qu’il s’est diffusé via les médias auprès du grand public, et qu’à partir des années 80 un certain nombre de ses « recettes » ont été reprises et appliquées par les grandes entreprises internationales et les directions étatiques et paraétatiques (gouvernements occidentaux, Commission européenne, institutions internationales type FMI, etc.).
      De ce qui précède, on comprend tout de suite que l’« esprit de Mai » et le néolibéralisme sont des mouvements qui n’ont rien à voir entre eux, qu’ils sont fondés sur des présupposés et des objectifs radicalement différents et que, surtout, du point de vue historique, ils n’ont pas été portés du tout par les mêmes acteurs sociaux. Que par la suite le PS, par exemple, se soit rallié au néolibéralisme alors qu’il était au pouvoir (en 1983) n’invalide en rien, de mon point de vue, la pertinence des critiques anticapitalistes portées par Mai 68. Dieu merci (si je puis dire), le PS n’a pas le monopole du socialisme !

  15. Peut-on comparer la situation actuelle à mai 1968 ? Je crois que non…d’un point de vue démographique la France d’aujourd’hui est nettement plus âgée et peu encline à se révolter : les retraités ne veulent pas de mai 1968 c’est clair et net…et ce, malgré un taux assez important de retraités ayant des difficultés à joindre les bouts…autre point ;: en 1968 les jeunes semblaient être plus politisés qu’aujourd’hui mais c’était l’époque qui voulait ça. Il fallait en quelque sorte choisir : être apolitique était quelque chose de très rare et enfin, n’oublions pas que mai 1968 est parti du fait que les étudiants de Nanterre voulaient accéder aux dortoirs des étudiantes…chose anecdotique somme toute a posteriori.
    Néanmoins, disons que depuis le début de ce siècle, on connaît un mini baby-boom…les révolutions sont étroitement liées à la démographie…rien que la révolution française : la population française avait fortement crue depuis la mort de Louis XIV…la France commençait en quelque sorte sa transition démographique…on peut espérer qu’en 2020, il se passe quelque chose…
    Enfin, on doit signaler que le principal foyer insurrectionnel en France se situe dans les banlieues (ensuite dans les régions rurales et désindustrialisées)…en ce qui concerne les banlieues, on peut dire que les phénomènes de délinquance ne permettent pas une telle explosion…la délinquance canalise le tout…Il faudrait que les jeunes de banlieues s’émancipent des phénomènes de délinquance qui ne concernent en fin de compte qu’une minorité…mais l’état a toute les raisons de laisser la délinquance régner…ça l’arrange en fin de compte…

    1. Les jeunes de 68 sont les retraités conservateurs d’aujourd’hui. Quant aux banlieues et à leurs habitants, leur demande principale est d’avoir une place normale dans la société, pas de la remettre en cause.
      Si on peut qualifier les évènements de 68 de « révolution », c’est surtout parce qu’à l’époque, ce mouvement était universel et englobait la problématique communiste et tiers mondiste.
      Ce qui s’est passé localement (en France) fut une aimable fête ou à part quelques enragés, chacun gouta au plaisir de contester l’autorité jusqu’à ce que le bordel fut assez grand pour générer une réaction du pouvoir. Après, basta, tout le monde en vacances.

      Tu parles d’une révolution…

    2. Mai 68, une pseudo-révolution d’une génération bourgeoise en mal d’ennui et trop heureuse de faire la moue à papa et à maman … une farce !

    3. Demander à avoir une place normale dans la société est déjà une forme de révolution ou du moins une prise de conscience. Que doit être la révolution de demain ? C’est peut-être se battre pour conserver des acquis sociaux, se battre pour que les lois, la constitution soient respectés, ce n’est pas forcément tout casser. La révolution de demain sera peut-être un conservatisme mais elle doit permettre de suivre l’intérêt général…être révolutionnaire aujourd’hui c’est peut-être vouloir conserver sa dignité.
      Mai 1968 aurait pu déboucher sur la chute du pouvoir en place mais le PCF était très réticent à l’idée de devoir assumer le pouvoir, il voulait que De Gaulle reste en contrepartie de quelques avantages sociaux et non des moindres (pour pouvoir garder la tête haute devant les syndicats. Et puis, la France même si elle présentait quelques signes de faiblesse (début de la hausse du chômage entre autres choses) était encore dans les trente glorieuses. La majorité ne souhaitait que quelques avancées sociales et les jeunes une certaine « libéralisation » des mœurs.
      Ne jetons pas tout de ce mois de mai 1968

  16. Les anciens combattants nous parlent.

    Excusez moi, je n’ai aucun respect pour ce combat là. Jouir à tout prix? On à vu les effets par la suite.
    Plus sérieusement, ce ne sont pas les élites de 68 qui sont en cause, mais toute cette génération donneuse de leçons qui n’a su que détruire une fois installée au pouvoir. Résumons: L’éducation est devenue un non sens, vive la méthode globale et le remplacement des professeurs par des sachants communiquants, la marchandisation des corps et la pornographie, l’éviction de l’altruisme au profit du tout marchand, l’égoïsme forcené appelé individualisme, le rejet comme ringard de toutes les solidarités anciennes…

    tout cela était possible à une époque ou on n’avait plus faim, ou l’avenir était illimité.

    Mais cette période de prospérité n’était qu’un accident de l’histoire, et la lutte pour la survie à vite repris le dessus.

    Je note aussi une grosse réflexion sur les médias et leur pouvoir, qui aura permis à tous ces apprentis révolutionnaires de retourner l’outil et d’en faire une machine à abrutir sans nulle autre pareille.

    Et puis cette belle génération dans ses choix égoïstes à bien entendu condamné toutes celles qui suivent. Sachez le, après que les baby boomers auront pris leur retraites (à nos frais), ce système n’existera plus.

    Le choix du chômage de masse des années 80 est un autre cadeau de ces braves gens. Tout plutôt que de remettre en cause leurs « privilèges ».

    Et ça vient nous faire la morale…

    1. C’est un peu la trajectoire des maoistes devenus libéraux… et Yves Montand finissant à la télé dans « vive la crise ».

      Moi j’ai des souvenir de réunion de MLF et d’avortements clandestins… je ne sais pas où, mais de temps en temps, on retrouvait un foetus qui se baladait, dans un bocal sur une étagère… dans un placard.

    2. Roland
      Vous semblez croire que la société, en 68 ou plus tard, est unanime…
      En mai 68, quelque milliers d’étudiants et surtout quelques millions de travailleurs ont contesté le système. Ils ont perturbé l’ordre 40 jours mais, après peu de temps, les patrons, de Gaulle et sa police, et la majorité des Français, frileuse ou paniquée, ont repris les choses en main. Les inégalités et injustices que vous dénoncez à juste titre n’ont rien à voir avec les espoirs de cette époque. Même si des opportunistes ont retourné leur veste et rejoint les cohortes de l’ordre moral et économique, il en est resté (proportion indéterminée) qui ont gardé leurs idéaux, toujours pas réalisés à ce jour…
      Ne les mettez donc pas tous dans le même panier…

    3. Alain, il y a ce qu’on croit, et je ne prétends pas être objectif ou consensuel, et puis il y a les faits, tout ce qui s’est passé depuis. Sans recul, on peut penser que bien des aspects de mai 68 sont sympathiques, mais bien des sujets pensés comme des réponses à l’oppression d’alors ont abouti à des renoncements bien pires que le statu quo ante.

      Je le constate à regrets et avec une certaine colère lorsque les tenants de ces idées d’alors font aujourd’hui dans la semelle cloutée. Ne perdons pas cela de vue.

    4. Merci pour votre participation.
      La France aujourd’hui souffre d’une absence de mixité de sociale.
      Pourquoi ces vieux soixante huitards, si généreux ne la pratiquent-ils pas, notamment en mettant leurs enfants en école publique ? La faute à Sarkozy, je vous dis.

  17. « …Il s’appuie sur la dénonciation de ces militants de cette époque qui se sont ensuite retrouvés en vue dans des métiers de la communication (pour la plupart)… »
    cher F. Leclerc,
    ce n’est pas la première fois que j’entends cette antienne mais pouvez-vous me dire qui sont ces fameux militants reconvertis en hordes dans les métiers de la communication ?
    Etes-vous sûr de ne pas ajouter à la confusion en reprenant cette affirmation ?
    Mediapart avait publié à l’occasion du 40ème anniversaire de mai 68 une série d’articles très intéressants qui prend tout-à-fait le contre-pied de cette affirmation qui me semble plus relever de la désinformation qu’autre chose.
    http://www.mediapart.fr/journal/culture-idees/210308/a-la-recherche-des-vingt-deux-du-22-mars-1968.
    Si vous parcourez ces articles vous verrez que les vies de ces militants après 68 sont très éloignées de ce que prétend cette antienne.
    Pouvez-vous nous apporter des précisions sur cette information (ou désinformation) ?

    1. Je ne raconte pas d’histoires mais je ne vais pas donner de noms !

      Vous avez raison de rappeler le destin de tous les autres, qui se sont éparpillés dans toute la société, perdus de vue à peine s’étaient-ils rencontrés.

    2. Une chose est sure cependant: les « faiseurs d’opinion » sont quasiment tous d’anciens soixante-huitards qui ont pas mal retourné leurs vestes depuis.
      Je ne vois pas en quoi quelque chose que tout le monde peut constater tous les jours en allumant sa radio ou sa télé ajouterait à la confusion. Je pense que les choses sont, au contraire, très claires.

