L'actualité de la crise : quand on lève un coin du tapis, par François Leclerc

Billet invité.

QUAND ON LEVE UN COIN DU TAPIS

Il est rarissime que le très sélect Financial Times fasse référence à cette économie que l’on appelle de plein de noms différents – parallèle, souterraine, de l’ombre, fantôme, informelle, etc… – sans doute parce que l’on ne sait pas bien la décrire, que l’on préfère l’ignorer ou la cacher, ou bien encore parce qu’elle dérange. Au choix : les esprits, les convenances, ou l’analyse.

Cette activité est systématiquement présentée comme criminelle, ce qu’elle peut d’ailleurs être, bien que cela ne soit pas du tout toujours le cas. On la retrouve en haut comme en bas de la société, cela va de soi très dissemblable dans les deux cas, pour peu que l’on gratte un peu, fasse preuve de curiosité et qu’on la recherche. Exprimant une même réalité dans sa diversité : celle d’une emprise imparfaite ou contournée de l’Etat. Obéissant cependant à d’autres règles, car elle est souvent, elle aussi, très réglementée.

Pour une fois, le FT a choisi de ne plus couvrir la haute finance et la grande économie, pour rendre compte d’une étude consacrée à la « shadow economy » (l’économie de l’ombre). Il faut dire qu’elle provenait de la Deutsche Bank, ce qui lui donnait donc droit de cité dans ses colonnes. Toutefois, on n’apprendra pas beaucoup dans cette étude sur cette activité mystérieuse, sauf qu’elle est illégale, (à ce titre criminelle, ce qui ne nous surprend pas). Sont ainsi évoqués l’absence de facturation, le travail au noir, les payements discrets en liquide, l’évasion fiscale, ainsi que le trafic de drogue pour faire bonne mesure. Toute curiosité ayant ses limites, cette liste s’arrête là.

L’objet de l’étude est ailleurs, il s’agit de cerner la capacité plus ou moins grande des pays européens à résister à la crise, en fonction de l’importance de leur économie de l’ombre. On apprendra que la Grèce est parmi les mauvais élèves, qu’au contraire la Hollande, l’Autriche et… la France sont parmi les bons, et que l’Allemagne est entre les deux. Les bons et les mauvais élèves seraient favorisés, ceux qui seraient entre deux eaux pénalisés. L’auteur de l’étude reconnait ne pas savoir expliquer ce phénomène, et l’on restera donc sur sa faim. L’économie de l’ombre n’est pas étudiée dans les universités prestigieuses.

Une autre nouvelle était publiée dans le même journal, qui aurait pu permettre de fructueux recoupements avec l’article précédent. Elle faisait état des quelques 95 milliards d’euros rapatriés ou régularisés en Italie, suite aux mesures gouvernementales d’amnistie fiscale. La pénalité étant dans un premier temps de 5% des montants déclarés, cela rapportera donc aux finances publiques un petit 5 milliards d’euros. Pas de quoi pavoiser. D’autant que les mauvais esprits, il n’en manque heureusement pas en Italie, ont cru devoir dénoncer dans cette opération la plus gigantesque opération de blanchiment d’argent jamais accomplie. Dans un pays connu pour l’existence d’une très forte économie parallèle, à laquelle ses organisations criminelles mondialement célèbres contribuent allégrement, mais qui dépasse par son ampleur, son ingéniosité et sa diversité, de loin les frontières de leurs activités délictueuses. Ce qui avait déjà permis à de nombreux commentateurs de remarquer, avant même que la Deutsche Bank ne se penche sur cette douloureuse question, que l’Italie parvenait à surnager passablement bien dans la crise actuelle.

Laissons à Giulio Tremonti, le ministre Italien de l’Economie, le mot de la fin. Il s’est félicité, sans l’ombre d’un embarras, du « succès extraordinaire, signe de la force de notre économie et de la confiance en l’Italie » de l’opération qu’il a rondement menée. Il n’a pu hélas la gratifier d’un de ces noms de code que les militaires affectionnent de donner à leurs opérations, par exemple mains propres (mani pulite), l’expression ayant été déjà prise par les petits juges. Cela aurait pourtant fort bien convenu pour baptiser une lessiveuse de cette importance.

45 réponses sur “L'actualité de la crise : quand on lève un coin du tapis, par François Leclerc”

  1. Etats-Unis : 21 millions de foyers pourraient être endettés pour un montant supérieur à la valeur de leur logement fin 2010, selon la Deutsche Bank.

    Si seulement un sur cinq de ces foyers choisissent de faire défaut sur leur emprunt immobilier, les pertes pour les banques américaines et pour les investisseurs pourraient être supérieures à 400 milliards de dollars.

    Pour toute l’économie américaine, ce serait l’équivalent de la faillite des caisses d’épargne à la fin des années 1980.

    Lisez cet article apocalyptique du « WALL STREET JOURNAL » :

    Analysts at Deutsche Bank Securities expect 21 million U.S. households to end up owing more on their mortgages than their homes are worth by the end of 2010.

    If one in five of those households defaults, the losses to banks and investors could exceed $ 400 billion.

    As a proportion of the economy, that’s roughly equivalent to the losses suffered in the savings-and-loan debacle of the late 1980s and early 1990s.

    http://online.wsj.com/article/SB126040517376983621.html

    A un certain niveau d’endettement, de très nombreux ménages choisissent de faire défaut sur leur emprunt immobilier. En clair, de très nombreux ménages disent à leur banquier :

     » Stop ! Maintenant, ça suffit ! Nous arrêtons de vous payer les mensualités de notre emprunt immobilier ! Nous ne vous paierons plus un seul centime ! Vous pouvez garder notre maison. On vous la donne. De toute façon, sa valeur réelle s’est effondrée. Quant à nous, nous allons devenir de simples locataires. Adieu.  »

    En 2008, quel est le pourcentage des ménages qui ont choisi de faire défaut sur leur emprunt ?

    Vous pouvez cliquer sur la carte des Etats-Unis visible dans l’article du WALL STREET JOURNAL :

    En 2008, dans l’Etat de Californie, 31,39 % des ménages endettés ont choisi de faire défaut sur leur emprunt.

    En 2008, dans l’Etat du Nevada, 26,77 % des ménages endettés ont choisi de faire défaut sur leur emprunt.

    En 2008, dans l’Etat de l’Arizona, 24,5 % des ménages endettés ont choisi de faire défaut sur leur emprunt.

  2. En complément de l’article du WSJ, voir l’article dans Slate :

    Au lieu de nous inquiéter à l’idée que les Américains puissent emboîter le pas à de modestes propriétaires prenant la difficile décision d’être en cessation de paiement, nous devrions peut-être nous faire du souci à la perspective de voir les Américains de la classe moyenne s’inspirer des milliardaires et des 500 plus grandes entreprises du pays, qui prennent en toute lucidité la décision de ne plus honorer leurs dettes.

    source => Etats-Unis: qui ne paye pas ses dettes s’enrichit

    1. Et le commentaire à l’article de Slate.fr:

      « Complément d’info. Soumis par Constructif .

      Cet article destiné à l’origine à des lecteurs américains ne précise pas que la loi sur les crédits hypothécaires US (Mortgage) est différente de celle en vigueur en France.

      En achetant un bien immobilier, un Français s’engage à rembourser l’intégralité de son emprunt. S’il ne peut rembourser, alors la solution ultime sera la mise en faillite personnelle suivi de la saisie du bien par le créancier, la banque.

      Un américain gage son emprunt sur le bien acheté, c’est pour cela qu’on parle de crédit hypothécaire : En cas de non paiement des mensualités la banque exerce son hypothèque et devient automatiquement propriétaire du bien. Cela explique la violence de la crise des Subprimes au Etats-Unis car les banques se sont retrouvées brusquement propriétaires de centaines de milliers de biens dont la valeur de revente était inférieur à la dette associée.

      En contrepartie pour beaucoup de foyers qui avaient contracté ces emprunts les conséquences sont bien moindres qu’en France. Ils ont acheté une maison, ont payé des mensualités pendant 2 ans au lieu de payer un loyer, puis ils sont repartis dans un statut de locataire laissant les biens dévalués dans les mains des banques qui du coup ont sauté. Si on exclue l’aspect sentimental ça a même pu être une bonne affaire pour certains d’entre eux. »

  3. Bonsoir,

    Dans la même veine, avez-vous vu passer ça ?

    Les banques ont parié contre nous tous
    éditorial du New York Times
    29 décembre 2009
    http://contreinfo.info/article.php3?id_article=2944

    Comment une banque d’affaire peut-elle s’enrichir facilement ?

    Voici la recette : créer un produit financier aussi risqué que fragile, mais suffisamment sophistiqué pour qu’il en devienne incompréhensible. Le vendre à des clients en affirmant que la note AAA (achetée auprès des agences de notation) est solide comme un roc. Prendre une assurance contre la faillite des clients et/ou de ces titres. (La magie financière de Wall Street permet d’assurer la valeur d’un bien que l’on ne possède pas). Attendre quelques mois, le temps que la déconfiture des titres entraîne celle des acheteurs crédules. Encaisser les bénéfices.