    3. les faiseurs d’opinion ne font que l’opinion de ceux qui le veulent bien. Ce qui semble être votre cas, Roland…

    4. à F. Leclerc,

      Vous ne donnez pas de noms et n’apportez aucune précision… Il me semble quant à moi que ces pseudos hordes de militants reconvertis en masse dans des entreprises de communication n’ont été que des hordes de suiveurs panurgiques…

    5. Non non, Jean Luc, ils m’énervent juste, quand j’ai le courage d’écouter leurs élucubrations. Ce qui ne se produit pas tous les jours, rassurez-vous. Je tiens à ma santé mentale 😉

  18. J’ai oublié dans mon inventaire le psy show voyeuriste qui permet de culpabiliser tout le monde à propos de n’importe quoi, les charlatans se faisant appeler « experts » de nos jours…

    1. Le néo libéralisme a quelque chose de libertaire dans son refus absolu de toute règle (concernant le business, cela va de soi).
      Lorsqu’on dit à un QI de 70: « enrichis toi », en général il traduit par « entube les autres ».

      Reagan et Tatcher sont à ce titre des avatars de la pensée soixante-huitarde qui avait préparé le terrain de l’individualisme cynique.

      Lorsque des acteurs reconvertis ou des poissonnières accèdent au pouvoir de haut niveau, c’est qu’au préalable la conscience politique du peuple à été annihilée.

      La dérégulation est aussi contenue dans l’esprit de 68, qui est aussi une remise en cause profonde de l’état (en général, pas qu’en France). Je pourrais citer également la volonté de globalisation, le supranational (pour moi l’idée d’Europe fédérale prend réellement corps en 68)

      Pendant ce temps là, tellement occupés à améliorer leur bien être et à faire la métaphysique des questions existentielles, les gens n’ont pas vu les choses se dégrader.

      On en est toujours là…

    2. Roland, imaginez que mai 68 soit resté histoires de lit dans la Sorbonne, la contrerévolution libérale n’aurait-elle pas eue lieu? ce qui a suivi se serait sans doute composé selon d’autres modalités… oubliez mai 68…

  19. Il y a plus urgent que Mai 68. Le backlash que l’on vit depuis l’époque Reagan et qui s’accélère ces jours-ci sur fond de crise: scrutins électoraux ici et là totalement bafoués avec cette fois-ci l’appui des Occidentaux et même (surtout?) de l’Onu: la mascarade Karzai bien sûr; la suite de la mascarade irakienne. Mais avec l’internet l’information circule mieux qu’elle ne circulait. Jusqu’à quand sera-t-on traité de « radical » ou s’entendra-t-on dire que « Marx soutenait le terrorisme » ? Combien de temps devra-t-on encore supporter les têtes couronnées et l’infaillibilité papale ? 68 fut une révolte contre l’ineptie que représentait le patriarcat. Hélas, dès que ces messieurs sont montés dans la hiérarchie professionnelle, le naturel est revenu, et au galop !

  20. A l’occasion de Pâques…

    http://www.youtube.com/watch?v=ty8CCHicF40&NR=1

    Et surtout la 2è partie il y a de quoi pleurer ? sans doute car toute cette force et cette beauté restent enfermés en chacun, dans l’âme de chacun avec si peu de traduction dans le monde réel, comme un bourgeon…

    Tout le monde devrait apprendre un instrument

  21. Entièrement d’accord avec votre analyse. 42 ans d’attente pour qu’évolue enfin le monde vers la solidarité et la fin de l’exploitation de l’homme par l’homme, voire de l’animal par l’homme ou du végétal…
    Nous devons aller plus loin, plus haut. Et pour cela, cogner plus for au niveau des arguments ou autre, pour y parvenir, enfin!t!

    1. est ce que dans votre société idéale, le fait de profiter d’un petit lopin de terre sur lequel on exploite sans vergogne quelque légume et sur lequel on séquestre un poulet ou deux fait des gens des criminels ? juste par curiosité…

    2. @ Von den Blob

      Réponse:

      En tout cas, nous ne sommes pas totalement innocents face aux êtres et à la nature, ni vous, ni moi… si vous voyez ce que je veux dire, dans une société qui aurait tendance à mettre les criminels d’un côté et les « innocents » de l’autre pour tout simplifier… c’est commode pour se dédouaner, se déresponsabiliser totalement… je pense que nous devrions calculer au plus juste les pertes en vie (des êtres, des animaux, des plantes) et qu’à moins de cela, nous nous comportons en barbares.

      Même si je n’ai pas dit que j’établissais une égalité totale entre les « règnes », il serait temps que l’homme dominant se pose la question des « règnes » (mot paradoxal) qui souffrent sous son joug… dont celui des femmes visiblement, si j’en juge par son mode de réflexion logique à travers le monde et de comportements à son égard… nous avons aussi été associées à des bêtes pendant longtemps, n’est-ce pas? Alors la bête rugit, enfin.

      L’essentiel n’est pas dans la pensée, mais dans les actes… Mais c’est aujourd’hui certain, l’homme pense peu et agit beaucoup… trop vite.
      Quand je vois la société chinoise (mais notre société n’est pas mal non plus, avec les animaux, les enfants, les femmes…) ébouillanter des chats vivants, ou l’Inde exploiter des enfants de 3 ans… je ne me trouve pas fière d’appartenir à la race humaine, certainement…
      Et je souhaite vraiment voir évoluer les choses et surtout, voir s’élever le débat, enfin.
      C’est pourquoi je propose toujours qu’on écoute un peu plus la deuxième moitié du monde, qui tisse un autre contact à l’enfant, à la bête et à la plante, mais qui est condamnée la plupart du temps au silence!
      Mais je vous l’accorde, tous complices pour le moment…

      A vous de voir après tout si vous vous sentez bien en ce monde… si la façon de mener les affaires vous semble la plus logique qui soit… et la plus humaine au sens général… et pas seulement tournée vers l’homme. Je ne suis pas « humaniste »au sens traditionnel du terme… les « humanistes mettent l’homme au centre de l’univers comme des enfants, ils ont oublié tout ce qui va autour, mais ils avaient au XVIème siècle, des circonstances atténuantes en ce début des temps « modernes », aujourd’hui, il me semble que nous en sommes plus loin…

      Une chose est d’ironiser, une autre d’inventer. Le mieux serait les deux à la fois. J’attends avec impatience et curiosité de connaître votre propre vision du monde.
      A bientôt j’espère.

  22. On peut toujours regarder Mai 68 sous l’angle français et se demander qui des étudiants, du Gaullisme, des séquelles coloniales (rapatriant beaucoup de gens et rebrassant) est l’oeuf et qui la poule.

    Mais il y a eu coïncidence , sans grande causalité directe autre que le baby boom et la guerre froide, avec des évènements mondiaux.

    On peut donc soupçonner une cause externe commune. Elle est évoquée par touche dans l’article : quelques bouleversements techniques ! On peut se téléphoner, piquer la voiture de papa plus facilement qu’en 1937, on peut écouter la radio (la télé n’a pas encore fait une empreinte si profonde en 1968, les cinémas étaient fréquentés). Et la contraception qui commence.

    ON est donc dans un monde qui est encore celui de l’écrit pour l’esprit et l’intellect (cela s’effritera dans les décennies suivantes, et le reagano-thatcherisme rendra les gens plus individualistes) , mais qui accède à une parole collective nouvelle par la radio.
    On se retrouve donc un peu dans les situations de transition comme la montée des sophistes au Ve siècle grec, en même temps que des Socrate et Platon. On expérimente un nouvel âge de la parole à la fois par son côté « libérant » et quasi instantanément par son côté « poison » (pharmaka). A l’époque du « miracle grec », c’est pour casser les « dèmes » (les seigneuries locales ) qu’une pensée se hisse vers l’universel, et arrive à montrer qu’on peut faire fi des « croyances » « irationnelles » (ils ne pensaient pas comme nous, ces mots son piéés, mais ..) , quasiment en bloc. Et c’est illico que les sophistes « montrent » qu’on peut raisonner pour dire le bon « buzz » qu’on voudra, ce qui plaira au dernier salon à la mode, et potentiellement n’importe quoi si on les paye, ou si là les poussent leur goûr de l’art.
    Chaque conquête d’un espace de pensée ou d’un support de mémoire ou de transmission s’est accompagné d’un phénomène « haut-et-bas » ou « remède-et-poison » analogue.

    Je suggère donc ici que Mai 68 ne fait pas exception. Libération d’une tchatche de remise en cause qui échappe aux deux blocs de la guerre froide, capacité d’avoir un bouclage (feedback) par la radio quand même, tous les éléments me semblent en place et expliquent un tant soit peu la floraison mondiale de Mai 68, à partir d’une situation devenue métastable, avec aussi la démographie, la réalité plus pesante de l’homme unidimensionnel comme destin promis du cadre moyen, de la consommation en plein essor (et les « débutants » qui rencontre la chose à son stade « faible » en voient souvent mieux les perversités que ceux qui arrivent dans le magma en décomposition bien avancé).
    Bien sûr les inepties comme celles par exemple tirées du freudisme de bazar (voire des mauvais morceaux du vrai) profiteront de l’aubaine ; on tuera un père, certes, mais ce filon là me semble très très peu spécifique de 1968. Dix ans avant, ce n’était pas pareil ? Juste une question d’instabilité, dira-t-on, mais je demande alors qu’est-ce qui a fait effet de seuil, sinon cette double dynamique d’accès à une parole s’insérant dans une « boucle à gain » via les nouveaux médias et le rajeunissment de la société, d’une part, et d’autre part, l’incapacité intrinsèque à la faire agir (« protendre ») vers un but précis (incapacité du même ordre que celle des sophistes, mais eux en étaient en quelque sorte « conscients », tout en en faisant un art) , cette part de dériver étant ce qui permet aujourd’hui de vilipender à assez peu de frais les dérives de l’époque.

    Je n’y avais pas pensé plus que ça avant… Désolé de la construction un peu faible du raisonnement.

  23. Comme les mouvements marxistes, altermondialistes et syndicalistes sont trop encrés dans l’extériorité, Mai 68 était trop encré dans l’intériorité. Quand Intériorité et Extériorité seront Yin et Yang l’un pour l’autre, alors seulement l’homme pourra entamer une nouvelle voie de sortie du piège existentiel capitaliste. http://www.fondationdiagonale.org

    Unir sans confondre, distinguer sans séparer…

    Si la logique en place est si tenace, c’est peut-être que quelque chose au fond de nous même y collabore – quelque chose qui participe de l’angoisse et du déni de notre condition d’humains. Les voies de sorties, les plus pertinentes de l’économie capitaliste ne sont donc pas économiques. Elles sont existentielles. [Christian ARNSPERGER] Critique de l’existence capitaliste, Pour une étique existentielle de l’économie

    1. Si le vaisseau ne tient qu’à une ancre, le mouillage n’est pas sûr.
      Mimes, I, 41-42
      Citations de Hérondas

  24. Ayant eu 22 ans en 1968, j’ai assisté à un dépoussiérage plus que je n’y ai eu cru, car quelques années avant, lycéen au « quarlat » à l’occasion de l’Algérie, et des accords d’Evian, les militants dont je faisait partie pour l’indépendance Algérienne s’étaient bastonnés avec les néofascites d’Occident, qui eux ne tiraient pas à blanc.
    En 1968, et donc peu apres des vrais combats sporadiques ou l’OAS et l’extrème droite s’illustrerent aveuglément, débute à Nanterre ce necessaire dépoussièrage d’une société confortable mais « Radotante », Le PCF n’a pu comprendre et relayer des troubles étudiants à la lueur de la lutte des classes, ainsi bien entendu que ces troubles échappaient aux rescapés de l’ordre de la libération escortant De Gaulle et qui ne voyait au quartier latin qu’un excéssif monome.

    Je rejoins François Leclerc sur l’idée que bien des portes drapeaux,dépoussiéreurs de 1968 aient pu devenir avec bonne conscience les soubrettes d’une société qu’ils avaient cru inventer, les cols Mao ne pouvaient épater que ceux qui croient au bal masqué, en revanche à travers la libération de la femme, fut semée la question de son statut social, et cela n’est pas un mince détail.

    1. Une perle et une tradition de notre beau pays la FRANCE … l’agriculture
      C’est dramatique et surtout tout un symbole d’une mondialisation ravageuse.

    2. Merci Thomas
      Moi aussi j’avais demandé des chiffres concernant les suicides en France par catégories socioprofessionnelles, car on ne parle que des suicides de France Télécom.
      Les autres n’apparaissent pas : particuliers ruinés, commerçants, artisans………..
      Combien pour l’année dernière ?
      Donc nous avons déjà 800 agriculteurs.
      800 de trop hélas !

    3. @ Merou

      Effectivement, Claude Bourguignon sait trouver les mots pour parler du sol, sa soeur est l’actrice Anémone, assez sensible également à ces questions.

      @ Reveil

      En fait, le temps poursuit chez nous son travail de destruction systématique des savoirs faire régionaux, des traditions orales, de la diversité des productions, comme c’est le cas absolument partout sur terre. Mais ce n’est pas une fatalité, chacun peut agir la dessus simplement.

      @ Louise

      C’est vraiment réconfortant de lire vos posts.

  25. Bonjour les anciens!
    En 68, j’étais au lycée à neuilly. j’arrivais de province ( pas loin de chez Paul!) J’avais de très bons professeurs , le différentiel de niveau par rapport à mon ancien lycée était phénoménal et je pensais souvent à mes copains qui, chez moi, n’avaient pas la chance d’avoir de si bons profs. C’est pourquoi je ne pouvais pas adhérer à toutes ces revendications de fin des cours magistraux etc…pour moi exigences impudentes de grands privilégiés qui ignoraient leur chance… je n’avais pas de conscience politique alors et je suis resté en dehors. En fait j’ai fait mon mai 68 en 72/73 en médecine :les manifs n’ont pas cessé fin mai 68 , le mouvement initialisé a perduré…

    En juillet 68 comme chaque année depuis mes 16 ans je suis allé travailler à la chaîne dans une usine. Stagiaire 45h/semaine=800 francs de l’époque…Beaucoup d’ouvriers que je connaissais depuis mon enfance m’interrogeaient sur les raisons de ce qu’ils appelaient des conneries et m’exhortaient vivement à bien étudier et à ne pas faire le con avec les autres: ils acceptaient bien volontier de payer des impôts pour que tous puissent faire des études et entendaient donc que l’on respecte leur contribution, que leurs efforts ne soient pas gaspillés.

    L’impression dominante qui me reste de cette période c’est la volonté de la satisfaction immédiate des désirs; d’ailleurs
    l’apostrophe de Cohn Bendit à Schuman à nanterre à propos des problèmes sexuels des étudiants reste un des moments très fort du lancement médiatique du mouvement et, à mon avis en exprime le vrai fond.
    je ne dirai rien de l’évolution des moeurs consécutive mais, puisque le sujet majeur de ce forum c’est l’économie, il me semble que c’est bien à partir de là qu’il y a eu, en france, un changement d’attitude radical par rapport au crédit qui a ouvert un boulevard à la consommation de trucs et de machins.
    Marcel Duchamp l’ avait bien compris alors et disait que le dernier lieu de l’érotisme était désormais le supermarché et que la carte de crédit était la pute qui monte l’escalier en tortillant des fesses pour ne pas laisser le désir s’éteindre.
    Avant l’attitude était généralement d’attendre d’avoir les fonds nécessaires pour procéder à un achat d’importance. A partir du moment où l’hybris d’avoir tout tout de suite est débridée, il ne faut pas s’étonner de voir les capitalistes sauter sur l’occasion.
    Des revirements et fidélités des uns ou des autres qu’importe! Des idéologies, on voit bien leur obsolescence… Restent les vieux schémas du comportement humain qui ont la vie dure:
    sexe,argent, pouvoir:trinité princesse de ce monde que seul le projet de l’humain rêvé et énoncé par toutes les grandes traditions peut faire évoluer…
    Cordialement.

  26. Bien envoyé ça ! Coupables de n’avoir pas réussi ! Coupables de n’avoir pas su motiver suffisamment les foules !

    Coupables de n’avoir pas eu de projet suffisamment structuré d’une société de remplacement ?

    Et nous ?

  27. Personnellement, je me trouvais en Belgique et il n’y régnait pas du tout la même ambiance.
    Ce que je pense de Mai 68 ? Une histoire de petits qui se sont rendus brusquement compte qu’ils n’y arriveraient pas ! Pour plusieurs raisons ! Pour réussir des études universitaires, il faut être doué, il faut être intelligent, studieux et persévérant ! Tous ceux qui n’avaient pas ces qualités se sont retrouvés avec bonheur dans le groupe des contestataires qui préféraient manifester comme un système que contre leur paresse ou leur incompétence personnelle ! Quelques bavards en ont réchappé et ont même fait carrière comme cet inutile de Cohn-Bendit !
    Voilà, pour moi, à quoi se résume Mai 68 : une tempête dans un verre d’eau comme on aime à le faire en France, du moins pour ceux qui se prennent pour quelqu’un : des nuls, la plupart du temps ! Le président actuel est un peu de ce style : je parle, je bouge, je passe à la télé, donc j’existe !

  28. Extrait de « non aux jeunes » de Pierre Desproges. Le texte intégral, que je n’ai pas besoin de recommander, est accessible sans difficulté sur le net.

    « Autant que la vôtre, je renie la mienne [ma jeunesse], depuis que je l’ai vue s’échouer dans la bouffonerie soixante-huitarde où de crapoteux universitaires grisonnants, au péril de leur prostate, grimpaient sur des estrades à théâtreux pour singer les pitreries maoïstes de leurs élèves, dont les plus impétueux sont maintenant chefs de choucroute à Carrefour.

    Mais vous, jeunes frais du jour, qui ne rêvez plus que de fric, de carrière et de retraîte anticipée, reconnaissez au moins à ces pisseux d’hier le mérite d’avoir eu la générosité de croire à des lendemains cheguevaresques sur d’irrésistibles chevaux sauvages. »

    1. Excellent.
      Oui, on peut leur reconnaître cela avec un mix d’idéalisme et d’égotisme.

  29. Il est curieux que vous dissociez le « microphénomène » de Mai 68 de la planète 68, la chaine d’évènements de 68: Printemps de Prague, ‘provos néerlandais’, Jeux Olympiques et Black Power, massacre d’étudiants de Tlatelolco, etc.