    Est-ce le scénario qu’aurait mis en œuvre Goldman Sachs et quelques autres ? C’est la question que se pose un nombre croissant d’observateurs avertis, dont le New York Times.

    Lire la suite…

    Amicalement.

    Étienne.
    _________________

    Un criminel est une personne avec des instincts de prédateur
    et qui n’a pas assez de capital pour fonder une société.

    Alphonse Allais
    _________________

  4. Moderato-cantabile vous souhaite une bonne année 2010.
    Elle est désolée de l’inquiétude qu’elle aura provoquée chez certains d’entre « Nous ».
    Pour des raisons personnelles, elle n’a plus le temps d’intervenir mais elle continue de suivre le blog.

    Pardon pour cette parenthèse dans le débat.

  5. Le but de la finance et des organisations criminelles comme la mafia est de s’approprier un maximum d’argent divisé entre un nombre minimum de personnes.

    Dans ces conditions il me parait peu probablement que l’économie puisse survivre …

    On peut faire une remarque aussi ignoble qu’ironique : contrairement à un financier, un trafiquant de drogue produit un bien.

    Mais il ne faut pas oublier une chose. Quand la société va mal les gens vont souvent mal … et souvent la consommation d’alcool et de stupéfiants augmentent durant ses périodes (de même que les anxiolytiques). Cette année 2009 a été marqué par l’inondation de cocaïne et d’héroïnes aussi bien dans les villes que dans les campagnes francaise.
    Il faut bien voire que la tolérance des marchés parallèles de la drogue par un pays entraine mécaniquement une baisse de son PIB car le nombre de personnes dépendantes augmentent. Ainsi on est en présence d’un double phénomène négatif :
    -Les stupéfiants sont des biens particuliers puisque la personne dépendante est prête à substituer les drogues à n’importe quel autre bien. (voire même des bien de 1er nécessité) Il s’en suit donc une baisse du pouvoir d’achat de la personne. (les drogues n’étant pas considérées comme un bien au sens du PIB et agissant comme un réducteur de revenu )
    -Les énormes masses d’argent issue des trafiques ne subissent naturellement pas l’impôt. Par conséquent, cela constitue une perte non négligeable pour l’Etat.

    Bien évidement mon analyse se base pour les pays développés. On fera abstraction des pays comme la Colombie dont une partie importante de l’économie est basée sur la culture de la feuille de Coca.

    1. Vous êtes sûr que les banquiers produisent des biens ?
      Qu’ils produisent leur bien-être, dérivé de produits virtuels, d’accord !
      Aujourd’hui, ces gens ne sont plus que des racketteurs, de nous et de nos états.

    2. La solution au problème des capitaux générés par le traffic de substances illicites est simple et logique : casser le marché noir.

      Comment? Point par la répression, cela ne marche pas; au contraire, plus le commerce d’un stupéfiant est réprimé, plus ça rapporte…

      Rappelons qu’il existe des drogues dures en vente libre mais contrôlée, malgré leur extrème nocivité avérée [des dizaines de milliers de morts par an]; drogues dures qui rapportent du reste beaucoup d’argent au trésor public [ce qui est une bonne chose, meilleure en tous cas que de remplir les poches de réseaux maffieux ou faire prospérer les gangs dans les cités] : l’alcool et le tabac.

      Mais en France, on n’est point trop pragmatique, on préfère oublier les tragiques leçons de la Prohibition aux USA [1919-1933 : l’essort du crime organisé, le désastre sanitaire, le viol des libertés individuelles], et se faire les complices objectifs des traffiquants en pronant la répression pure et dure…

  6. Impressionnant.

    Ce ne sont que quelques coups d’oeils biens timides et le résultat m’impressionne en mal. Dans ces conditions déclamer « La Crise est finie » ressemble beaucoup à vouloir remettre le tapis en place.

  7. L’économie souterraine ou parallelle se porte bien (et vu la pluie annoncée de nouvelles taxes, mieux encore demain).
    L’économie souterraine porte sur des biens ou des services qui n’ont rien à voir avec les artifices de la haute finance.

    Et puis et sans doute surtout, dans cette économie là, un banquier qui vous floue, ça n’existe pas (en tout cas pas longtemps)
    un beau jour il se fait buter – de préférence avec sa famille- et en guise de fleur sur la tombe on lui glisse un billet dans la bouche.