    Je souscris. pour ma part, à la conclusion d’Alain Ehrengerger à cet entretien avec Roland Gori sur LE MALAISE FRANCAIS: « Le drame français est d’être une société a-libérale dans un monde devenu libéral. Mais nous ne sommes pas condamnés au culte réactionnaire du passé. » comme je citerais Marcel Gauchet dans une interview récente, qui énonce le paradoxe suivant: « Le problème de la France est de regarder le monde non tel qu’il est est, mais tel qu’il devrait etre etre selon elle », à l’origine de nombreux cas de myopie, qu’une partie des « leaders » de mai 68 ‘symbolisera quelques années plus tard dans son refus de voir les fosses de la Révolution Culturelle ou celles des Khmers rouges, jusqu’à la défense par Michel Foucault de la Révolution iranienne, exhumée récemment par Slavoj Zizek ( « In Defense of Lost Causes », 2008 )

    http://hebdo.nouvelobs.com/sommaire/les-debats/090945/le-nouveau-malaise-francais.html

    1. …sur fond de l’opposition à la guerre au Viet-Nam sur les campus américains…et un peu partout.

  30. François Leclerc, autant je suis d’accord pour convenir avec vous – ainsi qu’avec Paul – qu’il ne soit pas pertinent de considérer Mai 68 comme la source de tous les mots modernes (si je voulais faire dans la provocation, je dirais que c’est un détail de l’Histoire…), autant je suis plus dubitatif sur le parallèle que vous tentez d’établir avec la période actuelle. Pour être plus précis, je ne pense pas que la génération actuelle puisse reprendre « la lutte » là où les soixantuitards l’avaient laissé, et ce pour la raison suivante:

    La génération 68 sortait à peine d’une grande période d’opulence, et notamment, le chômage de masse était une nouveauté encore méconnue. Ajoutons à cela la sortie de la période colonialiste française – une période guerrière dans un contexte de conscription.

    La génération actuelle n’a pour sa part jamais connu autre chose que le chômage de masse à l’exception de quelques rares, faibles et courtes embellies, tandis que les quelques guerres auxquelles la France se hasarde encore à participer soient habillement présentées comme des « opérations de paix », menées au moyen d’une armée professionnalisée – les individus qui y participent en ont fait le choix.

    En définitive ce n’est pas tant la violence du « choc » dans l’absolu qui importe – il serait au demeurant complexe d’établir une comparaison correcte entre la crise initiée en 2007 et le contexte de la fin des années ’60 – mais plutôt ce que ce choc implique comme changements par rapport à la période immédiatement précédente.

    En l’occurrence il me semble que la crise à laquelle nous assistons demeure relativement indolore pour la jeunesse actuelle, parce que celle-ci n’a jamais vraiment connu autre chose. Cela fait maintenant plus de 30 ans que nos têtes sont farcies de « contextes économiques difficiles ». C’en est un de plus. Pas forcément « celui de trop ».

    1. Je n’ai pas eu l’intention d’établir un quelconque parallèle, le contexte a en effet à bien des égards changé !

      Je me suis contenté de dire que sur la base d’un fait nouveau, la crise actuelle, l’instruction peut reprendre, ayant peut être sacrifié à l’attrait de la formule.

    2. « Celle-ci, que nous vivons sans encore trop y croire tellement elle est invraisemblable, est sans commune mesure avec celle qui a tout déclenché à l’époque, allons-nous la subir chacun dans notre coin ? »

      J’admets n’avoir pas tenu suffisamment compte dans ma lecture de la phrase ci-dessus, qui suit celle que vous citez – à juste titre – Elle pondère effectivement votre propos. Ceci dit, vous êtes manifestement à la recherche d’un signe d’espoir. Mon pessimisme viscéral m’incline à n’en voir aucun.

  31. Je suis surpris du nombre de mes contemporains sur ce blog qui donnent l’impression de vouer une haine inextinguible aux « évènements » de mai 1968….
    Ne sont pas forcèment conservateurs ceux que l’on croit !
    Si on ne s’attache qu’à la vingtaine d’exités de socio nanterriens c’est sûr que le « mouvement » est une bonne tranche de rigolade qui n’a accouchée que de Giscard et son accordéon. Il me semble que tout celà a été cependant un « déclancheur » pour des mouvements sociaux d’une ampleur et d’une radicalité qui n’avait pas été vue depuis 15 ans.
    Les chars de Massu étaient dans le bois de Vincennes, tous les centraux téléphoniques et relais télé gardés par l’armée avec ordre de tirer. Si toute cette aventure n’avait été qu’un aimable monôme un peu agité rue gay-lussac, je ne pense pas que le pouvoir aurait autant paniqué.

    1. Il ne faut pas mélanger les évenements du quartier latin, et une situation pré-insurrectionnelle qui pouvait dégenerer des lors qu’ont commencées les premiéres grèves chez Renault et le soutien politique du PCF qui a trainé, le pouvoir mesurait bien ce risque social des lors que l’appareil du PCF se méttait en branle, la neutralisation de ce risque donnera lieu aux négociations sociales des accords de Grenelle.

      Il n’en demeure pas moins qu’il y a eu, et vous avez raison d’en parler, un flottement du pouvoir pendant les jours ou De Gaulle avait disparu voir Massu à Baden Baden, manifestement le régime ne comprenait pas ce qui se passait ou pouver se passer. La possibilité d’un effet Domino de la rue Gay Lussac vers les fondements du régime pouvait exister, d’autant que des groupuscules armés d’extrème droite survivaient encore depuis l’indépendence Algérienne et avaient juré d’avoir la peau du vendeur de l’Algérie: De Gaulle.

      La 5 éme république n’a tenue que grace à l’appareil des communistes qui ont controlé l’appareil de production en état, fidéles à Moscou approuvaient les accords d’Evian et d’autre part à la manifestation inattendue de soutien à De Gaulle, cortége symbolique qui descendit les champs élysés redonnant à ce dernier une sorte de légitimité de la rue.

      J’ai encore en mémoire, étant moi mème étudiant aux Beaux arts, de l’action roublarde qu’entreprit Edgar Faure auprés des étudiants pour désamorcer leurs revendications aprés l’été; lesquels se sont laissés rouler par Edgar qui n’avait qu’un seul objectif: les diviser, casser leur unité contestataire.

    2. Vous recoupez sans le vouloir mes remarques d’il y a 24 h.
      L’époque était charnière en tant que les médias (audio + téléphone + TV) venaient de passer à une sorte de massification (en terme d’influence) tout en restant un peu artisanaux encore (donc à la portée technique d’une poignée d’illuminés s’ils s’en étaient emparé, d’où une protection, logique, par l’armée).

      Idem pour la fin de conscription.
      La fin de la « Guerre d’Indochine » n’avait pas pu accoucher d’un pareil effet une décennie auparavant.

      Epoque charnière entre emprise politique « classique » (comme le dit B Laget ci-dessous avec Edgar Faure encore roublard…) et irruption des ruptures média/consommation. C’est aussi un des thèmes dans le billet du 4 avril qui suit…en filigrane.

  32. L’argent fait sa loi

    Quelles belles Pâques… pour la finance ! Selon le « New York Times », les dirigeants des 25 plus grands fonds spéculatifs vont se partager 25 milliards de dollars sur leurs bénéfices de 2009. Grâce à la belle « générosité » (obligée) des contribuables européens et américains qui ont réamorcé la pompe après la crise de 2008. Finalement, pour que remarche le grand casino…
    Ce n’était, certes, pas le but des Etats. Mais ce constat prouve, s’il le fallait encore, que la politique ne contrôle pas la finance, et en rien. L’argent domine, dicte ses lois, creuse partout les inégalités et s’érige en tabou transcendant les règles les plus élémentaires de la démocratie. Des règles qui reposaient aussi sur la solidarité, donc sur la justice fiscale avec un impôt proportionnel aux revenus, quelle que soit leur nature. Il faut l’écrire au passé. Le « boucler fiscal » français le montre. Il va, dans son fonctionnement, jusqu’à prendre en compte des cotisations sociales comme la CSG pour encore mieux protéger les nantis, et paraît-il, favoriser ainsi l’investissement dans l’« économie réelle »… plutôt dans le « virtuel » de la spéculation.
    Cet exemple, d’ailleurs pas propre à la France, n’est pourtant que bagatelle en comparaison des deux mille milliards brassés par les « hedge funds », sans véritable emprise des gouvernements jusqu’à présent dans l’incapacité de prélever sur cette manne qui circule à vitesse électronique. Et s’attaque aux Etats, voire à l’euro, en s’en prenant aux plus faibles comme la Grèce…
    A cause de la mondialisation, du libéralisme débridé servi par des gouvernements conservateurs ? La gauche, ou le centre-gauche au pouvoir ici ou là ne font pas mieux. Le travailliste Gordon Brown défend bec et ongles la place financière de Londres, le très socialiste Papandréou fait peser tout le poids de la rigueur sur la population grecque. Une rigueur amorcée en Europe par le chancelier social-démocrate Gerhard Schröder sous le nom de « réforme »…
    Nos sociétés, autrefois industrialisées, ne le sont plus. Elles ont délaissé maintes productions pour la rente faite d’argent qui « fabrique » de l’argent à la place de biens réels… aujourd’hui importés. Et ce système s’emballe, exige toujours plus de fonds pour rentrer des fonds. Comment freiner cette machine infernale ? Une régularisation s’impose : elle dépend en premier lieu du bon vouloir des Etats-Unis. Une taxe sur les banques, intermédiaires et acteurs du système, fait son chemin : comme d’habitude, en ordre dispersé chez les Européens. Reste une forme d’« impôt » touchant vraiment tout le monde et que pourrait bien dicter le sacro-saint marché : l’inflation. Avec, il est vrai, également pour victimes les moins favorisés…
    Jean-Claude Kiefer

    1. Certes l’argent dicte ses lois: sinon comment expliquer le Vatican, l’Arabie Saoudite, et les actionnaires couronnées de la Shell ?

  33. Merci à François Leclerc pour son excellent billet. J’en apprécie d’autant plus la valeur qu’un post rédigé en dessous du « Temps qu’il fait » de Paul a été tout bonnement supprimé, je me demande pourquoi, à moins que…

    Je n’ai pas vécu mai 68 car j’étais à l’étranger. Quand je suis rentré pour les vacances début juin, il ne restait déjà quasiment rien de l’esprit explosif et festif, de la griserie qui avaient marqué le pic du mouvement, juste quelques tables de ‘littérature’ bavarde dans des recoins de la Sorbonne et au dehors. C’était le calme de la défaite. Il demeurait cependant dans l’esprit d’amis que j’avais temporairement quittés une propension à la logomachie et une certaine goguenardise d’avoir fait trembler la République. Point barre. J’ai mieux compris ce qu’avait signifié le mois de mai lorsqu’un dirigeant CGT de Renault Cléon m’a déclaré dans un train de banlieue: « Les étudiants? Chapeau! », tout admiratif qu’il était d’avoir vu se défoncer (et se faire défoncer: combien ont dû se faire transporter à Beaujon?) de multiples blancs becs ‘inorganisés’ face aux CRS, et que j’ai vu un préfet de la République refuser aux mêmes CRS l’assaut à la fac de lettres de Rouen encore faiblement occupée, alors que ces derniers rêvaient d’en découdre sur le tard à peu de frais. Un copain journaliste à Europe 1 m’a par ailleurs narré comment des gardes mobiles désespérés avaient tiré des grenades lacrymogènes jusque DANS les appartements de la rue Gay Lussac pour décourager (et punir!) leurs occupants de verser des seaux d’eau sur le canyon saturé de gaz en contrebas.

    Autrement, je n’ai rien appris. Personne n’était en mesure de m’expliquer quoi que ce soit. Ca avait ‘bardé’, c’est tout. Il y a bien eu quelques ‘débats’ d’amphis ouverts à tous les vents, mais dont la pauvreté est restée gravée dans ma mémoire. J’ai bien ressenti à cette occasion combien avaient suivi le mouvement sans en être acteurs et n’y comprenaient guère plus que moi, sauf le plaisir qu’ils ou elles avaient pris à jouir (au propre comme au figuré) de la déconvenue provisoire des bourgeois. La liberté sexuelle, ils connaissaient déjà, mais cette fois ci, ils pouvaient, s’y j’ose dire, s’en glorifier.

    Dans ma famille, par contre, quelle métamorphose! Des cathos pratiquants d’hier avaient été convaincus par leurs enfants de laisser leur foi s’envoler; leur monde, au moins, avait changé radicalement. Ce n’était pas encore la « permissiveness » si souvent dénoncée par la suite, mais on en voyait pointer les signes avant-coureurs. A la réflexion, je ne suis pas convaincu que ce bilan-là ait été particulièrement positif.

    Je n’ai rien, à proprement parler, à reprocher aux acteurs de mai 68. Je ne conteste ni leur objectif (liberté d’information, d’aller et venir, de pratiquer leur sexualité comme ils l’entendaient, entre autres choses) ni leur ‘méthode spontanée’ d’affronter leurs oppresseurs. Je me limite à contester la signification mondiale de leur mouvement. Car s’il en reste peu de choses en France, que dire de l’étranger?! Le printemps de Prague, la montée du pouvoir noir aux USA, l’assassinat d’étudiants au Mexique pré-olympique, celui de Martin Luther King à l’automne — sans compter les manifs d’étudiants américains clamant, avec la même innocence politique que leurs contemporains français, tabassés par des flics aussi bourrés de haine que leurs homologues français, « the whole world is watching! », comme si le spectacle changeait quoi que ce soit, fût-il disséminé par la télé aux quatre coins du monde –, il y avait d’autres grains à moudre! Et ces mêmes jeunes Américains finiraient bien, à quelques exceptions près, par être conscrits pour aller se battre au Vietnam. Mais le joli mois de mai était un phénomène exclusivement français, marqué par une vague sympathie (rien là de très nouveau sous le soleil: l’indignation montait vite dans les pourtours de St Germain des Prés depuis pas mal d’années, et, contrairement aux années de la guerre d’Algérie, on ne risquait pas grand chose) mais pas par un quelconque engagement au service d’une cause véritablement substantielle.

    C’est à peu près tout ce que j’ai à dire sur le sujet. Une mise en garde, toutefois: il n’y a pas eu de déperdition des valeurs morales à Paris du fait de mai 68, simplement la conviction amère qu’on ne peut pas grand chose contre le pouvoir organisé. Mai 68 n’a pas ouvert la porte à l’hyperlibéralisme, le mouvement ne voulait que plus de liberté POLITIQUE. Hayek précède d’assez loin ce mouvement, et je ne sache pas que le ‘maître’ de Vienne ait eu beaucoup de thuriféraires en France, ni même aux USA de l’époque. Non, la gabegie bancaire capitaliste ne doit rien à mai 68: ce n’est pas un crime de reconnaître que seul l’effondrement de l’Union Soviétique (et de ses allié(e)s) lui a ouvert grand les portes. Tout dépendait, et dépend encore, du rapport de forces. Et de ce côté-là, la France, aussi rétive qu’elle soit par certains aspects, pèse peu de chose. Décidément, comme disait l’autre, la nostalgie n’est plus ce qu’elle était. Et la capacité actuelle d’auto-organisation, encore moins. J’espère être mauvais prophète, mais j’y insiste: pour faire plier l’adversaire, il va bien falloir commencer par lui faire peur, et ne pas partir en vacances au mauvais moment, comme en mai 68.

    1. @ SIMPLESANSTETE

      Je n’ai pas un souvenir de ce film aussi ému que le vôtre. Je préfère d’autres films de Malle, comme Au revoir les enfants ou Lacombe Lucien. Malle était littéralement torturé par la mémoire de Vichy et de l’idéologie que véhiculait son gouvernement. Son regard sur la France était particulièrement aiguisé car il vivait une bonne partie du temps aux Etats-Unis. La distance permet de relativiser les choses, et surtout de peser ce qu’il y a de vraiment ‘universel’ dans l’expérience qu’on examine de loin (et, plus tard, de près). A ce titre, Malle a eu raison de voir en mai 68 une révolution intime et avant tout familiale.

    2. « le temps qu’il fait » n’a pas disparu, les vidéos sont rangées ailleurs, dans la marge à droite sous « vidéos »
      en 68, j’étais en CE2, donc en primaire, comme tous les enfants j’avais des copines et des copains avec qui j’étais en classe depuis au moins le CP, après la grève lorsque l’école a repris j’avais deux copines et un copain en moins,
      à l’époque, très sérieusement je n’ai pas du tout compris quelle lubie avait bien pu prendre leurs parents comme ça de les changer d’école, cela en mai, je les ai imaginé sans doute austères et si et là, mais avant tout cruels, (aujourd’hui encore, j’en pense toujours autant , sinon plus … )
      sur le reste, ce que j’ai appris de mai 68, je l’ai appris en esthétique, la philosophie de l’Art, et franchement c’était bien, (je comprends donc très bien que tout est été mis en ordre pour engluer ce mouvement, le réviser, le récupérer, le détourner…. cela jusque d’aujourd’hui encore vouloir l’affubler de tous les maux …. )

  34. Je suis enfant de mai 68, pour être né quelques mois plus tard.

    Humblement, je crois que les tares de son héritage sont l’hédonisme, le consumérisme et l’individualisme, qu’il aura consacrés, sans cependant les enfanter.

    A contrario, les vertus de cet héritage auront été, dans la tradition parisienne des révoltes populaires, qui est une tradition longue, de faire suffisamment peur à la droite pour l’empêcher de commettre en France les réformes libérales dont elle avait rêvé : ni Reagan, ni Tatcher pour la République ; Chirac se souvenait d’avoir dû négocier avec les syndicats un revolver dans la poche, et la troupe alentour de Paris pour recommencer 1871, s’il avait été nécessaire.

    Pour cela, Devaquet en 87 n’aura pas duré longtemps, 2005 dans les banlieues n’aura pas été meurtrier, et l’état social aura vécu et résisté dans l’hexagone plus qu’ailleurs.

    1. Intéressantes remarques sur les conséquences lointaines, que je n’avais pas eu l’occasion de lire jusqu’à présent.

      Un ajout qui me semble important : la plupart des post (et c’est aussi l’interprétation générale) considèrent que ces événements ont eu lieu en mai et à Paris. Il est bon aussi de rappeler que les événements les plus graves (3 à 5 morts selon les sources) ont eu lieu en Province, et plutôt en juin. Il s’agissait principalement de manifestations ouvrières (occupations d’usine…) qui n’ont pas bénéficié de la relative retenue observée à Paris, ni d’ailleurs du même écho.