  8. « France : la dette dépasse les 75% du PIB

    Au troisième trimestre, la dette brute au sens de Maastricht s’est élevée à 1.457,4 milliards d’euros, à 75,8% du PIB. La hausse de l’endettement de l’Etat et de la sécu explique cette évolution. »

    http://www.lefigaro.fr/conjoncture/2009/12/30/04016-20091230ARTFIG00307-france-la-dette-depasse-les-75-du-pib-.php#xtor=AL-5

    « Dette : la France, pas meilleure que l’Espagne.

    La France, l’Espagne et le Royaume-Uni font face aux mêmes risques liés à l’endettement, estime l’agence de notation Fitch. »

    http://www.lefigaro.fr/conjoncture/2009/12/28/04016-20091228ARTFIG00421-dette-la-france-pas-meilleure-que-l-espagne-.php

    1. Au sujet des 1500 milliards, je voudrais dire qu’il s’agit de création monétaire comme par le passé avec la planche à billet, la seule différence, c’est que d’un côté l’inflation de l’ancienne méthode faisait perdre un peu de sous aux rentiers et gagner peu aux organismes financiers, tandis qu’actuellement, cette méthode rapporte un max aux établissement financiers et assurances qui sont en charge de la vente de ces titres de dettes, que les intérêts qui en découlent ne profitent qu’aux riches et qu’à partir de cette dette publique on continue à créer toujours plus d’argent puisque le nantissement de ces titres d’états permet d’avoir des prêts où l’effet levier n’est jamais négligeable.

      Donc pour résumer, avec les déficits des états, la planche à billet soit disant interdite marche de plus belle, opérant un transfert massif d’argent vers les plus riches contrairement à ce qui se passait avant, mais il est de bon ton de prétendre que l’inflation fait le malheur des plus pauvre et que l’ancienne planche à billet était une ruine collective, ……pffffffff

  9. Chercher les causes possibles pouvant expliquer « le phénomène » inexpliqué par l’auteur de cet article, est impératif.
    Peu importe qu’il se soit ou non trompé dans sa méthodologie, la prise en compte ou non de certains paramètres, conduisant à ce constat….
    En partant de ce constat, on peut ouvrir pleins de portes…. de PORTES. Et se déporter… pour porter son regard, sur des points très précis, mais également, sur une vision plus globale et , donc, plus nuancée, à apporter ici même…
    Quelques questions réflexions , sans réponses définitives ( je cherche…) :
    – Les 2 économies sont complémentaires, cumulatives? Y ‘a t’il , comme les miens formulions nos reflexions en brûlant des calories – il y a peu – une symbiose entre ces 2 économies? Ya t’il des études fournies à ces sujet ?
    – On définit souvent l’economie de l’ombre comme un parasite vis à vis de l’économie de « lumière » … L’est elle réellement? Se pourrait il que l’on puisse la définir, comme un commensal, dans un premier temps… et une fois, la maturation effective ( mhummm !!! quel bonheur cette liqueur bénie par les dieux et déesses …) un symbiote ?
    – Faut envisager une autre modélisation , à ce sujet ??? Cela a t’il déjà été réalisé??? Ou se trouve l’info , svp ????
    Pour mieux comprendre, prendre de la hauteur ??? mieux cerner ???
    – L’ EG ( l’Economie Globale) a t’elle , dans l’histoire de l’homme, a t’elle compris l’EO et l’EL ( Economie de l’Ombre et Economie de Lumière) ?? Si oui, et au délà des interractions, que peut on en retirer , synthétiquement, et directement applicable pour aujourd’hui et ce soir… du Grand Soir ??

    PS :
    Hors sujet , mais quelques précisions pour les intéressés ( je ne sais si cela a été évoqué récemment ou pas . Dans ce cas , merci de me le préciser … et mes excuses par avance ) :
    – Que se passe t’il chez L’editeur de « comment la vérité et la réalité furent inventées? » ? Ils n’ont pas terminé de déguster les huitres… ou alors ils rongent les coquilles, sous couvert d’une information fallacieuse lui ayant certifié que c’est « tout pareil que le vaccin H1N1 »???
    – Quand pourra t’on vous lire, Mr LECLERC, sous votre Pseudo ROMAIN GARY JUNIOR , par exemple ???