      J’en profite pour recommander le livre de Eric Hazan, « l’invention de Paris », paru il y a quelques années, qui (parmi d’autres thèmes, car ce livre est riche) évoque sur un mode original les principales révoltes parisiennes depuis 1830. On y verra aussi, pour revenir à mon propos, la différence d’écho entre les émeutes « ouvrières », et celles qui ont bénéficié d’une assise sociale plus large.

    2. « l’invention de Paris »

      point n° 1267, et oui je l’ai. Je n’ai pas le temps de lire, c’est lire ou jouer Chopin.

      Mai 68, peut-être une révolution brouillée car les revendications étaient trop diverses, ce qui ne sera pas le cas la prochaine fois.

    3. @ Le sombre,

      la tradition des révoltes populaires de Paris appartient aussi à Nantes, à Lyon, et même se retrouve à Bordeaux pour ce printemps de 1968 ; la France, ce sont également des provinces, et des banlieues aujourd’hui. Des cadavres un peu partout ; des cameras germanopratines.

      @ Timitiota

      C’est possible. Cependant j’ignore ou oublie les théories d’E.T. dans ce registre et ces questions.

  35. @ Loréal

    Mai68 bénéficie et a toujours bénéficié d’une bonne image médiatique dans le système.
    La ‘haine’ de certains a toujours été ringardisée et considérée comme une opinion quasi-douteuse d’éléments réactionnaires complètement dépassés.

    Il se trouve que , le temps passant, certains bilans soient faits et que la mentalité renforcée par Mai68 n’ait pas eu toutes les vertus et les effets positifs qu’on lui prêtaient, et que même des liens se dessinent entre celle-ci et le Système.
    Mais aucune haine particulière dans cette remise en perspective , à ce détail près que , comme beaucoup de fois, on dirait que certains bilans sont irrecevables d’emblée et que le mécanisme de la bien-pensance qu’on critique en général , soit alors appliqué ici.

    Bref j’ai du mal a voir une tentative de ré-écriture de l’histoire et de persécution particulière à l’encontre de Mai68. Reste la tentative pitoyable d’instrumentalisation de Sarko : je ne pense pas qu’elle ait eu beaucoup d’efficacité , au contraire, mais elle est bien modeste et stérile comparé à la bienveillance des médias et aux interprétations qui font de Mai68 l’an zéro de la lumière et des luttes.

    Je rappelle – que malgré l’abominable dictature du fondateur de la 5eme république qui nous régit encore, il n’y a pas eu un mort imputable au Pouvoir en Mai68.

    – Que les mouvement sociaux ne datent pas de Mai68 non plus et que l’histoire ne commence pas là.

    – Que s’il est un discours à la fois mondialo-globaliste , individulisto-communautariste, néo-moraliste , destructeur de l’Etat Régalien pour en faire une machine à distribuer, pour la bio-diversité des communautés, mais pas celle des cultures, … c’est bien l’idéologie qui prend appui sur Mai68.
    Cohn Bendit en est une représentant typique.

  36. en recherche de dérivée ou parrallèle posssibles à « faites l’amour pas la guerre » (déclinée sur le mode « quand on n’a pas d’ontologie, il faut une déontologie »)????
    peut-être ces deux serments (en incluant des savants, économistes, et autres experts …) ???

    « ……
    Néanmoins, puisque les savants sont, par le biais de leurs découvertes, responsables du monde actuel, Michel Serres propose de leur faire prêter deux serments, forgés sur le modèle du serment d’Hippocrate. :
    l’un sur la finalité de leur travail (qui ne doit servir ni la violence ni l’accroissement de la misère, de l’ignorance ou de l’inégalité)
    l’autre sur leur rapport aux autres pouvoirs (la fameuse triade de Dumézil : religion, armée et pouvoir économique, vis-à-vis desquels les savants doivent demeurer parfaitement indépendants).
    …..  »
    http://www.canalacademie.com/ida5470-Temps-des-crises-de-Michel-Serres.html

  37. Et si cette occasion devait se reproduire dans l’histoire, quel en serait de nouveau le rôle de chacun dans la société où à la Sorbonne ?

    Quel en serait le premier devoir du politicien, de l’idéologue, du bureaucrate, de l’agent de police, du travailleur, de l’étudiant, de l’ouvrier, du patronat, du médecin, du journaliste, de la vieille dame promenant son petit caniche ou son grand dogue allemand dans la rue ?

    Non ça je ne l’ai jamais vu de la part d’une vieille dame, il faut donc que je trouve autre chose en plus c’est l’heure du diner il faut que je me dépêche, comme tout le monde d’aller boire et manger, boulot, métro, dodo.

    Et puis après on recommence, encore et encore demain, après-demain, pourquoi on vit, pourquoi on rit, pourquoi on pleure, pourquoi on meurt, pourquoi on travaille corps et Ame, et toujours pour des mauvais Maîtres en plus, mais quel progrès ?

    Mais de quoi donc avons nous le plus peur de perdre, de l’argent, un travail, une position, notre petite vie bien confortable, oui pourquoi en vouloir toujours aux gens de 68 Mr le Président ?

    Mais toi qui lira peut-être ce blog à l’avenir, tu peux pas comprendre, tu n’étais pas bien né dans les beaux quartiers de Neuilly ou alors dans la cité.

    Rien n’est jamais mort, si nous le voulons vraiment nous pourrions bien ressusciter cela en nous comme en l’autre, encore faut-il vraiment y croire au changement, avec un peu de foi à l’ame.

    Hélas le seul amusement pour mieux décompresser pendant quelque temps ne suffit pas toujours à mieux changer les choses, peut-être même que ceux qui veulent souvent monter en première ligne ne rendent guère mieux service à leur cause ensuite.

    C’est pourquoi la même chose se reproduira peut-être demain. Allez y les jeunes, allez y les jeunes nous on préfère surtout vous voir de nouveau faire la révolution à notre place, pour nous ce n’est bien sur plus de notre age.

    L’homme moderne est encore si prévisible à voir et à entendre, à vrai dire plus rien ne me surprend de lui, pas même au prochain journal du soir ou alors à son prochain passage à la télévision, c’est la vie, c’est l’histoire, la leur celle qu’ils veulent d’abord faire voir et entendre
    aux autres, comme à travers leur propre position plus élevé que la votre.

    Vous bien sur, vous n’existez plus du tout, vous ne pensez pas mieux, oui peut-être que 68 a été super mais on ne peut pas non plus toujours cantonner les esprits et les coeurs à cela, préfère plutôt entendre un bon morceau de guitare, et puis quand viendra le réel moment du changement, alors le changement se fera alors tout naturellement, et voilà que je redéconne de nouveau au sujet de 68, chassez le naturel et il revient au galop.

    Bref encore un autre commentaire sans importance et qui d’ailleurs ne changera guère mieux les choses dans l’esprit de nos élites, si bien formés à nous déformer, à nous conditionner et nous pleurons alors sur mai 68, peut-être même que 68 ce n’était juste qu’un petit hors d’œuvre qui sait de quoi l’avenir sera fait pour les marchands, pour les politiciens comme dans leur même emploi du temps montré aux autres, la même météo partout sur terre. Comme ils font bien la une !

    1. oui, non et oui et non, je ne sais pas mais, 68, comme d’autres dates dans l’histoire, c’est un peu comme un rendez-vous, …
      je n’ai pas très bien compris de ces rendez-vous, je lis dans les vieux livres, je sais que celui de 1948, débordait largement les frontière de la France …
      ce que je vois c’est que le pouvoir contre tout et par dessus tout craint, desteste, exècre de ces rendez-vous…
      donc même si finalement 68 était plus d’un avorton que d’un avatar, faut-il encore voire si la guerre….

      finalement, je ne sais rien, je sais qu’en 1848, le gouvernement sort de la rue, les ministres d’un Palais (un lieu notable), les sous-ministres de la rue (sur la place, au milieu du peuple)
      ce gourvernement a conscience de n’être pas légitime, il n’est ni élu de Dieu, ni du peuple, … c’est ce pourquoi dans le vocabulaire de l’époque (celle de Marx…) ce gouvernement s’excuse d’être une dictature, et chacun de ses participants un dictateur (quel sens est celui de dictature et dictateur aujourd’hui ???)

      je me pose donc la question du vocabulaire, des mots (je n’ai même pas besoin de l’histoire, ni de mai 68 pour en être effarée ….) et si je dois signifier ce que pour ma par j’en ressens, ce n’est pas si vieux (vu que je ne suis pas si vieille) mais on me disait et me radotait de la langue de bois, et on m’en dit encore (je comprends…) cependant je m’étonne qu’on ne parle pas aujourd’hui de la langue de béton (je rajouterais même béton armé…)
      cela (serait-il me semble… mais je n’en suis encore de juger les hommes, sans m’occuper de combien il gagne) autrement plus intéressant plutôt que de crier harot sur mai 68

  38. @ François Leclerc http://www.pauljorion.com/blog/?p=9833

    Nous avons déjà échangé sur ce sujet. Je ne retrouve pas ce que nous étions dit, mais à l’époque, j’étais resté sur le sentiment que nous nous étions un peu rapprochés.