    1. Berlin sans la dette des particuliers devenue la dette des états puisqu’ils ont tous failli à offrir une situation tenable sans recours à l’endettement à tout va de leurs populations serait la capitale du premier pays à déposer le bilan, car à qui vendrait l’allemagne ses machines outils comme ses autos, sans l’endettement généralisé des EU comme des USA ??? L’allemagne n’est pas plus vertueuse que les autres, elle a tout simplement accepter de vendre et de favoriser l’endettement pour arriver à ses fins… Sans le crédit abus des autres pays, l’allemagne ne vend plus rien …

    2. @ liervol
      L’Allemagne ne laissera pas filer sa dette, c’est marqué dans sa constitution.Les preteurs savent que l’Allemagne remboursera, que sa note ne sera pas dégradée, que sa dette ne sera pas alourdie.La France, l’Espagne et le Royaume-Uni auront une dette supérieure à 90% du PIB en 2011 d’après FITCH.La note AAA tolère une dette maxi de 80%.Ou est la paille , ou est la poutre ?

  10. En France, nous avons une toute petite place légale pour cette activité économique de l’ombre, elle porte le joli nom d’entraide. Dès que l’échange devient systématique, il s’agit alors de travail ou d’activité clandestine, de travail au noir ou « travail dissimulé » (c’est le nom officiel actuel qui succède à travail clandestin). Par exemple les SEL (Système d’échange local) répondent à l’entraide dont le champ semble de plus en plus réduit (cf la polémique sur l’aide aux sans papiers). C’est que certains actifs qui paient des taxes n’entendent pas se faire doubler par les pirates qui n’en paient pas, quitte à laisser pas mal de monde sur le bas-côté.
    Sous forme d’énigme: les règles économiques courantes ne permettent pas à chacun de trouver sa place tout comme la taxinomie (science du classement) échoue à classer les ornythorinques.

  11. Ce n’est peut-être qu’une impression de ma part, mais les commentaires suscités par ce billet me semblent comme imbibés de phantasmes hollywoodiens relativement caricaturaux, tandis que le billet en lui-même me paraisse bien plus « ouvert » sur des pratiques que peut-être certains d’entre vous ont pu observer, quand d’autres s’y sont éventuellement prêtés, même peut-être de bonne grâce.

    Quelques exemples d’économies parallèles telle qu’on peut les concevoir, bien loin des films à grand spectacle (pour la plupart ils sont déjà cités dans le billet, mais étrangement ils sont passés inaperçus aux yeux des commentateurs):

    a/ D’une part, les échanges qui sortent du cadre légal – actes délictueux, et donc pas criminels (sur le plan juridique il y a une grande différence entre les deux):

    – Le travail au noir: Un petit artisan qui « oublie » de facturer puis de déclarer au fisc certaines de ses interventions. Il y a effectivement production de richesse dans ce cas, mais l’État n’en bénéficie pas.

    – La vente de biens « tombés du camion »: Un acteur de la chaîne production/distribution soustrait une part de la production au marché légal pour la revendre « sous le manteau » – opération éventuellement couverte par le taux d’incertitude appliqué à la production d’un lot / taux de non-conformité / etc. – Un exemple connexe, celui du trafic de cigarettes: J’ai connu des militaires qui, bénéficiant de tarifs très avantageux lorsqu’ils partaient en mission à l’étranger, revenaient avec des sacs bourrés de cartouches – de clopes – à pas cher.

    – La contrefaçon: Reproduction de tout bien sans le consentement de la personne (physique ou morale) qui en possède les droits – Il y aurait beaucoup à dire, entre autres, sur le débat (ubuesque) qui a été mené sur la question du piratage des œuvres audio-visuelles en France, notamment.

    b/ D’autre part, l’économie que j’appellerai de « savoir-vivre »:

    Mon voisin m’offre un cageot de légumes de son jardin parce que je lui ai réglé ses chaines télé – Par extension, tout échange non marchand mais qui a néanmoins une répercussion sur l’économie: Ce que je donne ou qu’on m’offre, je n’ai plus nécessité de l’acheter.

    ——————————————————-

    Merci à F. Leclerc pour ce billet atypique qui entre-ouvre la porte sur des phénomènes plus concrets que ceux étudiés dans le strict cadre économique – entendre légal – (plus « réels »?). Pour une fois que ce ne sont pas les banquiers/traders/économistes/États-Unis qui sont pointés du doigt, il aurait été appréciable que les commentaires ne tombent pas dans cette routine aussi commode qu’affligeante. Tous responsables? Oui. La seule question qui vaille à ce point est celles des proportions.

    Je ne peux que déplorer l’orientation « bourgeoise » que prennent certaines discussions ici: Très érudites certes, mais pas toujours beaucoup plus en phase avec la réalité que celles qu’elles entendent dénoncer.

    1. Mon objectif était bien de dire que l’économie informelle ne pouvait se comprendre et se décrire sous sa seule composante criminelle (drogue, fraude fiscale, etc…), mais qu’elle était aussi une activité économique de plein droit et de plein exercice. Particulièrement développée dans les pays émergents mais beaucoup moins absente que l’on ne le croit dans les pays avancés.

      Elle offre un champ d’étude très délaissé et trop peu fréquenté. Elle n’est pas un monde à part, comme ses appellations s’appuyant sur des analogies le font faussement croire (souterraine, parallèle…), mais, au contraire, étroitement interpénétré avec le monde de l’économie formelle.

      Un seul exemple, dans nos pays ? les femmes de ménage non déclarées… Elle est aussi un monde d’échanges non monétisés. De travail non rémunéré, etc…

      L’économie informelle – c’est tout du moins mon approche – devrait connaître dans les temps à venir une vaste croissance. Raison de plus pour l’étudier, l’intégrer à l’analyse macro-économique, et créer de nouveaux outils conceptuels pour y parvenir.

    2. Merci de cette remise sur les rails .

      Pour moi aussi , ce billet est une invitation à réflèchir , et au delà à donner un fondement républicain , à la place de ce qui est :

      – d’un côté , l’économie et les échanges  » traditionnels » marchands ( pour faire simple),

      – d’un autre , l’économie et les échanges qu’ Attali ( pour qui j’ai des sentiments d’amour -haine !) appelait  » relationnels ».

      Comme bien dit par François Leclerc , ces deux réseaux existent déjà mais plus souvent pour le pire que pour le meilleur , et ils ont des enfants communs qui puent .

      Le boulot citoyen , c’est de les définir , les « légaliser », les contrôler et faire respecter la loi .

      ça ( je ne sais toujours pas faire les cédilles sous les C) revient à écrire ce qui est  » marchand » et ce qui ne l’est pas , ce qui est de  » fonction publique » institutionnnelle , associative ou de « convivialité  » pour reparler d’Illich que plusieurs ont recité à propos .

    3. Notez qu’il existe par ailleurs tout un panel de nuances évoluant entre le « franchement délictueux » et le « résolument légal », et qui en tant que telles échappent totalement aux études statistiques, ce qu’on constate notamment dans les comportements figés des administrations.

      Je peux ainsi citer en connaissance de cause le fonctionnement tout à fait particulier de l’industrie avicole qui nécessite très ponctuellement une main d’œuvre conséquente (de 10 à 20 personnes pour charger les volailles dans les camions les acheminant à l’abattoir) et ce éventuellement plusieurs fois dans le mois, pour des durées allant d’une heure à une journée complète, éventuellement un peu plus.

      Ainsi, d’une part les rémunérations de cette main d’œuvre dument qualifiée d’occasionnelle peuvent tout à fait se faire dans le strict cadre légal (l’activité est déclarée aux autorités compétentes), mais d’autre part des documents tels que la fiche de paye sont produits en différé – une fiche récapitulative du trimestre, dans le meilleur des cas – tandis que d’autres comme le contrat de travail ou l’attestation de fin de contrat sont tout simplement absents – évidemment, on ne saurait obliger un exploitant à produire plusieurs dizaines de ces documents chaque mois, le cas échéant pour une activité de seulement une heure.

      La chose devient cocasse lorsque qu’une administration telle que, au hasard, l’assedic – ou la caf pour un bénéficiaire du rsa – vient mettre son nez dans ce fatras: Pour ces agences, le travail n’est légal que dans la mesure où toutes les pièces justificatives sont produites en temps et en heure. Le cas que je viens de décrire n’entre tout simplement dans les cases de leur grille de lecture.

  12. Après le « buy american » , le  » rapatriez italien ».On réimporte du financement national de croissance de facon plus efficace qu’en augmentant les taux d’adjudication pour la future dette étrangère.Pour mémoire, l’IS italien est à 33%, taux maximum de l’impot sur le revenu.On a supprimé l’avoir fiscal.Les dividendes sont exonérés à 95%pour les sociétés et à 60% pour les simples associés.Les multinationales négocient directement avec l’administration pour les prix de transfert, les interets et les redevances des sociétés.Vous avez dit solidarité europeenne et harmonisation fiscale dans la transparence?
    Du coq à l’ane : Goldman Sachs se lance dans les trackers. Speculation sur la spéculation .Prochaine bulle attrape-gogo en attendant l’entrée en bourse des droits à polluer et autres licences carbone.Répétons lentement à la manière de Ségolene : » NON AUX PARIS SUR LES FLUCTUATIONS DE PRIX  »
    De l’ane au coq: Merci Francois pour vos contributions éclairantes de 2009.Pas de place au découragement pour 2010, comme dirait un belge fameux d’ascendance lutherienne dont les écrits ne manque pas de sel à cause d’un séjour dans la ouate.