    Aujourd’hui, je regrette de constater combien c’est difficile de progresser alors que vu de ma fenêtre se serait pourtant très facile. J’ai dit dans une autre file, que Dany avait déjà fait un parcours que je trouve intelligent et bénéfique pour tous en reconnaissant que « CRS SS » était idiot.

    Il reste les autres slogans très ravageurs pour notre civilisation :« Il est interdit d’interdire » « Jouissons sans entrave » et autres. J’espère que cela viendra sans trop tarder.

    @oppossùm dit : 3 avril 2010 à 18:53

    Merci de vous être exprimé en ces termes sur ce sujet d’importance. Cela me réconforte.

    @Steve dit : 4 avril 2010 à 04:26

    Merci à vous également notamment pour ce que vous avez dit sur les conséquences économiques

    1. extrait Thiérry de Duve « Au nom de l’Art » page 119
      (un peu d’esthétique…)

      « La loi ne fait pas qu’interdire, elle oblige. J’appelle donc moderne l’artiste dont le devoir est (était, fut, a été? ) de faire n’importe quoi. C’est un devoir et non un droit. C’est un commandement que l’artiste moderne reçoit et non une autorisation qu’il se donne. Comme tel, ce n’est même pas une loi au sens ordinaire ou juridique. La plhrase « fais n’importe quoi » n’énonce pas une règle à laquelle des cas peuvent être soumis, elle prescrit au contraire d’agir sans règle. C’est l’injonction comme telle: agis; tu dois faire. Mais que faire pour obéir à l’injonction si l’injonction ne le dit pas? Eh bien, fais ce que tu veux. Agis selon ta libre volonté. Si c’était un ordre, il était bien facile de lui obéir, et impossible par contre de lui désobéir. Quoi que je fasse, j’obtempère.Mais si ce n’était pas un ordre, si c’était au contraire une permission comme l’ont cru les dadaïstes, alors ma volonté est inutile et il est inutile qu’elle soit libre. Quelque autorisation que je me donne, je ne suis jamais l’auteur de ce que je fais. N’importe qui peut faire n’importe quoi si tout est permis. Que faire donc pour être artiste? Que faire d’une liberté qui s’impose ou d’un ordre qu’il n’y a pas moyen d’enfreindre? Que faire lorsqu’il est obligatoire que tout soit permis ou, comme on disait en mai 68 qu’il est interdit d’interdire? Je n’ai pas besoin d’insister. Entre une question léniniste et sa réponse anarchiste, chacun aura perçu l’ampleur de l’enjeu politique enclenché par l’impératif, qui n’est pourtant qu’esthétique, de faire n’importe quoi. Et ce serait faire injure aux nombreux artistes qui, après Duchamp, se sont sentis interpellés par l’injonction de faire n’importe quoi, que d’insinuer qu’ils n’aient pas eu conscience de cet enjeu « 

    2. @ Jducac
      Merci de votre remarque et votre votre lecture.
      Garder la nuance, vigoureuse toutefois, en ayant les pieds sur terre (donc sans a-priori) et la tête dans un petit coin d’étoiles, est un exercice difficile , surtout en terrain défavorable.
      Donc juste un 😉 , en se croisant : ça réconforte de savoir que même si on n’est pas nombreux, on est pas tout seul ! 😉

  39. Il faut en finir avec mai 68, inutile de sacraliser un passé, on ne vit pas dans le passé, mais dans le présent et désirant un futur meilleur. C’est du futur qu’il faut discuter au lieu de revenir toujours sur ce qui a été ce qui finit par dénoter tout simplement un manque d’idée.

    L’époque Yéyé fut aussi une époque « bisounours » dont il nous reste la « rhétorique » à la Johnny entre deux pubs pour améliorer son quotidien fiscal.

    Cela sert à quoi par exemple de discuter de la sexualité avant et après 68, puisqu’on ne reviendra pas du moins certainement pas dans l’immédiat à ce monde d’avant.
    Cela sert à quoi de discuter du paternalisme d’alors puisque nous l’avons remplacé par un « libéralisme » économique à tout va.
    Cela sert à quoi de discuter de la hiérarchie d’alors puisque c’est le mondialisme qui la dépasse depuis.
    Sauf à la nostalgie de ceux qui avaient 20 ans à cette époque là, je ne vois pas en quoi mai 68 est un héritage, sauf sans doute au fond de commerce de Cohn Bendit.

    1. Les années 68 sont un héritage comme toute autre période. Il n’apporte rien de le nier. Ce mouvement a pu être récupéré à d’autres fins mais c’est indéniable, chacun a pris ce qu’il avait intérêt à prendre. Effectivement les intérêts étaient multiples. Les politiques auraient mieux fait de réfléchir un peu mieux, sans précipitation. C’est encore leur peur qui a faussé le diagnostic et la réponse à apporter.
      Gageons qu’on ne reproduise pas les mêmes erreurs.

      Voilà ce que l’on a pu faire de nobles aspirations, car il y en a eu.

    2. Cela, c’est le plan, le bon plan, pour que surtout, surtout, rien, de rien, ne trouble la « paix » (la pax ananas – en référence à notre cher Clown blanc- et aussi parce que pax romana, américana…)

  40. « Ancien combattant » de mai 68 (expression ridicule), j’y vais aussi de mon grain de sel, quitte à ennuyer les plus jeunes. Une approche est de suivre le parcours de Daniel Cohn-Bendit, si l’on admet qu’il est resté fidèle à lui-même, ce que je crois. L’économie n’a jamais été son point fort. En revanche, il a du flair sur la « superstructure » (les rapports sociaux privés et dans le monde du travail, les mœurs, le rapport à l’argent …). Il fut en 68 au centre d’un mouvement, en partie mondial, qui visait à casser les rigidités héritées du passé (religieuses surtout concernant la France) afin de passer d’une société de devoirs à celle des droits, des loisirs, de la consommation, des choix individuels (de la femme en particulier). Les conditions et rapports de travail en ont grandement bénéficié. Mais 68 n’est pas à l’origine de la mondialisation, qui nous vaut, avec le développement des technologies de l’information, l’essentiel de nos soucis d’aujourd’hui. Une nouvelle phase s’annonce, dont on ne sait trop de quoi elle sera faite (de régressions pour le moment). Mais DCB est toujours au premier rang, prêt à saisir l’opportunité qu’il jugera pertinente et dans l’air du temps, avec l’écologie bien sûr, mais aussi une nouvelle façon de faire de la politique. Gageons qu’il a approuvé l’idée de Sarkozy/Stiglitz d’inventer un nouveau critère de bien-être social. Ne perdons donc pas de vue DCB. Mais la question est cependant de savoir si nous sommes à l’aube d’une nouvelle mutation « benditienne », ou plutôt « marxienne » voire « géopoliticienne ». Je n’en sais trop rien, mais si l’on me proposait de voter, je choisirais la 3ème option. J’imagine que des retours en arrière sur les mœurs et la discipline (travail, école) et des ajustements des règles économiques avec replis sur soi (cf. l’article de Sapir, le protectionnisme US) nous aideront à vivre un gigantesque mouvement de bascule entre l’Occident et l’Orient.

  41. J’ai vécu mai 68 de l’intérieur…d’abord comme un spectateur, puis comme un acteur…je conserve de ce mois des flash inédits..;des petites choses que personne n’a raconté…mais des choses qui font la vraie histoire et qu’aucun bavard ne saurait m’enlever…!

  42. En finir avec 68, mais pourquoi, il faudrait commencer par la justement. C’est une période charnière qu’il serait intéressant de revisiter aussi du point de vue historique pour s’affranchir des débats idéologiques.
    Alors le sujet de 68 nous reviens régulièrement sous les traits symbolique de la révolte, d’une interrogation sur l’état de notre société et sur l’idéalisation de notre capacité à pouvoir la transformer.
    Alors que tout semblait possible à l’époque aujourd’hui l’horizon me semble plus incertain, il n’y a plus de modèle politique alternatif, mais la crise est bien la et le système vacille.

  43. Oui, en finir, avec mai 68, pour penser maintenant qu’est ce qu’on fait au lieu de rêver sur un passé déchu, la France ni même le monde n’ont plus rien de commun avec ce qu’ils étaient en 68.
    Je viens de voir sur France 3 : « La France se déshabille », sur les années 70 et il est vrai que la jeunesse de cette époque était totalement utopique sur notre futur.
    J’ai enfant, mais j’ai aussi la nostalgie de cette époque de couleur et de fête.
    Un ami musicien m’a dit dernièrement que la musique portait alors un message lumière et non ténèbres comme aujourd’hui.
    Je me souviens de mes profs qui avaient 30 ans en 80 et qui voyaient une civilisation des loisirs en l’an 2000, combien se sont ils trompés sur l’avenir.
    En 70, jusqu’au année 80, ils y avaient des boites de nuit pour faire la fête, combien en reste t il ?
    Rien que chez moi, elles ont toutes disparut.
    A l’époque, il n’y avait ni dumping ni mondialisation encore et si une révolte aurait du avoir lieu c’est bien aujourd’hui bien plus que dans ces années là.
    Aujourd’hui, il n’y a plus de hippies qui rejettent le fric mais une jeunesse qui demande du fric pour pouvoir consommer, qui ne sait pas s’amuser et qui a une curiosité limité.
    Donc la résurrection de cet esprit là est un leurre.
    Il faut autre chose, un autre mouvement, peut être est ce encore trop tôt ?
    Trop tôt parce qu’il est tellement plus facile de pleurer sur le passé que de s’inventer un avenir.

    1. Calme, du calme, ….
      les jeunes, les jeunes, les jeunes, … je les vois … et je sais de quoi je parle…
      (donc il faudrait arrêter .. ou alors commencer par en voir,… en connaître, ….enfin je ne sais pas … avant de médire à tord et à travers…
      donc peut-être comme en forme de message, (de conseil, à écouter -ou récoutert…… )
      : « le temps ne fait rien à l’affaire » de Brasens » :
      http://www.youtube.com/watch?v=gznDOMKeWkA

  44. mai 68 est un essai manqué, lorsque les peuples veulent tordre les conservatismes et renverser la classe dominante. Cet essai se réitérera, avec la jeunesse, seule capable de prendre les risques du changement.

  45. Mai 68, n’était-ce pas avant tout le « sex, drugs and rock ‘roll »? Le « Je t’aime… moi non plus » de Serge Gainsbourg ? La pop music à tout va? Il y a tellement de choses à dire sur cette période et je pense qu’il ne serait pas de trop de parler d’une véritable fracture. Ce serait trop facile de dire oui… mai ’68… ce n’était que ça… Mai 68 fut, et pas seulement en France, une véritable brèche dans la société. Les générations suivantes en ont payé les frais. Comment voulez-vous que la jeunesse s’y retrouve après de tels débordements et confusion de valeurs. On en revient toujours à la même question: la transmission des valeurs. La jeunesse n’attend qu’une chose, c’est que leurs aînés leur montrent la voie, leur transmettent le bien, le beau, le vrai. Est-ce que les générations adultes de 68 ont réussi (et voulu!) transmettre ces valeurs, ou bien ont-ils surtout préféré s’occuper d’eux, en se disant, « après moi le déluge »? Quand on analyse la crise actuelle, on peut se demander si les élites ont bien joué le rôle qu’elles auraient dû, en termes de responsabilité, pour ne pas employer le mot sagesse. N’avons-nous pas été en quelque sorte trahis. Je repense encore à ces fameuses années 80, où la génération de 68 bien installée alors dans la société, a fait boire de façon indulgente et complaisante aux générations suivantes, sans broncher, l’idéologie des Yuppies. Il y avait là bien sûr beaucoup d’argent à gagner… Voilà, où cela nous a menés…

    1. Chère Anne, oui, en 68 nous avons péché avec le sexe. Plus tard avec l’argent (les yuppies). Et puis nous avons pris le pouvoir avec la pub et tout le reste. Sexe, Argent, Pouvoir : coupables sur toute la ligne, nous aurions dû faire contrition et payer pour tous ces péchés. Mais, injustice suprême, ce sont nos enfants qui ont payé à notre place ! Mon Dieu, mon Père, moi qui croyais qu’en 68 on voulait aussi te moderniser, avec un peu plus d’amour et un peu moins de culpabilité. C’est pas gagné.

  46. Pour me situer: j’intègre Nanterre – La Folie, Complexe universitaire (sic) – en octobre 1996 en Fac de Lettres et Sciences Humaines – Sociologie – et habite une chambre à la Cité U, vue splendide sur les deux bidonvilles. Nanterre est une université flambant neuve où ont été regroupés, d’un trait de plume, tous les étudiants de l’ouest et du nord parisiens: se côtoient, pour faire exemple, Daniel Cohn Bendit en jean avec des copains barbus qui animent les comités Vietnam et Françoise Missoffe (Panafieu) en carré Hermès avec ses amis en loden. Les grands profs qu’on suit en amphi socio sont Lefebvre, Touraine, Crozier…Le contexte est le mouvement situationniste de Strasbourg (Debord), une désorganisation administrative, une surpopulation étudiante, un sentiment de ghettoïsation loin de l’université de Paris Sorbonne, des cafés et des cinés…La rentrée de 67 est encore plus caffouilleuse, mais les débats s’organisent avec une grande liberté de ton entre apprentis sociologues qui vivent l’expérience d’une société en réduction: les enfants de bourgeois qui veulent étudier dans ces conditions difficiles, les autres enragés qui veulent expérimenter dans ce bouillon de culture.
    A la cité, ségrégation entre batiments des filles et des garçons, briser les interdits sera vite un enjeu, avec les conséquences impliquant le maniement d’aiguilles à tricoter dans certaines chambres. Une première fois et c’est une vraie première, les forces de l’ordre interviennent sur le campus. Le cycle de l’agitation provocs-repression-contre-manif. est lancé et Dany expérimente in-vivo ses nouvelles techniques de mobilisation. Aux entrées et dans les allées de la fac, ce sont les comités Vietnam qui assurent l’animation. L’expression se libère, y compris dans les amphis ou dans les halls à l’entrée des TD. Le cycle aboutira au mouvement du 22 mars, assemblée fiévreuse dans laquelle la grève est décidée. Les examens sont boycottés (j’avais appris des pans entiers du langage Dogon pour mon partiel d’ethno.). Evidemment, celà ne rate pas, les occidents enmènent les étudiants d’Assas casser du « gauchiste » à Nanterre qui est fermée par le doyen Grappin et le mouvement s’exporte à la Sorbonne. Je passe sur le reste qui est connu, le quarier latin, la photo de Dany face au CRS, son invention du « décompte marketing » des manifestants à l’intention des radios, la grève générale, les ouvriers que les étudiants veulent amener dans les amphis et qui ne comprennent rien à ce qui se joue là, la position du PC, celle de Mendès France à Charletty, Massu, les blindés, les paysans en provinces prêts à sortir les fourches, la descente des Champs Elysées par les gaullistes. Plus tard, on vivra Prague, de loin, qui a une autre dimension. A la rentrée 69, j’intégrerai l’université expérimentale de Vincennes, ouverte à tous…Les maîtres de conférence, pétrifiés d’angoisse, nous demandait d’établir notre programme: que voulez-vous étudier? Les réponses étaient évidemment consternantes.
    Quelques éléments d’analyse personnelle maintenant:
    Mai 68 a été avant tout un mouvement étudiant, c’est à dire de jeunes, avec de jeunes leaders qui ont appris à faire naitre, gonfler, orienter un mouvement avec les moyens de communication de l’époque. Il en est durablement resté une créativité, une liberté de ton, de langage et de relations qui se sont retrouvés – ce n’est pas un hasard – dans les media, la publicié, la communication de façon générale.
    Les principaux avantages économiques ont été retirés par le sytème, Grenelle, qui a permis d’augmenter fortement les salaires et soutenu la croissance pendant de longues années (Pompidou et Giscard jusqu’à la crise pétrolière). De façon très immédiate et durablement, Mai 68 a sapé l’autorité (de savoir et de discipline) du corps des enseignants.
    En ce sens, on pourrait parler d’une révolution culturelle, mais je veux vite ajouter que je n’ai pas vu de concrétisation politique ou de pouvoir: si, pour aller vite, Lang, Seguela, Libération et Canal + sont les enfants de Mai 68, les parents que sont les politiques et les capitalistes ont tôt fait de récupérer le système à leur avantage.
    Mutatis mutandis, j’admire toujours autant ce qu’a réussi Daniel Cohn-Bendit avec Europe Ecologie, je m’interroge à nouveau sur la « capacité de transformation » en Ecologie politique…

    1. Il faut remettre les choses en perspective historique,avant 1968 ,il y eut les années folles 1920-1929.
      C’est la crise de 1929 qui sonna le glas de cette période hédoniste. Curieusement,c’est la crise actuelle qui va siffler la fin de la récréation.

    2. Sommes nous murs pour un retour de balancier ,de l’hédonisme au puritanisme?
      J’ai l’impression que c’est la question sous-jacente aux différents commentaires.

    3. Merci pour ce beau témoignage, qui fait la part des choses sans renier l’esprit 68.
      Vous êtes la preuve vivante qu’il est possible de porter un regard critique sur 68, ou plutôt la suite des évènements, sans jeter le bébé avec l’eau du bain.

      J’avais 7 ans en 68 mais encore enfant j’ai pu sentir le frisson d’un souffle nouveau qui parcourait la société toute entière, cette année là et les quelques années qui suivirent.
      Pour l’anecdote, j’habitais à cette époque un village du nord de la France où j’étais élève à l’école des frères. Je ne me souviens plus si c’était l’année même ou un ou deux ans plus tard, mais guère plus, l’école avait organisé une sorte de petite soirée spectacle où raisonna le son des guitares électriques avec un son qui dans mon coeur d’enfant, rétrospectivement bien entendu, n’avait rien à envier à celui de Jimmy Hendrix, tant j’avais été transporté par la musique électrique. Le chanteur avait chanté des couplets qui parlaient d’amour et de Jésus mais guère du Dieu vengeur et culpabilisant d’un christianisme au formol et sectataire. Mai 68, comme vous dites, fut bien une révolution culturelle. Une grande bouffée d’air frais envahit alors la société française.

    4. @ Piotr

      Oui, quelque chose va changer. Mais pas pour revenir au puritanisme. Non, c’ est autre chose…

  47. Il parait qu’il reste des traces de 68 à la Sorbonne(personnellement je ne les ai pas vues) mais reste-il des traces des « camps de réfugiés » maghrebins, entourés de barbelés et de gardes mobiles fonctionnant jusqu’au milieu des années 70 dans notre belle France?

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