    1. Que vaut réellement l’homme de nos jours face à tant de multinationales ?

      Combien de Gestionnaires aussi en plus pour demain ?

  13. C’est bien compris maintenant ? Qui lèvera encore un coin du tapis perdra lui aussi sa place ?

    C’est beau la liberté de nos jours, celui d’un plus grand chantage de plus de vie ou de mort en société à l’égard de son prochain comme de l’humanité de plus en plus défigurée et maltraitée par dessus tout ! Quand l’homme moderne retire son beau costume et bien ce n’est plus du tout très joli à voir quand même devant la glace. Pourvu que ça dure …

  14. Tirons, tirons ne baissons pas les bras, oui à force de tirer et de persévérer nous en finirons bien par en faire chuter un plus grand nombre de coquins sur le tapis …

  15. Il y a des jours sans et des jours avec.
    Jusqu’à Noël je désespérais de convaincre qui que ce soit de l’état d’urgence dans lequel nous nous situons; à la seule évocation d’un futur pas rose mon interlocuteur fronçait le sourcil où détournait son regard, je le rasait. Comme vous je désespérais d’apercevoir une lueur au bout du tunnel.
    Depuis ce matin, coup sur coup plusieurs signes plus qu’encourageants :
    1. Stéphane Hessel sur France Culture, un ancien du CNR, plus très jeune mais qui est resté vert et sait nous enthousiasmer.
    Pas de langue de bois, que des vérités : Israël et la Palestine, les droits de l’homme, les prisons en France, l’immigration et le renvoie des afghans, abattre tous les murs, le rôle des ONG, …..
    http://sites.radiofrance.fr/chaines/france-culture2/emissions/matins/fiche.php?diffusion_id=80071

    2. La lecture d’un article du Nouvel Obs de M Rocard « Comment je vois l’avenir » qui nous assène de façon magistrale un bilan du passé, un tableau de la situation actuelle, des éléments prospectifs pas très réjouissants et d’autres optimiste, ouf, et surtout un passage obligé, enfin, la SOCIALE-DEMOCRATIE, extraits :

    3 stabilisateurs qui sauvent la mise : sécu, l’intervention de l’Etat, la politique salariale
    Depuis 30 ans la sphère financière s’est emballée et nous a créé des produits dérivés utilisés à des fins spéculatives.

    Economie réelle/virtuelle 1 pour 120 à rapprocher des 1 pour 2 en 1970 !!!! ==> folie intégrale des marchés virtuels, Emeutes de la faim en Afrique en 2008 suite aux produits dérivés sur les marchés du blé et du lait.
    Gonflement des liquidités virtuelles et de la bulle spéculative

    Le moteur salaires est cassé, prise de pouvoir des actionnaires ==> travail précaire et chômage
    Système Reagan/Tatcher : baisse des impôts, déficits ++, dette publique ++

    L’analyse de la crise n’est pas faite, il faut condamner les thèses de Milton Friedman et 13 autres prix Nobels d’éco.
    Sélection des conseillers éco dans les cabinets des dirigeants de banque, de donneurs d’avis éco faits sur le politiquement correct ==> il arrive aux « sciences éco » ce qui se passerait en médecine si l’on trouvait que Pasteur a tout faux.
    …………………….
    Les leçons de la crise n’ont pas été tirées, il faut penser les choses autrement, il y en a pour 20 ans !!!
    Solution : la sociale-démocratie à l’image du Danemark se sort au mieux de la crise.

    La crise capitaliste est une aventure absolument prodigieuse sur le plan intellectuel comme nous n’en avons pas connu depuis la Libération. retour à Stéphane Hessel. Voilà un langage clair et net.
    http://hebdo.nouvelobs.com/hebdo/parution/p2355/articles/a415588-.html?xtmc=rocardavenir&xtcr=1

    3. Un article du Temps signalé par la check-list du Monde et qui nous révèle le scandale des CDO avec une superbe métaphore qui a permis à mon esprit simple de comprendre illico (il est question de viande avariée et d’assurance)
    http://www.ledevoir.com/economie/actualites-economiques/280212/la-crise-financiere-protegeons-nous
    Si cela est la pure réalité, c’est tout à fait inqualifiable, ditto pour les protagonistes
    Il aurait peut être raison Michel de dire qu’on n’a toujours pas tiré les leçons de la crise, on continue à danser de plus belle sur la piste, la musique a repris ou plutôt la fanfare.

    4. Plus personnel, toujours dans le Nouvel Obs, un article au sujet d’un de mes artistes fétiches, au même titre que les hommes remarquables que sont Messieurs Stéphane Hessel et Michel Rocard : Guy Béart et sa voix inégalable.
    Il est en vie et nous a même concocté 12 chansons qui ne peuvent qu’être superbes. Il est juste en attente d’une maison de disque. Vite, vite on est impatient de découvrir.
    http://hebdo.nouvelobs.com/hebdo/parution/p2355/articles/a415689-.html?xtmc=beart&xtcr=1

    Pour le plaisir :

    et en couleur
    http://www.youtube.com/watch?v=LtzbTzAvQ7o

    C’était un jour faste éclairé de 4 lueurs. Espoirs pour 2010.

    1. Le plus dingue pour moi, c’est qu’en définitive plus c’est gros plus ça passe.
      Et seul Madoff est en prison, hors Madoff par rapport à ceux qui sont toujours en place, c’est presque un enfant de choeur…
      Tout cela n’est qu’une gigantesque escroquerie qui continue de plus belle avec la bénédiction des gouvernements et l’incrédulité des peuples, ….

  16. Bonsoir à tous,
    j’avais indiqué à l’époque, le 26 janvier 2009 ici je crois, cette information émanant de l’ ONUDC à Vienne, par son directeur M. Antonio Mario Costa, et publié dans le magasine autrichien « Profil » je cite: « En de nombreux cas, pendant la seconde moitié de 2008, l’argent de la drogue est actuellement la seule source de liquidité disponible (…) le manque de liquidité étant le principal souci du système bancaire, ses capitaux liquides sont devenus un facteur important »
    Sans nommer aucune banque, M. Costa a annoncé que son agence avait trouvé les preuves que les prêts interbancaires ont été financés par des capitaux provenant du trafic de drogues et d’autres activités illégales. Certaines pistes indiquent que certaines banques ont été sauvées de cette manière.
    Selon les estimations de l’ONUDC (bureau des nations unies sur les drogues et la criminalité) le trafic génère entre 500 et 1000 milliards de dollars annuels (en liquide), en grande partie blanchis via des paradis fiscaux et des opérateurs financiers.

    J’avais indiqué à l’époque que cette masse d’argent ne pouvait pas être ignoré des responsables du secteur banquaire et des politiques.. sans réaction. il faut arrêter d’être naïf, le marché financier n’a et n’a jamais eu aucune morale.

    1. La finance n’a jamais eu et n’aura jamais aucune morale, et avec le champs libre du too big too fail et l’absence de manifestations de protestation de par le monde des peuples comme il se devrait elle peut continuer à saigner à blanc avec la bénédiction de nos politiques corrompus à leurs belles manières…

  17. Pour moi ce n’est pas uniquement et seulement la crise du capitalisme c’est surtout la grande crise du monde moderne ha si seulement nous pouvions mieux voir les autres têtes de la bête, la bête est maline vous savez .

    Quand on lève aussi un autre coin du tapis, le monde actuel se révèle pas encore vraiment prêt au changement.

  18. Le tapis est vraiment un objet extraordinaire . Même ma chatte le connait bien , car elle surveille souvent le tapis de ma souris .

    Elle serait pourtant chagrinée de savoir que les salopards cachent la merde au chat sous le tapis , ce même tapis où ils jouent ( parient?) quand il devient vert .
    Tout ça pour qu’on leur déroule le tapis rouge, loin des discussions de marchands de tapis , mais grâce aux marchands qui offrent des tapis roulants dans les temples de la consommation . Pour se répartir le butin , ils prennent rendez vous au tapis-franc . Ces gens là nous considèrent comme leur tapis-brosse .

    Décidément , pour une fois que l’orient offre un objet symbole à l’occident , nous en avons fait bien mauvais usage .

    Il ne me reste plus qu’à prendre place sur mon tapis de prière, pour appeler plus qu’une tapette à secouer , battre et brosser les tapis . ( et les Tapie .).

    Juste assez proprement pour qu’on puisse y expédier les salopards .

  19. bonsoir et bonne année à tous. J’en remets une couche vu que c’est début janvier 2009 que j’avais essayé de relayer cette info, curieusement mis dans les poubelles:
    http://www.lesmotsontunsens.com/le-trafic-de-drogue-a-sauve-l-economie-mondiale-selon-l-onu-6661

    bon voilà, je n’y reviendrais plus. L’économie souterraine (pas forcément les armes la drogue ou les méga délits d’initiés) me semble peut-être plus pertinante à analyser ici et maintenant, car les choses vont se corser bigrement. la section travail au noir va avoir du boulot je crois. @mitiés.

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